Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Zanzaro circus

Publié le par Yv

Zanzaro circus, Jack-Alain Léger, L'Éditeur, 2012

Jack-Alain Léger s'est défenestré ce mercredi, le 17 juillet. Voici, il y a un an et demi ce que je disais du premier volume de son autobiographie qu'il ne finira donc pas. Je n'y ai rien changé et j'attendais la suite :

L'auteur -ou devrais-je dire selon ses principes, l'écrivain ?- de ce livre "nous invite à le suivre dans le cirque qu'aura été sa vie" (4ème de couverture). Entre son enfance, son adolescence, ses débuts dans le métier. Il croise Sagan, d'ailleurs son livre commence par un repas chez elle, Derrida, et d'autres personnages pas toujours reluisants à ses yeux. Et puis, on lit aussi des pages sur ses parents, sur sa mère notamment atteinte de psychose maniaco-dépressive, mal qu'elle léguera comme une sorte d'héritage familial à son fils. Jack-Alain léger parle donc aussi de sa maladie qu'on appelle désormais plus communément la bipolarité.

Allons droit au but : je suis très partagé sur ce livre. D'abord, l'auteur mélange tellement d'idées, de souvenirs, de réflexions, que parfois, je ne savais plus où j'en étais. Ensuite, il règne dans son livre une sorte d'intellectualisme, d'élitisme que je n'aime pas. Non que je n'aime pas les intellectuels, mais j'ai du mal à comprendre le mépris qu'ils peuvent avoir pour ceux qui n'ont pas l'envie ou la chance d'égaler leur Grandeur. En cela Jack-Alain Léger me paraît un peu suffisant, pédant par moments. Disons que ce n'est pas la modestie qui l'étouffe ! En outre, il règle aussi des comptes avec des éditeurs, d'autres écrivains qu'il n'aime pas mais il ne les nomme pas toujours : j'ai donc eu parfois l'impression de rester un peu au bord de la route, de ne pas comprendre toutes ses colères et leurs subtilités ou plutôt, en tant que lecteur de base de ne pas pouvoir lire entre les lignes ce que les initiés peuvent eux comprendre sans décryptage particulier. 

Par contre, le point fort du bouquin, c'est son écriture. Jack-Alain Léger manie, triture, chamboule les mots, les phrases, parfois excessivement longues, parfois jouant avec les assonances : "Maman, de fait, n'est nullement impressionnée par les allégations de ce ponte pontifiant." (p.108), parfois avec verbe, parfois sans. Toutes les possibilités et tous les goûts sont présents. Certaines pages, surtout celles dans lesquelles l'auteur parle de sa mère et de leur maladie communes sont absolument magnifiques (là, il fait parler sa mère) : "... mon second fils est en train de sombrer à son tour, je le vois, pas un pli, il est comme moi maniaco-dépressif, le mal est héréditaire, le mal, transmissible, vient de ma lignée, un gène, je ne sais quoi, mais selon certains freudiens de stricte observance, freudiens freudiens, non, il n'y aurait rien là de biologique mais de la répétition inconsciente d'une histoire dont le récit se transmet en secret de génération en génération..." (p.73). D'autres passages sont plus crus, plus directs, plus violents mais toujours écrits sous cette forme de longues phrases, très virgulées (je ne sais pas si ce mot existe, mais il a l'avantage d'être compréhensible par tous !) : "Oui, Maman, je suis une folle de ce genre, qui bande en reluquant des hommes, des vrais, des qui se battent comme des hommes, des qui ont des couilles au cul [*], des qui matraquent les crouilles à coups de pèlerine en caoutchouc noir roulée serrée, des qui se font des colliers d'oreilles tranchées au coutelas sur les cadavres ennemis, des qui n'ont pas peur du sang, des qui puent la sueur, des qui tuent à l'arme blanche, à la grenade, au napalm, des qui palment de nuit et plongent dans les eaux froides pour poser des mines, des qui sautent dans le vide en faisant, de l'index et du majeur, le V de la victoire." (p.69)

([*]cette expression m'a toujours fait marrer, car mon papa l'employait beaucoup malgré nos oreilles forcément chastes, mais des oreilles peuvent-elles être chastes ? Je vous laisse méditer.)

Voilà donc mon dilemme exposé sous vos yeux concernant ce livre qui porte le sous-titre de Windows du passé surgies de l'oubli et qui est le premier d'une série de 7 racontant la vie de l'auteur avec des sous-titres comme Les entractes de ma vie ont été trop longs (citation du Marquis de Sade) ou encore Le gris de la griserie, le rose du morose, Zanzaro circus étant le titre générique j'imagine. Zanzaro est le surnom que Irena, la nounou italienne du narrateur, lui donnait quand il était petit : "Zanzaro (d'après le mot zanzara qui, en italien, signifie moustique...)" (p.76)

Un roman qui ne peut laisser indifférent, il peut heurter, répugner, fasciner, plaire séparément ou tout cela ensemble mais il ne provoquera pas d'avis tiède !

Merci Marianne de chez l'Éditeur qui a la bonne idée de publier de très bons bouquins.

D'autres avis chez Fattorius, Tilly et chez Aperto libro

Commenter cet article
E
Bonjour, nouveau concept d'exposition sur le web www.icidexpos.com bonne visite amicalement Eddie.
Répondre
G
Le sujet ne m'attire pas, le style non plus... je vais faire comme les autres, sur ce coup-là et aller voir ailleurs. Je te signale en passant que je t'ai tagué. Oui, j'ai osé! :-)
Répondre
Y
<br /> <br /> peut être ses romans ? Je vais aller voir de quoi retourne le tag<br /> <br /> <br /> <br />
H
Clairement cela ne me tente pas du tout!
Répondre
Y
<br /> <br /> Pourtant, il y a de belles pages !<br /> <br /> <br /> <br />
D
Ca secoue, d'un point de vue stylistique, c'est vrai! Ce livre est un vrai tourbillon.<br /> Merci pour le petit lien!
Répondre
Y
<br /> <br /> Ça secoue, c'est exactement cela<br /> <br /> <br /> <br />
A
Pile poil le genre de littérature française qui me fait fuir.
Répondre
Y
<br /> <br /> En fdait, je l'ai lu au départ, parce que je connais quelqu'un atteint de la même maladie, mais ce n'est pas cela qui au final retient mon attention !<br /> <br /> <br /> <br />
K
Si l'écriture est un point fort, autant la retrouver dans un de ses romans, alors? J'ai passé l'offre de ce livre, bah...
Répondre
Y
<br /> <br /> Eh oui, parfois on refuse des livres qu'on aurait finalement peut-être aimés, mais bon, il y en a plein d'autres... Et puis l'écriture peut aussi de J-A Léger peut aussi profondément agacer<br /> <br /> <br /> <br />