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Knock out !

Publié le par Yv

Knock out !, Reinhard Kleist, Casterman, 2020 (traduit par Paul Derouet)

Une nuit, un homme sort d'un bar, il est passé à tabac par quatre hommes lui criant des insultes homophobes et le laissant ensanglanté. Une silhouette humaine encapuchonnée apparaît alors au blessé qui se confie. Lui, c'est Emile Griffith, né en 1938 aux Caraïbes et émigré aux États-Unis après la seconde guerre mondiale. Il travaille chez un modiste, mais son patron impressionné par sa morphologie le présente à un entraîneur de boxe. C'est le début d'une carrière incroyable.

Être noir aux États-Unis n'a jamais été chose facile, on s'en rend compte régulièrement, et encore assez récemment avec l'arrestation meurtrière de George Floyd. Être noir et homosexuel, dans les années 60 n'est pas non plus une sinécure. Emile Griffith, décédé en 2013, fut les deux et un boxeur plusieurs fois champion de monde. Il fut un jeune homme joyeux qui du moment où il eut du succès fut envié, jalousé, insulté. Sa vie vira au tragique un soir de combat gagné dans la douleur. Elle n'eut plus jamais cette petite insouciance et cette joie de vivre qui transparaît dans les pages de Reinhard Kleist.

C'est un album important qui parle d'intolérance, de peur d'autrui, de vieilles idées éculées qui prônent la supériorité de l'homme blanc hétérosexuel. Même si je ne me retrouve pas totalement dans le dessin de l'auteur, trop noir, trop flou, j'ai trouvé cet ouvrage fort. Reinhard Kleist expose la vie du boxeur sans assener de théories, de grands sentiments et c'est la sobriété qui le rend si profond.

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Cannibale blues

Publié le par Yv

Cannibale blues, Béatrice Hammer, Ed. d'Avallon, 2020

1984, Philippe Ramou, un jeune français vient enseigner l'économie dans un pays d'Afrique, en coopération. Joseph sera son boy, bien que Ramou tel qu'il est vite appelé, ne souhaite pas avoir de serviteur. Mais Joseph est vite indispensable. Il semble travailler pour la Sureté du pays, surveille les moindres faits et gestes de Ramou. Mais pourquoi ce petit Français sans envergure est-il son sujet d'étude ? Et que cache Joseph ? Et Ramou est-il si falot qu'il paraît ?

Je retrouve Béatrice Hammer après Une baignoire de sang. Cannibale blues a été écrit avant et les toutes récentes éditions d'Avallon, structure associative gérée par des bénévoles, ont décidé de le rééditer. Bonne idée, car cette plongée dans le monde des expatriés sur fond de FrançAfrique est à la fois mordante et drôle. Empli de bonnes intentions et de bons principes d'égalité entre blancs et noirs, Philippe Ramou se confronte vite à la réalité du pays : les blancs y ont les postes les plus en vue, vivent entre eux et se paient les services d'Africains heureux de trouver du travail. Béatrice Hammer met le doigt sur la difficile adéquation entre les belles idées et la réalité. Se passer de serviteur est mal vu. Les payer davantage que les autres attise les jalousies de tous. Et finalement le pli semble vite pris. Sauf que Ramou se prend d'amitié sincère pour son boy Joseph. Comment agir lorsque les bonnes intentions se heurtent à la réalité et à la suffisance des blancs ressentie par les noirs, cette espèce de supériorité qui fait que certains pensent pouvoir apporter une aide nécessaire et indispensable ? La prise de conscience est rude.

Je ne cache pas que certains passages m'ont paru longs et répétitifs : la lente et longue introspection de Ramou sur la fidélité, ses questionnements maintes fois réitérés m'ont contraint à passer quelques pages. Néanmoins, sa maladresse, sa pudibonderie sont touchantes, totalement décalées dans le monde des expatriés dans ce pays. Ce livre fonctionne avec les codes du roman initiatique pour ce jeune homme un peu gauche qui sera transformé à jamais.

La seconde partie est plus vive, plus dynamique. Toujours aussi alerte et pleine d'humour, la plume de l'auteure est là pour souligner telle ou telle contradiction, tel comportement ou attitude. Et si je puis m'exprimer ainsi, tout n'est pas tout blanc ou tout noir dans ce roman, Joseph a un secret, d'autres locaux se jouent des blancs et comptent bien en profiter. C'est plutôt joyeux et enlevé mais le contexte est un questionnement de fond sur les rapports entre Occidentaux et Africains dans les années 80 aux grandes années de la coopération.

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Mes plus grands succès

Publié le par Yv

Mes plus grands succès, Stéphane Trapier, Casterman, 2020

Compilation des œuvres de Stéphane Trapier, illustrateur de presse (Télérama, Le 1 Hebdo, XXI, Le Monde, ...) et auteur de bandes dessinées parues notamment dans Fluide glacial. Entre deux illustrations vintage détournées, on suit l'histoire de Giscard et de Giscarda sa femme, sous les traits des propres parents de l'auteur, tandis que lui-même est un Manu Mac'on, héros d'un monde sans R, qui s'exprime et pense sans cette lettre.

J'eus l'occasion il y a quelques semaines de compulser quelques planches virtuellement et l’expérience ne me satisfit point. Mais dès que je tins en mains la version papier, je fis une autre tête et me régalai aussitôt. La couverture du livre un peu rembourrée et ce dessin incroyable me plurent d'emblée, ce qui me conforta et me conforte toujours dans l'idée que je suis un homme à toucher du papier, à tourner des pages et non point à tapoter un écran pour les faire défiler, surtout lorsqu'il s'agit de bande dessinée.

Stéphane Trapier s'amuse avec des références musicales et cinématographiques de son enfance, et j'ai les mêmes -dont parfois, je ne suis pas très fier- ; il fait se télescoper des illustrations de grands films avec des extraits de chansons françaises : Gabin dit à Ventura, par exemple "C'est pourtant clair : je vous dis d'aller siffler là-haut sur la colline !" Il peut aussi être question des grandes préoccupations sociales, comme la retraite, mais mises en scène avec Superman et des Martiens, un seul dessin, très drôle. Décalage et donc rire.

Et la mise en scène des Giscard sous les traits des parents de l'auteur, avec un Giscard à l'ancienne, un peu machiste et une mère qui subit mais envoie des vacheries est irrésistible :

Elle : "A quelle heure arrivent nos amis pour dîner ?

Lui : Mais... Tu sais bien qu'on n'a pas d'amis...

Elle : Quel dommage ! J'avais préparé une blanquette de cons. C'est comme une blanquette de veau, mais préparée pour des cons. Tant mieux pour toi ! Tu vas pouvoir manger leur part."

Les dessins empruntent à plusieurs genres : la bande dessinée de SF vintage, l'illustration type affiche, le détournement d’œuvres et de personnages célèbres, la couleur, le noir et blanc.

Hilarant, décalé, absurde. J'adore.

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Affaires internes

Publié le par Yv

Affaires internes, Didier Fossey, Flamant noir, 2020

2018, un gang de  braqueurs efficace et audacieux écume la France entière, la capitaine Amandine Poirier de la BRB de Lyon tente de les démasquer.

2015, Deux hommes au volant de deux voitures puissantes se défient sur l'autoroute au mépris de toutes les règles et de la sécurité des passagers. Une femme est tuée et une fillette de 5 ans gravement blessée, passagères d'un des deux véhicules. Les deux conducteurs sont saufs. Yann Rocher, flic à la BAC, père de la fillette est dévasté. Il est prêt à tout pour venger sa fille Mia.

Didier Fossey ex-flic connaît bien le monde sur lequel il écrit désormais. Ses polars avec son héros récurrent, Boris Le Guenn sont très réalistes et excellents. Affaires internes se passe de Boris (juste un clin d’œil) et n'en pâtit point. Yann Rocher, chef de la BAC de nuit de Colombes peine à se remettre du grave accident de Mia sa fille et tente tout pour qu'elle puisse surmonter les séquelles inévitables. Son désir de vengeance ne l'a pas quitté même si son boulot de nuit et ses visites fréquentes à Mia lui prennent beaucoup de temps.

Didier Fossey décrit le quotidien des flics de la BAC, la descente d'un homme qui est confronté au pire tous les jours et même dans sa vie personnelle. On sent qu'un rien peut faire sombrer Yann Rocher. Il est sur un fil : il peut chuter du côté obscur des flics ripoux ou rester du bon côté. L'équilibre est instable et précaire. La tension du roman est d'une part dans le personnage de ce flic prêt à presque tout pour sauver sa fille, gardera-t-il assez de force pour mener de front sa vie personnelle, sa vie professionnelle et son envie de vengeance ? Elle est aussi dans l'affaire des braquages dont on se demande comment elle va venir rejoindre la vie du major Rocher. C'est bien fait, l'auteur fait monter le suspense lentement mais sûrement. Les 40 dernières pages sont tendues au point de ne pas pouvoir s'arrêter, et pourtant, point de courses poursuites, de bruit et de fureur, non c'est beaucoup plus subtil et mieux amené. Excellent, comme d'habitude avec Didier Fossey : 190 pages auxquelles il ne manque rien et dans lesquelles rien n'est superflu. Pas de délayage pour faire "gros", pas de digressions inutiles. Tout ce qui est écrit est clair, net, précis et utile à l'histoire ou aux personnages. Tout ce que j'aime.

Il écrit là son septième roman, j'en ai lu 6, c'est dire si vous pouvez y aller les yeux fermés.

PS : j'aime beaucoup la maison Flamant noir, ses auteurs et le soin apporté aux livres. L'éditrice fait un beau travail qui se ressent dans la lecture ; par exemple, le choix de la police d'écriture sur ce roman.

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Une mort pas très catholique

Publié le par Yv

Une mort pas très catholique, Agnès Dumont, Patrick Dupuis, Weyrich, 2020

Un cadavre est retrouvé dans un appartement de Louvain-la-Neuve par Roger Staquet, flic à la retraite et ami du propriétaire qui lui a demandé d'aller voir ce qui se passait, son locataire ne répondant plus depuis des jours. Un jeune policier en uniforme, Paul Ben Mimoun, arrive sur les lieux juste avant le commissaire qui classe l'affaire. Mais le retraité et le novice doutent du suicide et pensent à un meurtre déguisé. C'est en toute discrétion et illégalité qu'ils vont enquêter.

Voici un polar étonnant, publié dans la collection Noir Corbeau des éditions Weyrich, maison belge, ainsi que le sont les deux auteurs. D'Agnès Dumont, j'ai déjà lu A qui se fier ?, paru aux éditions Quadrature, spécialistes de la nouvelle francophone, dont Patrick Dupuis est l'un des créateurs. Je disais donc que ce roman policier est étonnant, parce que les deux enquêteurs travaillant en douce ne peuvent pas remuer ciel et terre et se consacrent donc à peu de suspects. Tous tournent autour du mort pour diverses raisons, certaines pas très avouables. Les investigations sont lentement menées et Staquet et Ben Mimoun se posent beaucoup de questions. La naissance de ce duo complémentaire et inattendu est aussi intéressante que l'intrigue : un retraité veuf qui, s'il ne s'ennuie pas, ne dédaigne pas une dose d'adrénaline et un jeune homme tout frais largué par sa copine qui a besoin de penser à autre chose, qui n'a encore jamais enquêté et qui s'exprime de manière décalée de notre époque où tout va au plus court, au plus moderne.

J'ai pris beaucoup de plaisir à lire cette enquête finement menée, légère malgré un thème principal -la prostitution étudiante- pas très drôle. Habilement écrite, parce que beaucoup de rappels des faits et des hypothèses sans que l'on prenne cela pour du rabâchage voire une crainte de l'Alzheimer des lecteurs. Les personnages sont sympas, des gens simples qui se trompent, osent le reconnaître et repartent sans se décourager. Des convictions et des envies de se prouver et de prouver aux autres qu'ils sont capables.

Tout est à découvrir dans ce roman policier : la ville (Louvain-la-Neuve est une ville nouvelle proche de Bruxelles qui est un cadre géographique intéressant, j'avoue humblement, je ne connaissais pas), le duo de flics, les éditions Weyrich -qui ont presque vingt ans, honte à moi- et la collection Noir corbeau aux couvertures jaune pétant et à la typographie particulière, le duo d'auteurs et une intrigue bien menée. Pensez-y, les vacances arrivent et ce roman paraît idéal.

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Les naufragés de la Méduse

Publié le par Yv

Les naufragés de la Méduse, Jean-Sébastien Bordas, Jean-Christophe Deveney, Casterman, 2020

Théodore Géricault a peint en 1818/1819 l'un de ses plus célèbres tableaux : Le radeau de la Méduse. Le 2 juillet 1816, la frégate la Méduse s'échoue et les canots ne suffisent pas pour tous les passagers. 170 d'entre eux prennent place sur un radeau de fortune. Deux semaines plus tard, lorsque le radeau est secouru, ils sont dix fois moins nombreux.

L'astuce ou la bonne idée de cet album est de raconter en parallèle, l'histoire de l'échouage de la Méduse et les responsabilités du capitaine du bord qui, lui, prit place sur un canot et les horreurs commises sur le radeau pour rester en vie et la genèse du tableau, œuvre gigantesque qui fit beaucoup parler, le drame étant très récent et encore à l'esprit des gens. Scénarisée par les deux auteurs, même si le suspense est un brin éventé depuis le temps, les pages tournent vite.

L'autre bonne idée est de raconter cette histoire à travers quelques personnages emblématiques, réels et survivants, dont certains, Corréard et Savigny, publièrent un témoignage. S’entremêle à cette tragédie, l’histoire de Théodore Géricault (1791-1824), ses amours, sa vie pécuniaire confortable. Si je connais le peintre, j'avoue que je ne savais rien de sa vie assez brève.

J'aime aussi beaucoup le dessin de JS Bordas. Couleurs claires (sauf pour les nuits). Quasi uniformité des tons et traits expressifs. Très bel album, avec en postface un court dossier sur le tableau de Géricault.

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Le grand sommeil

Publié le par Yv

Le grand sommeil, Raymond Chandler, Gallimard, 1948 (traduit par Boris Vian)

Le général Sternwood fait appel à Philip Marlowe, détective privé pour arranger une histoire de maître-chanteur dans laquelle sa fille cadette Carment est impliquée. Celle-ci, droguée, dépourvue de toute morale pour l'époque (années 30), érotomane, a été prise en photo nue et c'est cela que le maître-chanteur veut monnayer. La fille aînée Vivian est joueuse, perd de grosses sommes ; son troisième mari a mystérieusement disparu depuis un mois. Marlowe accepte d'aider le vieux Sternwood et se retrouve bientôt entouré de tout ce que la ville compte de gangsters et des deux filles du général.

Raymond Chandler (1888-1959) fut avec Dashiell Hammett l'un des fondateurs du nouveau polar, du roman noir dans lequel les frontières entre le bien et le mal sont très perméables et dans lequel l'action et la violence priment. Le grand sommeil, écrit en 1939 (adapté au cinéma avec Humphrey Bogart en Marlowe et Lauren Bacall en Vivian Regan, par Howard Hawks) est traduit par Boris Vian et publié dans la Série noire de Gallimard en 1948.

Et que dire d'autre que c'est formidable de lire un grand classique du genre ? Depuis longtemps je m'étais dit qu'il fallait que je le lise, et puis, les autres sollicitations livresques arrivant, je repoussais... Ne faites pas cela, foncez et lisez ce grand roman noir. Tout y est : les bons, les méchants qui changent parfois de place. L'alcool, la clope, le sexe, mais rien à voir avec ce qui s'écrit de nos jours en la matière, pensez donc : de simples photos de nus d'une jeune femme riche et paumée forcent son père à engager un détective !

Il y a surtout Marlowe, un détective un poil blasé, qui fonce et n'hésite pas à braver les gangsters pour arriver à ses fins. Et enfin, l'écriture relâchée de Raymond Chandler, oralisée qui garde néanmoins des traces de classicisme grâce à l'usage du passé simple et de l’imparfait du subjonctif aujourd'hui tombé en désuétude, ce qui est fort dommage. Bref, un classique, un grand classique qu'on trouve aisément. Un conseil : je ne sais pas si d'autres traductions existent, mais préférez celle de Boris Vian, ça double le plaisir. Comment résister à ce qui suit ?

"Au septième étage, je gagnai la suite de petits bureaux occupés par les sous-ordres du Procureur du District. Celui d'Ohls n'était pas plus grand que les autres, mais il l'avait pour lui tout seul. Rien sur sa table qu'un buvard, une garniture de bureau bon marché, son chapeau et un de ses pieds. C'était un homme blondasse de taille moyenne, aux sourcils blancs et raides, aux yeux tranquilles et aux dents soignés. Il ressemblait à tous les gens qu'on croise dans la rue."

L'ultime sollicitation vient d'Hélène.

PS : si mes calculs sont bons, cet article est le 2000ème du blog en douze années...

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Le faucon de Malte

Publié le par Yv

Le faucon de Malte, Dashiell Hammett, Gallimard, 1936 (traduit par Édouard Michel-Tyl)

Sam Spade est détective privé à San Fransisco. Lorsque la belle Miss Wonderly lui demande de retrouver sa jeune sœur enfuie avec un homme, l'associé de Sam se propose pour faire la filature du couple. Dans la nuit, Sam est réveillé par le téléphone : son associé s'est fait descendre. Puis Miss Wonderly disparaît. Ça commence à faire beaucoup pour le détective, surtout lorsque le lieutenant Dundy l'accuse quasiment du meurtre de son associé.

Roman qui parut en 1930, fut traduit en français en 1936 et dont le titre changea quelques années plus tard en le célébrissime Le faucon maltais (le titre original est The Maltese falcon). Passé à la postérité en 1941 grâce au film de John Huston avec Humphrey Bogart en Sam Spade. Malgré cela, je ne l'avais pas lu et le film est très lointain dans ma mémoire.

Le faucon de Malte est le troisième roman des six qu'écrira Dashiell Hammett après avoir publié pas mal de nouvelles. C'est lui qui révolutionna le genre policier. Il n'y a plus ni bien ni mal, Sam Spade est un détective qui cherche certes la vérité, mais peut s'en arranger si ça l'avantage. Grand buveur, bagarreur, dragueur, il n'hésite pas à se servir des autres pour parvenir à ses fins. C'est aussi l'apparition des femmes qui ne se cachent pas, entre femme-enfant et vamp, Effie Perine, la secrétaire de Sam est ainsi décrite : "La jeune fille, bronzée, grande -une fausse maigre, portait une robe de lainage mince qui moulait ses formes comme un drap mouillé. Ses yeux bruns riaient dans un visage enfantin."

Régulièrement classé dans les polars marquants, je vais -une fois n'est pas coutume- dans le sens commun. Court, rapide, incisif dans les dialogues, noir, tout est excellent. Personne n'est tout noir tout blanc sauf peut-être Effie Perine. On s'attend à tout moment à un bouleversement. Les personnages sont brièvement décrits, le reste, il faut le chercher entre les lignes, dans les réparties et c'est assez aisé. Pour l'intrigue, Dashiell Hammett distille des indices sans les expliquer, ça intrigue, évidemment. Les explications suivent quelques pages plus loin et tout s'emboîte parfaitement, jusqu'à la fin.

Ce roman mythique débute ainsi révélant d'emblée l'ambivalence du personnage principal : "Sam Spade avait la mâchoire inférieure lourde et osseuse. Son menton saillait, en V, sous le V mobile de la bouche. Ses narines se relevaient en un autre V plus petit. Seuls, ses yeux gris jaune coupaient le visage d'une ligne horizontale. Le motif en V reparaissait avec les sourcils épais partant de deux rides jumelles à la racine du nez aquilin, et les cheveux châtain très pâle, en pointe sur le front dégarni, découvrant les tempes. L'ensemble du visage faisait penser au masque sardonique d'un Satan blond."

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Psycho-investigateur : L'héritage de l'homme-siècle

Publié le par Yv

Psycho-investigateur,  L'héritage de l'homme-siècle, Erwan Courbier, Benoît Dahan, Petit à petit, 2017

A peine remis de son aventure précédente, et sous la menace d'un procès retentissant, Simon Radius est contraint d'entrer dans les souvenirs d'un presque centenaire à la mémoire défaillante qui ne cesse de parler à son fils d'un trésor. Assisté par Maud, Simon entreprend le voyage au pays des souvenirs de l'homme-siècle, mais ce qu'il va découvrir le troublera durablement.

Le redoutable duo Erwan Courbier au scenario et Benoît Dahan au dessin récidive pour ce tome 4 de cette excellente série tortueuse, dans les arcanes du cerveau et de la mémoire. Très documentée, je ne saurais pas dire ce qui est inventé de ce qui se passe réellement dans nos cerveaux. Sans doute les auteurs ont-ils inséré de la réalité dans leur imaginaire ou vice-versa. Simon Radius voyage physiquement dans les souvenirs du vieil homme et ce n'est pas de tout repos pour lui. Il y a des pages somptueuses, comme l'intérieur du château du Perthuis, que l'on visite en même temps que Maud et le psychanalyste. Le jeu avec les cases de tailles différentes, les plus grandes recelant une foultitude de détails parfois anodins, mais parfois importants. C'est une bande dessinée originale, très inventive, entre fantastique et policier. Une BD bizarre qui ne plaira pas à tous, il faut avoir envie de découvrir, d'être curieux et ouvert. Si vous avez cela, aucun doute, elle vous siéra.

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