Hospice&love
Hospice&love, Thiébault de Saint Amand, Hugo Éd., 2016...,
Armand Bouzies, ancien commissaire, quatre-vingt-cinq ans en cette année 2024 quitte sa fille, son gendre et ses petits enfants chez qui il logeait et qui partent à Singapour. Il se retrouve en ECSPD (Établissement Collectif de Séjour pour Personnes Dépendantes), une sorte de maison de retraite mais en pire, pour les vieux qui n'ont pas d'argent pour se payer un bel établissement. Armand n'est pas dépendant, il est affecté au bloc des autonomes, en chambre double. Lui qui ne rêve que de solitude et de tranquillité met tout en œuvre pour se débarrasser de ses voisins. Vieux bougon, désagréable, il fait tout pour se faire détester, jusqu'au jour ou Élisabeth Löturz arrive dans l'établissement. Distinguée, élégante et discrète, quatre-vingt deux ans. Armand est séduit.
Très agréable ce roman qui surfe sur une vague actuelle, celle qui met en scène des personnes âgées. L'autre vague étant le porno soft pour les mamans -notamment aux éditions Hugo. J'attends la prochaine vague, celle où l'on mélangera les deux précédentes. La sexualité chez les seniors, c'est un sujet dont on parle assez peu dans les romans, Thiébault de Saint Amand l'effleure dans celui-ci de manière à la fois légère et sérieuse. Mais évidemment ce n'est pas un traité sur le thème, d'autres aspects de la vie en communauté, qui plus est en maison de retraite, sont abordés : la solitude et les enfants qui délaissent leurs parents, la maladie, la mort, l'obligation de respecter les horaires et le règlement intérieur d'un établissement ce qui n'est pas toujours aisé lorsqu'on était seul chez soi auparavant, la mort, l'amour, la maltraitance, ... Le ton du roman est à l'humour mais noir, même si parfois l'on rit jaune, puisque l'on rit avec la mort, la vieillesse, la déchéance, la décrépitude comme disait l'un des vieux amis de ma famille mort à 92 ans, comme quoi l'on peut vraiment rire de tout. Il faut dire qu'Armand est drôle : une langue verte, directe emplie de vacheries, des passages à l'acte pas sympathiques pour ses congénères, mais de fait, sympathique, il ne l'est pas. Disons que ce n'est pas le voisin de chambrée idéal. Même s'il s'adoucit lorsqu'Élisabeth arrive dans la maison. Il ne perd pas sa verve pour autant, par exemple cet extrait de dialogue entre lui et elle, quasiment au début de leur rencontre :
"Quand j'ai vu votre perfusion, j'ai deviné que notre amour serait impossible.
- Pourquoi donc ?
- Avec tant de glucose dans vos veines, si j'embrassais vos lèvres, considérant mon début de diabète, ce serait un défi à la médecine." (p.82)
Je ne vous en dirai pas plus sur cette idylle naissante, ni sur le caractère d'Armand. Sachez que si j'ai trouvé le démarrage un peu long, la mise en place des personnages et des lieux, dès l'arrivée d'Élisabeth l'intérêt augmente et redouble carrément au mitan de l'ouvrage qui compte en tout 236 pages. Pour être complet, j'avais déjà lu avec bonheur Thiébault de Saint Amand dans Les dessous (en dentelle) de l'Élysée.