Le dernier contrat
Le dernier contrat, Olivier Maulin, Ed. La Branche, février 2012
Paris est en pleine insurrection. La crise économique, le manque de confiance dans les dirigeants entraînent les gens à descendre dans la rue. Dans le même temps, Joseph Victor, tueur à gages est contacté par un homme pour honorer un contrat. Arrivé au rendez-vous, il découvre son contact mort, assassiné et doit lui-même descendre les deux hommes coupables de cet acte. Il décide alors de remonter la filière vers le vrai commanditaire de son "dernier contrat" et se retrouve en face de Frère-la-Colère, le fédérateur des rebelles, l'icône de la Révolution.
Cinquième tome de l'excellente collection Vendredi 13. Pas un polar, mais plutôt un roman d'aventures (Patrick Raynal, celui qui a lancé l'idée de la série le définissait comme tel dans la très bonne émission télévisuelle sur France 5 : Entrée Libre). Olivier Maulin part de son héros, s'attarde un peu sur lui, puis nous plonge dans la seconde partie du bouquin dans la révolte en plein cœur de la fine équipe autour de Frère-la-Colère.
J'étais un peu rafraîchi par la relative lenteur du départ et par la mise en place un peu longue de l'intrigue, mais a posteriori je m'aperçois que j'ai pris un aussi grand plaisir à lire ce livre que les autres de la série. Bien fichu, l'auteur prend le temps de bien nous montrer pourquoi et comment la révolte s'est installée : le monde qu'il décrit est d'ailleurs à peine différent de ce que nous pouvons entendre en ce moment, entre la perte du triple A, la hausse des prix, les taxes qui augmentent, le chômage itou, le pouvoir d'achat qui fait l'inverse et la défiance des électeurs envers leurs dirigeants, ... Il suffirait de presque rien, comme dirait l'autre... Peut-être des élections toutes proches ?
Bon, revenons à notre livre, Olivier Maulin fait de son tueur à gages un homme désabusé, blasé :
"- Tout glisse sur vous. Vous ne vous étonnez de rien, vous ne vous attristez de rien, vous ne vous réjouissez de rien. [...] Bon Dieu, vous ressemblez à une machine. Rien ne vous touche ? Rien ne vous émeut ? Rien ne vous amuse ?
- Écoutez, je déteste la psychologie...
- Oui, je sais, vous détestez la psychologie, vous détestez la discussion, vous détestez le nudisme, vous détestez vous arrêter sur les aires d'autoroute, vous détestez mon vocabulaire, vous détestez mon survêtement...
- Pourquoi vous vous énervez comme ça ?
- Parce qu'il est impossible d'avoir un rapport humain avec vous.
J'ai levé les yeux au ciel.
- A mon avis, vous attendez trop des rapports humains. C'est un travers typique de la jeunesse." (p.155)
L'aventure est vue par les yeux de Joseph Victor le tueur à gages, c'est le narrateur à la première personne. C'est donc au travers de son regard désabusé, revenu de tout que nous voyons la révolution dans la rue et ceux qui la fomentent et l'attisent. Contrairement à lui, eux croient pouvoir changer le monde. Ils croient à la mobilisation du peuple autrement que par les urnes pour virer les gouvernants qui s'accrochent à leurs privilèges. (Tiens, tiens, ça me rappelle quelque chose : une -et plusieurs- révolutions arabes qui ont réussi à renverser leurs dirigeants corrompus, transposée en France.)
Un roman qui sait se faire apprécier au long de l'avancée du lecteur, qui mérite qu'on s'y arrête. Très visuel, le même Patrick Raynal que plus haut dans la même émission que plus haut disait que chaque livre de la collection devait être construit pour pouvoir être filmé : contrat largement rempli par Olivier Maulin, je me laisserai tenter par le film également s'il se tourne.
PS : ne lisez pas la 4ème de couverture ! Et par pitié, messieurs et mesdames qui écrivez ces fameuses 4èmes de couvertures, n'en dites point trop ! Vous déflorez beaucoup trop de l'histoire. Laissez un maximum de suspense et de surprise aux lecteurs !
Claude Le Nocher, Clara, Livrogne en parlent aussi
Merci Davina de chez Gilles Paris.