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Toutes ces choses à te dire

Publié le par Yv

Toutes ces choses à te dire, Frédérique Volot, Presses de la cité, 2016...,

2003, Ettore est couché sur un lit d'hôpital en France. Le vieil homme sait sa fin proche et veut absolument revoir sa petite fille, Ange qui habite Moscou, il a son histoire à lui laissé en héritage.

Gorizia, empire Austro-hongrois, 1916, Ettore, petit garçon né slave puis devenu italien, subit la guerre que mène l'Italie pour envahir ces territoires. 1930, Ettore quitte l'Italie fasciste pour la France, son violon sous le bras, son travail de tapissier lui laissant espérer du boulot dans son nouveau pays.

Même époque, Lucie qui a quitté un père alcoolique et violent est installée à Vittel, serveuse dans une pâtisserie. La rencontre des deux jeunes gens changera le cours de leurs vies.

A priori, ce genre de livres n'est pas mon truc. Mais j'ai bien aimé les romans policiers de Frédérique Volot (La Vierge-Folle, 59, passage Sainte-Anne), et comme elle a eu la gentillesse de m'écrire un mot rien qu'à moi sur mon exemplaire, je me suis penché dessus. Ce qui semble être un récit très personnel -même s'il est noté que c'est un roman-, puisqu'il est dédicacé "A Ettore/Hector, mon grand-père. A Lucie, ma grand-mère. A Pierina et Marthe, mes arrière-grands-mères" est finalement assez universel. Les personnages vivants sont très romanesques et même lorsque les vies semblent -malheureusement- plus banales comme celles de Marthe et Lucie, mère et fille frappées par un mari et père violent, Frédérique Volot sait les faire résonner au même titre que le parcours chaotique, difficile et mouvementé d'Ettore.

Je ne vais pas en faire des tonnes, certains aspects du genre ne me plaisent pas : la saga, les anecdotes familiales et villageoises, les très nombreux dialogues, mais le contexte que décrit l'auteure est très bien rendu et une découverte pour moi. Certains paragraphes résonnent fortement aujourd'hui, les situations sont semblables et les réactions, malheureusement aussi, lorsque Ettore arrive en France fuyant le fascisme : "Depuis peu, les conditions d'accueil avaient changé. La Ligue cherchait à limiter l'afflux de nouveaux arrivants, lançait même des avertissements aux allures de menaces à tous les étrangers tentés par l'installation en France. (...) De leur côté, les politiques expliquaient que la France n'était plus la terre d'asile rêvée, que le nombre de chômeurs y était déjà trop élevé, que l'on devait d'abord se préoccuper du sort des nationaux." (p.195). J'avoue ma grande inculture en ce qui concerne la guerre entre l'Italie et l'empire austro-hongrois et les exactions inhérentes aux conflits, je ne connaissais pas non plus l'existence du camp de Watten (dans le Nord) dans lequel étaient déportés les étrangers, essentiellement des Yougoslaves, des Italiens et des Russes, c'est donc une découverte, et m'instruire en lisant un roman, ça me plaît. Ettore a participé à la construction du blockaus d'Eperlecques dans des conditions terribles.

Si vous passez par la collection Terres de France des éditions Presses de la cité, arrêtez-vous un moment auprès d'Ettore et Lucie, qui au travers de leur petite-fille, vous raconteront leurs histoires. Un bel hommage. Un exercice pas toujours facile, qui, malgré mes réserves, se lit avec plaisir.

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Quinze rounds

Publié le par Yv

Quinze rounds, Richard Bohringer, Flammarion, 2016.....

Quinze rounds. Quinze chapitres. Dans lesquels Richard Bohringer raconte son enfance, sa jeunesse en banlieue parisienne auprès de sa grand-mère qui l'a élevé, lui, le fils du Boche, né en pleine guerre, 1942. Puis les années de conneries diverses et pas très variées qui permettaient de vivre, de manger et surtout de boire. De se payer la came aussi. Puis Saint-Germain-des-Prés, la musique, les mots déjà avec les diverses rencontres dont celle d'Antoine Blondin. Le cinéma qui lui ouvre ses portes et les belles rencontres avec les réalisateurs, les acteurs, les machinistes, ... Mais aussi le désamour, les colères et le sale caractère qui ferme les portes. C'est tout cela Richard Bohringer. Entier.

Mise à part une remarque liminaire à l'éditeur, sur l'orthographe du nom de l'auteur tour à tour Bohringer ou Borhinger (la bonne est sur la couverture représentée, mais si on ôte la jaquette, c'est l'autre, pareil en 4ème de couverture, ça change en fonction de la ligne), puis sur quelques coquilles laissées, je dois dire que ce livre m'a énormément plu, comme tous les autres de Richard Bohringer. J'aime son écriture, on a l'impression de l'entendre nous lire son texte avec ses changements de rythme, d'intensité, sa voix si reconnaissable, pleine de vie, ses emportements, ses moments de tendresse, ses pauses, tout ce qui fait de l'auteur ce type attachant à la si forte personnalité.

Les premiers rounds sont consacrés à sa jeunesse et aux maladies qu'il a contractées : cécité pendant deux ans puis scoliose sévère qui l'ont obligé à partir loin de Paris pour se faire soigner. Puis le retour, les petites conneries, puis la montée crescendo vers la dope et l'alcool. Le cinéma, le théâtre, les voyages, les rencontres masculines, ceux qui deviendront ses amis, ses proches, les rencontres féminines -la maman de Romane et la maman de ses autres enfants surtout : "C'est en Savoie que j'ai rencontré Astrid. Si jolie avec son anorak bleu dans la neige blanche. Jolie comme l'aurore derrière la montagne. Gracieuse comme une gazelle avec du bélier qui coule dans ses veines. Elle était la nature. Ça me plaisait. J'ai toujours aimé profondément la nature et elle en était un moment." (p.104)-, la recherche du père et de la mère qui l'ont laissé auprès de sa grand-mère....

Je serais trop long si je voulais aborder tous les thèmes dont parle R. Bohringer, c'est l'histoire d'une vie, de sa vie, de sa naissance à la maladie qui le ronge depuis quelques années, le cancer. Le lire, c'est l'entendre, d'autant plus qu'il s'adresse directement à nous, apaisé, sa colère transformée ou laissée de côté pour ne se souvenir que des belles choses : "J'ai soixante-quatorze ans et je tire la route avec toute l'énergie de chaque instant. Il y a des gens qui m'aiment et des gens qui ne m'aiment pas. Alors, ma quête, mon graal, mon attirail de quincailler, mes bontés et le bruit que fait ma vie, le beau et le pas beau, juste un humain, je suis juste un humain. Ça peut prendre toute la vie. C'est promis, vous qui désespérez, chers lecteurs, de devenir meilleurs, vous avez de longues années encore devant vous. Il faut juste se mettre dans l'idée ! Se préparer à son olympisme." (p. 245)

Au fil de ses ouvrages, Richard Bohringer a su construire une œuvre à part, littéraire assurément, qui lui ressemble. J'ai presque tout lu et tout aimé (seuls trois autres titres sont recensés sur le blog, les autres je les ai lus avant : Traîne pas trop sous la pluie, Les nouveaux contes de la cité perdue, C'est beau une ville la nuit). Quinze rounds est différent dans le ton, ressemblant dans la forme. Ceux qui aiment Richard Bohringer apprécieront de le voir apaisé, tranquille et auront -au moins- un pincement au cœur de le voir parler de sa mort. Ceux qui ne l'aimaient pas avant, eh bien je doute qu'ils l'aiment plus avec ce livre. Tant pis pour eux.

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Le cuisinier français

Publié le par Yv

Le cuisinier français, François Pierre La Varenne, Éd. Vendémiaire, 2016.....

Sous titré 400 recettes du XVII° siècle, ce livre regroupe les recettes d'un grand chef de l'époque, François Pierre La Varenne. Édité en 1651, le livre obtint un fort succès et devint une bible pour le cuisiniers de l'époque. La version ici présente est abrégée, modernisée et illustrée. Plusieurs chapitres mettent l'eau à la bouche : Potages, Entrées, Accompagnements et ornements, Entremets, Tourtes et pâtés salés, Confits, conserves et salaisons, Desserts et pâtisseries sucrées, Confiseries, confitures, curiosités et délicatesses, Quelques breuvages et agréments pour la table.

La première chose qui vient à l'esprit en feuilletant ce livre, c'est qu'il est beau, richement illustré et que la langue (pas celle de porc ou de bœuf, même s'il en est question) est datée et étrangement belle, des tournures qu'on ne retrouve plus guère maintenant ni dans les romans ni dans les livres de cuisine. Rien que les noms de certains plats ou de titres de chapitres sont dépaysants : "Entrées qui peuvent se faire dans les armées ou à la campagne", "De plusieurs sortes de choses à confire, pour garder dans le ménage de la maison ou de cabaret".

Si certaines recettes semblent encore faisables de nos jours -notamment tout ce qui concerne les confits, confitures, et boissons-, il n'en est pas de même pour toutes quoique elles pourraient endiguer la prolifération de certaines espèces non endémiques : Potage de tortues : Prenez vos tortues, coupez-leur la tête et les pieds, faites-les cuire avec de l'eau, et quand elles seront presque cuites, mettez un peu de vin blanc, des fines herbes et du lard. Lorsqu'elles seront cuites, ôtez-les de la coquille et tirez-en la bile, coupez-les par morceaux et passez-les à la poêle avec du bon beurre, puis faites-les mitonner dans un plat, ainsi que votre pain et votre bouillon. Enfin, garnissez vos tortues bien assaisonnées d'asperges coupées et de jus de citron, puis servez." (p. 21) Végétariens abstenez-vous car il est beaucoup question de viandes, de poissons, dans ces années-là, on présentait cinq plats par repas (pour ceux qui en avaient les moyens, les plus pauvres n'en avaient souvent qu'un seul, le simple potage).

Le XVII° siècle est celui où la cuisine française se modernise et acquiert ses lettres de noblesse qui en feront plus tard et pour longtemps la meilleure cuisine du monde. La Varenne fut un précurseur du livre de cuisine, de la cuisine au beurre (la recette du beurre clarifié que l'on conseille encore de nos jours est dans ce livre). Son éditeur, Pierre David, en 1659, dans la préface écrit des phrases totalement d'actualité : "Nous connaissons quantité d'ouvrages, et qui ont été bien reçus, sur les remèdes et les guérisons des maladies à peu de frais, sans avoir recours aux apothicaires. Mais celui-ci, vous enseignant les manières de corriger les qualités vicieuses des viandes par les assaisonnements diversifiés, qui n'a de même pour but que la conservation et le maintien de la bonne santé, qui ne tend qu'à donner à l'homme une nourriture solide, bien apprêtée et conforme à des appétits qui font, en beaucoup de personnes, la règle de leur vie et de leur embonpoint, ne doit pas, à mon avis, être moins considéré. En effet, il est bien plus doux de faire une dépense honnête et raisonnable, à hauteur de ses moyens, en ragoûts et autres délicatesses de viandes pour faire subsister la vie que d'employer une immense fortune en remèdes pour recouvrer la santé." (p.11)

Un ouvrage à feuilleter, qui peut donner des idées, j'en ai repéré quelques unes pour cuisiner les vieux légumes qu'on a de plus en plus sur les marchés (panais par exemple) voire même ceux qui ne sont jamais tombés en désuétude mais qu'on a tendance à toujours utiliser de la même manière. Bon, je ne dis pas que je ferai des adeptes et je croulerai sous les éloges des convives habituels, mais je vais essayer, ça me donnera la petite motivation qui me manque pour préparer les repas quotidiens.

Allez, bon appétit !

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L'odeur du café

Publié le par Yv

L'odeur du café, Dany Laferrière, Zulma, 2016 .....

Dans ce roman, écrit en 1991 et publié à Montréal, puis au Serpent à plumes, en France en 2001, et enfin en poche en cette année chez Zulma, Dany Laferrière raconte l'été de ses dix ans, lorsqu'il s'est retrouvé freiné dans ses ardeurs de jeune garçon par une maladie et les conseils du médecin de se reposer pendant plusieurs semaines. Au côté de Da, sa grand-mère, il observe alors ce qui se passe autour de chez lui, écoute les histoires qui se racontent et les conseils de Da. Il ne résiste néanmoins pas à l'appel des copains pour aller faire quelques bêtises dans les rues de la ville de Petit-Goâve ; la fine équipe n'est jamais méchante mais farceuse. Lorsque les journées sont longues, le jeune garçon se rappelle quelques journées passées, à l'école notamment.

Comme tout le monde, je croyais avoir lu un livre de Dany Laferrière, et, à ma grande surprise, à la lecture des titres de ses ouvrages, je me suis aperçu qu'il n'en était rien. Quelle erreur, surtout que ça fait plusieurs fois que je le vois à des émissions de télévision et qu'à chaque fois, malgré ma volonté de ne pas m'éterniser, eh bien, je l'écoute jusqu'à la fin. L'odeur du café est donc mon premier roman de l'auteur. Essai largement transformé, je me suis régalé à ce récit d'enfance. D'abord, j'ai beaucoup aimé la construction : de courts chapitres formés de courts paragraphes qui se parlent, se répondent sans se suivre obligatoirement, comme lorsque reviennent des souvenirs par bribes, et tous en même temps, ou l'un appelant le début d'un autre avant de revenir au premier, pour en raconter l'entièreté. Loin d'être déroutante, cette disposition dynamise la lecture et l'ancre dans l'enfance dans laquelle on peut passer d'une idée à l'autre sans transition.

Ensuite, l'écriture est un plaisir si évident qu'il paraît même superfétatoire de le signaler. Beaucoup de bonne humeur, d'humour (un peu de culture chrétienne sera nécessaire pour comprendre le dialogue suivant) :

"- Que font les poissons à midi ?

- C'est l'heure de manger.

- Pour les poissons aussi ?

- Pour tout le monde.

- Et qu'est-ce qu'ils mangent ?

- Du poisson, me dit Willy Bony

- Mais on n'est pas vendredi." (p.140)

Même les événement tristes ne sont pas racontés de manière plombante, mais comme des choses qui devaient arriver, des fatalités ; le narrateur ayant dix ans, son insouciance prime, et tant mieux. Il est aussi très à l'écoute des histoires de son pays, des légendes que lui raconte Da. Et puis Dany Laferrière joue avec les notions de vérité donnant à plusieurs reprises différentes versions d'un même fait, vues par différents protagonistes, et là, on s'aperçoit qu'effectivement chacun voit avec ses propres filtres et que la vérité n'est pas toujours telle qu'on la croit être. Habile, très habile et excellent raconteur d'histoire, Dany Laferrière nous embarque totalement dans un sourire permanent. Promis, je le relirai, d'ailleurs un autre titre m'attend...

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Ah ! Si j'étais pompiste !

Publié le par Yv

Je voudrais dire ici mon mépris le plus total -c'est le mot- envers tous ceux qui dès que le réservoir de leur putain de bagnole a baissé d'un cran s'empressent à courir la pompe approvisionnée, empêchant donc tous ceux qui ont vraiment besoin de carburant pour travailler de nourrir leur outil de travail. Sans votre empressement aux pompes, nous aurions du stock pour tout le monde pendant plusieurs semaines, au lieu de cela, en deux jours c'est plié, plus rien pour personne, sauf pour vos petites autos d'égoïstes. Naïvement, je pensais que la solidarité était un des piliers de notre société, je pensais même qu'elle avait repris du poil de la bête lorsque les Français sont allés en force manifester un soutien après des attentats. Force est de constater que je me suis trompé, et lourdement. Dès les premières alertes de fermeture des raffineries, le conducteur moyen s'est affolé et a emmené son automobile dans les stations-services, faire la queue des heures pour quelques gouttes qui permettraient de remplir à ras la gueule le réservoir, histoire de faire un ou deux kilomètres de plus que son voisin. Bande de veaux et de moutons ! Et que feront les autres, ceux qui n'ont pas pu, ceux qui n'ont pas eu le temps d'aller faire le plein ? Et ceux qui bossent avec leur voiture, taxis, auto-écoles, artisans entre autres... Chacun sa gueule, chacun sa bagnole et tant pis pour ma voisine ou mon voisin. Bravo la solidarité et l'esprit de partage. Et, n'oubliez pas de remplir vos armoires de farine, de sucre et de boîtes de conserve, on ne sait jamais, dès fois que vous manqueriez...

Je vous crache ici mon mépris d'autant plus volontiers que m'étant petit à petit coupé des actualités, je n'ai appris que vendredi matin, en allant faire mes courses et en voyant une longue file aux pompes à essence, que blocage des raffineries il y avait. Je n'ai pas fait le plein depuis, je ne le ferai que lorsque je n'aurai pas deux plombes à passer dans ma caisse à attendre que les bœufs rajoutent les un ou deux litres qui manquent pour atteindre le ras-bord. Et lorsque je n'aurai plus de carburant eh bien, j'irai à pieds, j'y vais déjà... ou à vélo, ou en transport en commun...

Je serais pompiste, putain, je mettrais le litre de gazole et d'essence à 5 euros, je me ferais des roubignolles en or, et après, je me casserais en vacances loin des cons venus trois ou quatre fois dans la semaine, ou alors, puisque je parle de solidarité, en l'honneur d'iceux -les cons-, je reverserais le surplus à une association de solidarité, ouais, c'est ça, je ferais ça... Mais je ne suis pas pompiste, alors je me contente de vous dire mon mépris et de rêver d'une étincelle, une seule qui mettrait le feu à tous les réservoirs pleins, juste pour le plaisir de voir des belles lumières dans vos bagnoles, ça nous changera, des lumières, elles n'en voient pas souvent !

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Boris Bergman

Publié le par Yv

Boris Bergman, ses interprètes, Universal, 2016.....

Boris Bergman, l'homme qui a écrit plus de 1000 chansons est mis à l'honneur dans ce coffret de trois CD. Il a débuté avec Rain and tears d'Aphrodite's child, puis a continué avec des artistes aussi divers que Nana Mouskouri, Dalida, Nicoletta, ... Puis ce fut d'autres rencontres et notamment celle avec Alain Bashung avec qui il écrira Gaby oh ! Gaby et Vertige de l'amour, puis des albums entiers jusqu'au noir Novice, l'album par lequel j'ai vraiment découvert Bashung, que je n'ai plus quitté ensuite. Novice est sombre, noir, totalement décalé en 1989, lorsqu'il sort il marque l'envie du chanteur de casser les codes du rock français (paradoxalement, malgré tout le bien que j'en dis, je n'ai pas cet album, je n'ai commencé ma collection Bashung qu'avec le suivant, Osez Joséphine). C'est le deuxième CD du coffret qui est consacré à Bashung, ses deux grands succès avec Boris Bergman mais aussi d'autres titres moins connus et excellents et des versions d'autres artistes (Keren Ann, HF Thiéfaine, Christophe, ...)

Le premier CD du coffret Bergman est consacré aux Français : Eddy Mitchell (Lèche-botte blues), Juliette Gréco, la très belle chanson de Maxime Leforestier et Vanessa Paradis, Chienne d'idée, les femmes nommées plus haut ainsi que Christophe Maé qui ne sont pas ma tasse de thé, mais aussi l'énergique et excellent Paul Personne...

Le dernier CD est en majorité anglo-saxon, pas mal d'arrangements des chansons de Gainsbourg (Franz Ferdinand et Jane Birkin dans A song for sorry angel, Fautline, Brian Molko et Françoise Hardy dans une reprise d'une de mes chansons préférées de Gainsbourg : Requiem pour un con qui devient Requiem for a jerk, ...). Mais on y trouve également une étrange adaptation de Space Oddity que chante Gérard Palaprat (Un homme a disparu dans le ciel). Le moins qu'on puisse dire à l'écoute de ce coffret c'est qu'en plus d'être très talentueux, Boris Bergman est éclectique

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Pères, fils, primates

Publié le par Yv

Pères, fils, primates, Jon Bilbao, Mirobole, 2016 (traduit par Marc Fernandez).....

En voyage au Mexique pour le mariage de son beau-père, Joanes attend un coup de téléphone crucial pour la survie de son entreprise de climatisation. Un ouragan est annoncé et l'hôtel dans lequel il séjourne avec sa femme, sa fille, son beau-père et sa femme est évacué vers Valladolid. lors d'un tour en voiture juste avant le départ, Joanes renverse une femelle chimpanzé, l'enterre dans la jungle et rentre mais trop tard, l'hôtel a été vidé. Il part en voiture, trouve sur la route l'un de ses ex-professeurs et sa femme handicapée. Il les prend à bord de son automobile. Commence alors une journée particulière avec ce professeur que Joanes juge coupable de quelque mauvaise action contre lui, lui ayant fait échapper le boulot particulièrement attrayant qu'il briguait juste à sa sortie de l'université.

Roman d'une descente aux enfers : jusqu'où l'homme peut s'abaisser pour obtenir ce qu'il veut et les conséquences des actes commis sur l'entourage ? Il débute simplement, une évacuation d'une ville à cause d'un ouragan : les habitants sont habitués et tout devrait se dérouler normalement mais quelques grains de sable d'abord assez éloignés les uns des autres viennent gripper un peu la belle mécanique. Et puis ces grains de sable, ces détails, se révèlent importants au fil de l'histoire et prennent tout leur sens, loin d'être anecdotiques.

Avec son idée, Jon Bilbao aurait pu en faire des tonnes, allonger son roman, ajouter des effets dramatiques ça et là, mais il a eu l'intelligence et le talent pour ne rien en faire. 217 pages, rien de trop, rien ne manque. Les personnages sonnent juste et les liens entre eux également. A part la présence de l'ouragan le livre est écrit avec une économie de moyens assez inhabituelle, l'auteur va à l'essentiel.

D'habitude lorsque je lis, je note des pages qui me marquent pour diverses raisons pour alimenter mon article. Là, je n'ai rien noté, non parce que je n'ai rien trouvé, mais parce que je me suis coulé totalement dans l'histoire subtilement amenée et menée, un peu à la manière de Sukkwan island de David Vann (toute comparaison gardée, les récits se ressemblent en certains points et notamment dans la construction qui va vers une inévitable catastrophe).

Je ne vais donc pas faire dans l'allongement que je reproche souvent à certains auteurs, mon article sera court -ouf, enfin, entends-je par ici-, juste, je cite le tout début, les premières phrases, mais faites-moi plaisir, n'hésitez pas à lire ce Pères, fils, primates, à la couverture très réussie comme toujours chez Mirobole :

"Les animaux se cachaient, ou peut-être avaient-ils senti ce qui allait arriver et avaient-ils fui à l'intérieur des terres en quête d'un refuge. Depuis son arrivée au Mexique, Joanes n'avait aperçu que des oiseaux, omniprésents et bruyants, et des lézards aux grandes pattes qui couraient partout autour de la piscine de l'hôtel. Aucune trace des anacondas, des jaguars et des singes qu'il avait espéré trouver là, s'exhibant juste pour lui, perchés au sommet des branches touffues." (p.9)

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Coup fourré rue des Frigos

Publié le par Yv

Coup fourré rue des Frigos, Alain Amariglio, Yves Tenret, La Différence, 2016.....

Walter, ex-prof de dessin, viré de l'Éducation Nationale pour cause d'éthylisme avéré zone depuis dans Paris, plutôt dans le XIIIème arrondissement, un quartier ancien en pleine reconstruction. Lorsque son pote Abel, instituteur, est accusé d'avoir volé un tableau d'un maître chinois, Walter intervient : Abel a descendu cette œuvre dans la cave de l'école, elle a disparu, il est donc soupçonné par son responsable hiérarchique, l'inspecteur de l'Éducation Nationale qui est bientôt retrouvé mort. Abel est en mauvaise posture, Walter se charge de disculper son ami.

Walter traîne dans le XIIIème, La Butte-aux-Cailles, c'était le quartier de sa première aventure, Coup de chaud à la Butte-aux-Cailles. Fidèle à ses repères, même s'ils ont changé en même temps que le quartier, il reste dans ces rues, se décalant cette fois-ci vers la rue des Frigos. Il n'est pas au mieux de sa forme, tente d'enfouir le fiasco de sa vie -boulot perdu, femme et enfants itou, ou plutôt il les a quittés de peur de leur faire honte ou du mal - avec force verres de bière et d'alcool fort. Il picole dur, fait des mélanges. Il est totalement incontrôlable, lui-même ne sachant pas toujours ce qu'il fait. Néanmoins, il est sympa le pochtron, attachant, il a de la répartie, de l'honneur et il a la biture mélancolique. Il s'étonne des nouvelles architectures parisiennes, des nouvelles rues aux noms improbables, des nouveaux cafés dans lesquels il faut disposer de quinze minutes pour choisir son café tellement la carte est longue et complexe, on est loin des rades d'antan où l'on pouvait prendre son petit noir au zinc : "Alors, vous êtes plutôt Espresso Origine, Ristretto Bianco, Caffe Mocha, Americano, Macchiato, Con Panna, ou peut-être Caffe Latte ?" (p.183). Il s'étonne également des nouvelles enseignes, toutes les mêmes quelles que soient les villes où l'on se promène ("Rendez-nous la lumière, rendez-nous la beauté", chante fort à-propos Dominique A), des cartes de fidélité, du marketing effréné, ... tout cela pour toujours nous vendre plus, plus cher.

Ce roman est aussi un constat amer sur la situation de l'école de la république qui dérive dangereusement vers une sorte de privatisation faute d'argent. L'administration ne fait plus dans le social (les réseaux d'aide aux élèves en difficulté disparaissent, les CLIS également) mais plutôt dans le clinquant, l'événementiel... La situation décrite par les deux auteurs paraîtra sans doute exagérée, mais je n'en suis pas sûr (Alain Amariglio a été instituteur, il connaît donc la partie), la dérive envisagée me fait frémir, tant je suis convaincu que s'il existe bien un domaine qui doit rester public, c'est l'école (et là, ne me lancez pas sur le sujet de l'école privée, je risque de m'emporter...) "... nous manquons de places en CLIS, de remplaçants, de psychologue scolaire, et on continue de supprimer des classes ! On nous explique qu'on veut le succès pour tous, mais l'État se défausse sur les collectivités locales et les crédits pédagogiques varient du tout au tout selon la richesse des communes ! Du coup, l'Éducation dite nationale laisse les entreprises privées s'immiscer dans sa mission." (p.281)

Mais n'oublions pas que ce roman est noir, il y a donc intrigue et enquête, menée par Walter. Tout s'imbrique, la situation du nouveau Paris, celle de l'école et la disparition du tableau. Walter avance, doucement, ralenti par la pépie qui l'oblige à s'arrêter dans les cafés, et comme il en ressort bourré, il lui faut le temps que toutes ses connexions neuronales se mettent à jour. Il travaille à l'ancienne, pas de portable, un ordinateur dont il sait à peine se servir, il parle et il écoute et ensuite, lorsque son esprit est clair, il fait les liens. Très bien servi par les quatre mains des auteurs -j'espère qu'il n'y a pas de manchot parmi eux, sinon, mon début de phrase est caduc-, Walter est un anti-héros que j'ai retrouvé et que je retrouverai avec grand plaisir. L'atmosphère mélancolique est très agréable, la langue belle, les dialogues savoureux, Paris très belle même en grand changement. Bref, un très bon roman noir, un grand cru pour rester dans un domaine cher à Walter.

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Regarder l'océan

Publié le par Yv

Regarder l'océan, Dominique Ané, Stock, 2015....

A travers de petits textes, Dominique Ané nous parle de son adolescence à moins que ce ne soit de la fiction, le tout s'emmêlant sans doute, comme le dit Lim Chul-woo, auteur coréen : "Sur le squelette de mes souvenirs d'adolescent, j'ai drapé quelques haillons romanesques". De courts textes qui se répondent entre eux et qui répondent aussi au recueil précédent de l'auteur, Y revenir, plus centré sur l'enfance. Une suite donc...

La ville est très présente dans ce livre, jamais nommée par son nom, elle est néanmoins le lieu vers lequel le jeune homme narrateur converge pour ses nouvelles expériences. Sans doute le gouffre qui s'est creusé entre lui, "Le Parisien" (parce qu'il habite dans une petite ville) et ses anciennes connaissances de la campagne -et que celles-ci lui font bien sentir-, est-il la source de cette omniprésence de la ville. Et même si l'éveil des sens se fera plutôt assez loin de l'urbanisation, la découverte de l'amitié forte, de l'amour, de la musique, les essais de toutes sortes se feront en ville.

Beaux et courts textes de l'auteur qui habituellement est à peine dissimulé sous son nom de chanteur, Dominique A. Si vous ne le connaissez pas, c'est un tort, écoutez son dernier et somptueux album Eléor, vous verrez des similitudes dans l'écriture -une chanson d'ailleurs s'appelle L'océan. Les textes de Regarder l'océan pourraient aisément se retrouver mis en musique. Ils sont nostalgiques, poétiques, mélancoliques : "La vie me fait peur, mais il faut bien vivre. Un regret, si fort soit-il, n'y suffit pas. J'apprends à me faire aimer, et à aimer moi-même. Cela m'occupe. Mon obsession a perdu de son autorité : j'en viens parfois à douter de la fiabilité de mon souvenir. Je m'en veux alors un peu." (p.41).

De la même génération que Dominique Ané, je me retrouve dans pas mal de ses écrits, dans les états d'âme d'adolescents que nous étions, pas vraiment dans la musique que j'ai découverte assez tardivement et pas en tant qu'interprète mais dans le reste. Nous traînons également dans les mêmes endroits puisque nous nous sommes croisés deux fois récemment, lui descendant d'un navibus (pour les curieux, la signification de ce mot étrange est ici) et moi y montant -la première fois- et vice-versa la seconde ; moi, je l'ai reconnu mais pas l'inverse -ce qui est étonnant car je suis quand même allé deux fois à ses concerts et j'achète ses CD..., m'enfin, me snoberait-il ?- je n'ai pas osé l'aborder et le déranger et d'ailleurs que lui aurais-je dit à part "J'aime bien ce que vous faites... ?", même si c'est vrai que j'aime bien ce qu'il écrit et chante...

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