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coup de coeur

Un dieu un animal

Publié le par Yv

Un dieu un animal, Jérôme Ferrari, Actes sud, 2009
Un jeune homme revient dans son village natal après s'être battu en Irak en tant que mercenaire. Il a perdu là-bas son ami d'enfance qu'il avait entraîné dans cette aventure. Il éprouve d'énormes difficultés à se reconnaître dans son village et à travers ses parents : "il est condamné à affronter parmi les siens une nouvelle forme d'exil." Il tente, pour se sauver, de retrouver la jeune fille qu'il avait rencontrée adolescent, Magalie.
Étonnant récit qui s'adresse au jeune homme à la deuxième personne du singulier, qui parle de Magalie à la troisième personne et qui passe de l'un à l'autre très habilement, sans arrêter le cours des mots et sans que le lecteur ne perde le fil. On suit très bien cet homme dans sa quête d'identité et de Dieu. Pas de chapitres, le récit est ininterrompu pendant les 100 pages du livre.  Magalie est plus ordinaire, si je puis m'exprimer ainsi, mais n'a pas vécu les horreurs de la guerre dans le désert. Néanmoins, elle est un personnage important qui peut sauver l'ex-mercenaire, elle-même en pleine interrogation sur le sens de sa vie.
Ferrari adopte un style très personnel, tout en retenue, en évocation plutôt qu'en description. Un style poétique qui tranche avec le sujet traité.
Je ne cache pas que je me suis un peu ennuyé sur certaines longueurs, notamment lorsque Jérôme Ferrari évoque le prophète Hussein Ibn Mansûr El-Hallaj et la quête divine du héros. J'ai été tenté de les passer assez vite. Par contre nombre de passages excellents voire vraiment jubilatoires et passionnants sauvent l'ensemble du bouquin qui marquera ses lecteurs, moi en particulier. D'une part par la qualité d'écriture et d'autre part par la qualité des personnages décrits et par leur force.

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Tout seul

Publié le par Yv

Tout seul, Chabouté, Ed. Vents d'Ouest, 2008
Tout seul est surnommé ainsi parce qu'il vit donc, tout seul, dans un phare en pleine mer. Un pêcheur du coin l'approvisionne en denrées, hebdomadairement. Personne d'autre que lui ne sait qu'il vit là sauf son second, lequel est très intrigué par ce bonhomme, Tout seul, que personne ne voit jamais.
J'aime beaucoup les BD de Chabouté. Il pousse ici très loin ce qu'il fait un peu d'habitude : l'absence de dialogue. Je n'ai pas compté les mots échangés dans les phylactères (les bulles de BD, ça c'est mon côté intello !), mais on pourrait presque les dénombrer sur les doigts des mains (j'exagère un peu), pour un livre de plus de 300 pages (au format plus réduit qu'une BD traditionnelle) ! Eh bien, ça marche. Chabouté dessine la solitude, les questionnements comme on lirait de longues descriptions dans un livre écrit. C'est formidable de justesse, de simplicité. On passe en tant que lecteur (?) de la curiosité à la compassion, jamais à la pitié. L'atmosphère est moins pesante que dans les précédents recueils de Chabouté, on sent qu'il a de la tendresse pour ses personnages et qu'il connait et aime particulièrement la mer et ses environs.

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Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran

Publié le par Yv

Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran, Eric-Emmanuel Schmitt, Albin Michel, 2001
Moïse, une grosse dizaine d'années vit tout seul avec son père qui le délaisse. Il se lie avec "l'arabe" du bas de la rue : "arabe, ça veut dire ouvert de huit heures du matin jusqu'à minuit et même le dimanche dans l'épicerie."
Je ne cours pas après les gros vendeurs de livres en général, mais j'avoue une faiblesse pour E-E Schmitt, depuis ma lecture d'Oscar et la dame rose. J'avais ensuite continué avec l'excellent La part de l'autre.
Monsieur Ibrahim raconte une très belle histoire . C'est aussi une réflexion sur la tolérance, l'amitié, un conte, un récit initiatique joliment raconté et qui a fait l'objet d'une adaptation cinématographique avec Omar Sharif dans le rôle de M. Ibrahim. Très fréquentable.

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Histoire de Tönle

Publié le par Yv

Histoire de Tönle, Mario Rigoni Stern, Ed. Verdier poche, 1998
Tönle (prononcer Ténle) est berger, sur le plateau d'Asiago, à la frontière de l'Italie et de l'Autriche-Hongrie. Il est né dans les années 1830/1840. Pour survire, il est contrebandier, mais se fait prendre par les douaniers. Il se défend, s'enfuit. Il est condamné à la prison par contumace et ne peut plus revenir chez lui. Il vit de petits travaux dans divers pays, revient chez lui à la mauvaise saison, en cachette des autorités. Une amnistie, en 1904, lui permet de rentrer officiellement au pays. Et là, il redevient berger, et le reste jusqu'à la fin de sa vie même aux plus forts des batailles de la guerre 14/18.
C'est un petit roman attrayant à plus d'un titre. D'abord Tönle est un personnage fort, romanesque bien que taiseux et pudique. Ensuite, la frontière et la difficulté de vivre dans ses environs, surtout aux moments de conflits est omniprésente : peut-être cela parlera-t-il plus à des Alsaciens qu'à moi qui suis de Bretagne ? Et enfin, ce livre a le mérite de parler de la première guerre mondiale, mais d'un côté que je ne connaissais pas : les Italiens contre les Autrichiens. Dans ce qu'on lit communément chez nous, il est question des tranchées et des combats entre Français et Allemands. Ici, point de tranchées (montagnes obligent !) et point de Français. Un point de vue différent et intéressant. Cependant, malgré la relative modestie du livre (132 pages), il y a des longueurs et notamment les passages décrivant les marches et les balades de Tönle parce que l'auteur cite beaucoup de noms de lieux que je ne connais pas et qu'il est parfois difficile de suivre, d'autant plus que Tönle marche beaucoup et vite ! Mais cet écueil est surmontable et restent les premières impressions dont j'ai parlé plus haut.

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Le chemin des âmes

Publié le par Yv

Le chemin des âmes, Joseph Boyden, Albin Michel, 2006
"1919. Nord de l'Ontario. Niska, une vieille Indienne, attend sur un quai de gare le retour d'Elijah, un soldat qui a survécu à la guerre. A sa grande surprise, l'homme qui descend du train est son neveu Xavier, qu'elle croyait mort, ou plutôt son ombre, méconnaissable. Pendant trois jours, à bord du canoë qui les ramène chez eux, et tandis que sa tante essaie de le maintenir en vie, Xavier revit les heures sombres de son passé : l'engagement dans l'armée canadienne avec Elijah, son meilleur ami, et l'enfer des champs de bataille en France..."
Voilà pour la mise en bouche, écrite en quatrième de couverture. C'est un roman -le premier de Joseph Boyden- lent, sombre, prenant. Je n'ai pu le lire que lentement, moi qui lis plutôt vite d'habitude. L'atmosphère, quand elle parle des tranchées en France et en Belgique est étouffante, pesante, boueuse, oppressante, mais quand elle aborde les grands espaces des Indiens libres du Canada  -c'est à dire non parqués en réserve-, elle aère le lecteur lui donne une bonne bouffée d'air, pour lui permettre de se replonger dans l'enfer de la guerre. L'auteur alterne les chapitres parlant de la guerre avec ceux qui racontent l'enfance et la vie de Xavier et Elijah avant la guerre. Ces deux pans de l'histoire des deux hommes  sont absolument passionnants. Je suis persuadé que ces deux personnages, ainsi que leurs compagnons d'armes et Niska la tante de Xavier hanteront les lecteurs pendant longtemps, enfin moi, sûrement ! Difficile de les effacer de la mémoire comme cela. 
C'est un roman qui ne peut laisser indifférent  malgré une noirceur certaine. Et même si une telle histoire, décrite de cette manière aurait tendance à vous faire fuir, prenez  juste un peu de courage pour emprunter le livre et commencer sa lecture, vous ne regretterez pas. Toutefois, si vous hésitez encore, voici la critique de Jim Harrison (excellent écrivain étasunien : Légendes d'automne, notamment), qui j'espère saura vous donner l'envie de lire ce roman : "Un roman lumineux et sombre à la fois. il vous fera peut-être souffrir, mais ça en vaut véritablement la peine. Irrésistible"

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ABC Mademoiselle

Publié le par Yv

ABC Mademoiselle, Marilyne Mangione, Fabrice Vigne, Ed. Le fond du tiroir, 2009

Abécédaire sensuel dans lequel chaque lettre est représentée par un dessin de femme nue. Chaque femme est dans une position permettant de deviner la lettre. Marilyne Mangione est au dessin. Fabrice Vigne illustre ses œuvres de textes courts. Ou vice versa ? Chaque texte est en deux parties, dans l'une, l'auteur s'adresse à la jeune femme dessinée et dans l'autre, cette jeune femme parle des parties de son corps en rapport avec la lettre qu'elle représente.
Les dessins sont  sensuels, femmes aux formes visibles. Les textes soulignent simplement, mais de jolie manière cette sensualité. Les uns et les autres sont lisibles et visibles par tout public.
C'est un beau livre d'art. La mise en page et les couleurs sont soignées, magnifiques, comme à chaque fois au Fond du tiroir. Le papier est très agréable à toucher, et pour ne rien gâcher du plaisir, il est "50% recyclé et 50% issu des forêts développées durablement". Alors, si vous voulez un bon, beau et original  livre d'art, n'hésitez pas c'est ici. En outre, vous pouvez avoir une dédicace. Épatant, non ?

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Qui comme Ulysse

Publié le par Yv

Qui comme Ulysse, Georges Flipo, Ed. Anne Carrière, 2008
Recueil de 14 nouvelles beaucoup commenté sur les blogs. Georges Flipo nous entraîne dans des voyages, en Amérique du Sud, Thaïlande, en Inde... Il nous raconte avec beaucoup de talent et d'érudition, des moments de la vie de gens "normaux", comme tout le monde. De n'importe quel sujet qu'il traite, on a l'impression que Georges Flipo le maîtrise totalement. Que ce soient les corridas, le jeu d'échec, le tango ou encore le carnaval de Venise. Je ne sais s'il a visité tous ces pays ou étudié toutes ces pratiques, mais il est, pour le moins très bien documenté ! Toutes les nouvelles sont denses, les personnages très bien décrits, intenses, pas toujours recommandables, en pleine interrogation. On sent qu'ils seront, de toute évidence, différents après l'histoire qui leur arrive. En outre, le style et le vocabulaire de Georges Flipo sont riches, mais non prétentieux, pédants. Un vrai plaisir de lecture !
Je soulignerai mes nouvelles préférées : L'île Saint-Absence, (ou comment une jeune fille rêve à sa propre île), Un éléphant de Pattaya, (ou comment un Occidental se comporte en Thaïlande) , La partie des petits saints (une extra-ordinaire partie d'échecs) et La route de la soie (pour les voyageurs immobiles). Mon choix est très subjectif, d'autant plus qu'à part la nouvelle qui donne son nom au livre, Qui comme Ulysse, que j'ai moins aimée, j'ai vraiment énormément apprécié ce recueil. Si vous ne connaissez pas l'auteur, cliquez sur son nom en haut de l'article, vous serez sur son site.

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Lambeaux

Publié le par Yv

Lambeaux, Charles Juliet, P.O.L, 1995 (édité aussi chez Folio)
C'est un récit autobiographique. Charles a été séparé de sa maman encore bébé et placé dans une famille d'accueil, dans les années 30. La première partie est la vie de sa maman biologique et la seconde, sa propre vie, sa douleur et sa difficulté à se construire avec son passé (qu'il n'a appris qu'à 8 ans, lorsque sa "vraie" maman est décédée), malgré l'immense amour donné par  toute sa famille d'accueil et sa seconde maman en particulier. C'est beau. C'est fort. J'ai pris une claque en le lisant. Je ne connaissais pas du tout cet écrivain, mais grâce à Sylire, c'est chose faite.
L'écriture de Charles Juliet est directe, franche, travaillée, il emploie le "tu" lorsqu'il s'adresse à sa mère, mais aussi lorsqu'il parle de lui, ce qui rajoute, à mon sens, de la force et de la proximité avec lui. Pour chaque mot :"D'abord descendre. Encore descendre. Le dégager de la tourbe, ou de la boue, ou bien encore d'un magma en fusion. Puis, le tirer, le hisser, lui faire péniblement traverser plusieurs strates au sein desquelles il risque de s'enliser, se dissoudre. S'il en émerge, enfin, il vient au jour, et quand tu le couches sur le papier, alors que tu le crois gonflé de ta substance, tu découvres qu'il n'est qu'un mot inerte, pauvre, gris. Tu le refuses. Tu redescends dans la mine, creuses plus profond, cherches celui qui apparaîtra plus dense, plus coloré, plus vivace. Ainsi sans fin. Ainsi cet épuisement qui te maintient en permanence à l'extrême de ce que tu peux."
On comprend combien a été douloureuse mais salvatrice pour Charles Juliet, l'écriture. Elle aurait pu l'être aussi pour sa maman, mais la vie et la mort en décident autrement. Alors certes, ce n'est pas un livre drôle, mais Charles Juliet réussi à en faire un livre positif, malgré tout ce qu'il y raconte.
Franchement, si vous devez lire un livre cette année -n'oubliez pas ! Les bonnes résolutions !-, n'hésitez pas vous l'avez devant vous !

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La petite cloche au son grêle

Publié le par Yv

La petite cloche au son grêle, Paul Vacca, Ed. Philippe Rey, 2008
Un garçon de 13 ans, très attaché à sa mère découvre, par hasard un exemplaire de Du côté de chez Swann, de Marcel Proust. C'est une révélation pour lui et pour sa mère qui espère ainsi que son rêve de faire de lui un écrivain pourra enfin se réaliser. Le père, étranger à ce monde de la littérature proustienne y entre à son tour. Dans un très joyeux désordre, s'engage alors une lutte pacifique pour conjurer un mauvais sort qui s'acharne sur la famille et pour que la bonne humeur et la vie persistent, allant même jusqu'à créer des liens entre les gens de cette petite ville, qui n'existaient pas auparavant. Tout cela grâce à Marcel Proust !
J'ai mis un peu de temps avant de prendre la décision de lire ce roman ; j'avais lu beaucoup de chroniques sur divers blogs (trop nombreux pour que je puisse mettre tous les liens. Désolé.) Et puis, un article de plus m'a finalement décidé et je ne regrette rien sauf peut-être de ne l'avoir pas ouvert plus tôt. C'est un très joli roman, plein de bons sentiments, mais pas "gnangnan", plein de douceur, de tendresse et d'amour. C'est très bien écrit, d'une écriture que je trouve à la fois simple et exigeante. Bien sûr, ce n'est pas du Proust, mais il est omniprésent ; Paul Vacca en parle admirablement bien : "[les puristes] penseront toujours que Proust n'a écrit que pour eux, qu'eux seuls peuvent en pénétrer la subtilité, qu'eux seuls le méritent. Sans se rendre compte, une seule seconde, qu'ils se révèlent aussi ridicules que les Verdurin, dont ils se gaussent. Alors au diable les erreurs ! Pourvu que l'on partage du plaisir avec d'autres." Ceci étant, que ceux qui n'ont pas lu Proust (je n'en ai moi-même lu que les deux tiers de Du côté de chez Swann) ne s'alarment pas, cette petite cloche est accessible à vous aussi.

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