Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Xéno

Publié le par Yv

Xéno, Alain Delmas, Intervalles, 2021

Dans un pays qu'on imagine en Amérique du sud, très autoritairement dirigé par Victor Casanegra depuis plusieurs décennies, un attentat est perpétré par un groupe de citoyens méprisés qui vivent dans les sous-sols, des sous-hommes, pourtant les premiers habitants de ce pays avant que les autres qui prendront le pouvoir ne débarquent.

Cet attentat marque le début des hostilités entre tous les dirigeants, les ministres qui briguent la place du Caudillo vieillissant. Qui du fils adoptif, de l'ex-maîtresse restée très proche, du fils spirituel pour succéder au chef, voire anticiper son départ ?

C'est dans ce contexte auquel il faut rajouter une terrible épidémie qui touche principalement les jeunes femmes et qui épargne le groupe des exploités qu'un journaliste étranger est autorisé à entrer dans le pays et à y faire un reportage, très surveillé.

Quel roman ! S'il souffre, à mon avis, de quelques longueurs, répétitions, il ne ménage pas ses effets de surprise. Là où l'on croit que l'auteur est déjà allé loin, il pousse encore le bouchon vers le fantasme, l'irréalisme avant de se dire que tout n'est peut-être pas si éloigné d'une future probable vérité. Ce livre qui pioche allègrement dans le polar et le roman d'anticipation se lit avec avidité et dégoût, mais un dégoût qui demande à continuer la lecture pour voir jusqu'où Alain Delmas peut nous emmener. Et l'on n'est pas déçu.

Difficile de ne pas y voir des pays ou des personnes vivantes ou ayant réellement vécu, néanmoins bien cachées. Alain Delmas décrit un monde économico-politique terrible dans lequel tous les coups, mêmes les plus vils, les plus bas -surtout iceux- sont permis. A chaque fois que l'on passe d'un intervenant à un autre -une ministre, un conseiller...- on se demande ce qu'il va inventer pour tenter de prendre le pouvoir. Un monde violent et incroyablement créatif dans l'art de nuire à son ami et rival. C'est du billard à multiples bandes. Les associations entre deux personnes ne durent que le temps qu'elles profitent au plus futé.

Il y a dans ce roman, comme dans le précédent de l'auteur, Dans l'ombre du viaduc, une ambiance incroyable qui vous saisit et ne vous lâche plus. Il y a aussi, les questions de la dérive de nos sociétés, du pouvoir et de sa violence, de son attrait pour certains qui le veulent quel qu'en soit le prix, de la science lorsqu'elle est dirigée par des personnes ne cherchant que le profit. Tout cela en à peine 300 pages, du grand art.

Commenter cet article