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bande dessinee

Chroniques décalées d'une famille ordinaire et vice versa

Publié le par Yv

Chroniques décalées d'une famille ordinaire et vice versa, Séverine Tales, Payot graphic, 2022

Lorsque Servane et Séverine annoncent qu'elles vont avoir un bébé ensemble, c'est l'incompréhension autour d'elles. On est avant le mariage pour tous, avant une relative acceptation par la société des couples homoparentaux. Louis naît, puis quatre ans plus tard, des jumeaux Paul et Simon. Et les deux femmes tentent d'organiser une vie de famille, entre les biberons, les couches, l'école, les rendez-vous le travail DRH pour l'une et assistante sociale en protection de l'enfance -tiens, une collègue !- pour l'autre.

La bande dessinée de Séverine Tales est une suite de saynètes à chutes qui, je dois le confesser, m'ont souvent attiré une éclat de rire. Beaucoup d'humour donc, d'auto-dérision avant tout et pas mal de légèreté malgré les remarques sexistes et homophobes. Tout chez l'autrice est prétexte à rire : les remarques concernant leur couple, leur manière d'élever leurs enfants -la fameuse éducation positive- qui surprend -c'est un euphémisme- sa mère plutôt adepte d'un cadre plus strict, les blagues des enfants, leurs bons mots ou leurs vacheries entre eux et parfois contre leurs mères. Bref, tout y passe et l'on est, comme le titre l'indique, tout à fait dans une chronique familiale ordinaire. Le fait qu'elles soient deux femmes n'a pas plus d'importance que le fait d'avoir trois enfants dont des jumeaux. A ce propos, ils sont hilarants, mais je n'aurais sans doute pas aimé les avoir à la maison, ils sont également fatigants. Mais j'ai ri et même partagé quelques dessins pour faire rire.

J'aime beaucoup cet album, qui tranche par un dessin original -l'autrice dirait malhabile- dans lequel par exemple seuls les contours des visages sont exprimés -peut-être une difficulté à faire le reste ? Les décors y sont minimalistes. en fait, c'est le mot c'est de la BD minimaliste avec des textes décalés et drôles. Très réussi.

Si vous aussi vous voulez rire, lisez cet album et rendez vous sur le compte Instagram de Séverine tales, elle partage plein de dessins.

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Environnement toxique

Publié le par Yv

Environnement toxique, Kate Beaton, Casterman, 2023 (traduit par Alice Marchand)

Originaire de Cap-Breton, une île de Nouvelle-Écosse à l'est du Canada, l'un des coins les plus pauvres du pays, Kate, part travailler à l'ouest, là où l'on extrait le pétrole des sables bitumeux. Elle n'a pas le choix, elle doit gagner de l'argent pour rembourser son prêt étudiant.

Elle se retrouve dans un univers très masculin, sexiste, machiste. Les remarques, la drague plus que lourde, le harcèlement sont son quotidien.

Très gros roman graphique dans lequel Kate Beaton raconte son parcours : elle arrête ses études à 21 ans et se retrouve dans ce monde inconnu et brutal. J'ai beaucoup appris sur les sables bitumeux, je n'y connaissais rien. Extraction particulièrement anti-écologique, qui empoisonne les populations autochtones sans aucun scrupule, par profit. J'ai aussi appris sur la dure vie des gens qui bossent dans ces mines : des longues, très longues journées, du repos qui ne permet pas de rentrer chez soi, car beaucoup de travailleurs viennent de l'est du Canada. Ils restent donc sur place, ne voient que rarement leurs familles.

Kate Beaton raconte le harcèlement quotidien, qui commence par des petits noms dont certains l'affublent, puis par des remarques, des réflexions, des allusions voire carrément des demandes directes "Tu baises ?". Être une femme dans ce milieu est éprouvant d'abord parce que le travail l'est et ensuite parce qu'il faut subir tout cela et être constamment en alerte. Toujours s'opposer est exténuant, donc, elles laissent passer, laissant la porte entrouverte à des brutes qui la poussent violemment.

Malgré le thème difficile, le dessin de Kate Beaton est doux, dans les tons gris-bleutés, bicolores, mais aussi dans les traits de ses personnages. L'autrice n'est pas manichéenne, elle ne dit pas que tous les hommes l'ont harcelée ou embêtée, elle s'est très bien entendu avec certains qui ont su l'écouter, la soutenir. La dureté du travail, l'éloignement des familles, la connerie humaine peut expliquer sans excuser le comportement de certains, c'est une des théories qu'avance Kate pour tenter de vivre normalement. Elle témoigne dans cet album très fort de deux ans de sa vie (entre 2005 et 2008), de deux ans de souffrances au travail, celle qu'elle a vécu et celle dont elle a été le témoin.

Il paraîtrait que ce serait le roman graphique préféré de Barack Obama en 2022, je ne sais pas si c'est un critère qui fait vendre, mais force est de constater que cet homme à bon goût. 435 pages passionnantes, édifiantes et un peu flippantes quand même sur le comportement de certains hommes, sur ce qu'ils se permettent vis-à-vis des femmes, simplement parce qu'elle sont femmes. "Un témoignage rare, porté par une voix profonde" (4ème de couverture). Absolument !

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Les Trois Mousquetaires. D'Artagnan

Publié le par Yv

Les trois mousquetaires. D'Artagnan, Cédric Tchao, Néjib, Casterman, 2023

C'est l'histoire de la reine Anne d'Autriche qui aurait comme amant le duc de Buckingham auquel, en gage d'amour elle aurait laissé des ferrets offerts par le roi que celui-ci, sur les conseils avisés de Richelieu et Milady, lui demande de porter le jour du mariage de Gaston, frère du roi. Les mousquetaires vont donc devoir aller les chercher en Angleterre déjouant les pièges machiavéliques de Milady.

A l'occasion de la sortie du film de Martin Bourboulon, Les trois mousquetaires, avec Eva Green, Romain Duris, Vincent Cassel, François Civil et Pio Marmaï, les éditions Casterman sortent deux versions décalées du livre d'Alexandre Dumas. La première, j'en ai déjà parlé, c'est une BD humoristique de Fabrice erre et Gilles Rochier. La seconde, et bien c'est ce manga français -qui se lit de gauche à droite, classique pour nous- de Cédric Tchao aux dessins et Néjib au scénario.

C'est toujours intéressant de voir les différentes adaptations dune œuvre colossale, sans doute l'une de celles qui en a suscité le plus (plus de 600 films dans le monde entier). Le manga, ce n'est pas trop mon dada et j'avoue que les scènes de combat, si elles plairont au public ciblé, les jeunes gens, m'ont laissé froid voire m'ont agacé, en fait je les trouve confuses, mais c'est sans doute ce que recherchent les lecteurs de mangas.

Les jeunes lecteurs de la maison vont le dévorer, le lire et le relire et même, me demandent déjà : "Il sort quand le deuxième tome ?". Preuve que l'objectif est atteint !

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Les Trois Mousquetaires (1)

Publié le par Yv

Les trois mousquetaires. D'Artagnan dans la place, Fabrice Erre, Gilles Rochier, Casterman, 2023

D'Artagnan monte de sa Gascogne natale à Paris, sur recommandation, pour être Mousquetaire. Même pas encore arrivé à la capitale, il se retrouve en mauvaise posture face à un homme redoutable, Rochefort qui le laisse quasi pour mort. Mais le Gascon est résistant et c'est en arpentant les rues de Paris qu'il retrouve Rochefort et qu'il décide de le suivre, bousculant au passage, trois hommes qui lui demandent réparation : Athos, Porthos, Aramis. C'est le début de l'aventure.

Évidemment tirée de l’œuvre d'Alexandre Dumas, cette bande dessinée humoristique prend quelques libertés avec le texte original, des raccourcis et des allusions à quelques faits plus modernes que l'on pourra reconnaître au fil des pages. Ça part dans tous les sens, le dessin est drôle, des gros nez, des caricatures, de la grosse blague qui plaît au plus grand nombre et qui peut être lue par un très large public.

A l'occasion de la sortie en avril du film Les trois mousquetaires, les éditions Casterman, à l'instar de ce qui peut se faire aux États-Unis sortent deux bandes dessinées sur le même thème, très différentes : un manga dont je parlerai plus tard et cet album, qui annonce la couleur dès la couverture qui est une adaptation libre et inspirée de l'affiche du film. Je ne sais pas si la lecture de cette BD incitera à aller au cinéma, mais je dois dire d'une part, que l'esprit crétin, irrespectueux et très drôle me paît bien et m'a fait rire, et d'autre part, que je suis assez tenté pour aller voir le film de Martin Bourboulon dont je mets la bande annonce ci-dessous

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Buffalo Runner

Publié le par Yv

Buffalo Runner, Tiburce Oger, Rue de Sèvres, 2015

"Qui suis-je ? Ed Fisher, un buffalo runner ! Avec mes gars on en tuait tellement... On manquait plus de cartouches que de bisons. Quelques milliers de chasseurs, vingt millions de buffalos, même les Indiens étaient impuissants devant nos fusils. Personne ne pouvait rien contre la déferlante d'immigrants et nous n'étions que la première salve. Mais ça, on l'a compris beaucoup plus tard." (4ème de couverture)

Ed Fisher est un vieil homme qui sauve une jeune femme d'une attaque brutale dans laquelle son père et son frère sont morts. La nuit, en se préparant à affronter le reste de la bande d'agresseurs, Ed Fisher raconte sa vie à Mary. Et sa vie, c'est celle de la conquête de l'Ouest. Repousser toujours plus loin les habitants d'origine, les différentes tribus d'Indiens. Pour cela, tuer leur source de nourriture, les troupeaux de bisons et soudoyer les chefs à coup d'alcools ou perpétrer des massacres contre ceux qu'ils soupçonnent de se rebeller en tuant hommes, femmes et enfants.

C'est toute l'histoire des États-Unis au XIX° siècle que raconte et dessine Tiburce Oger : violence, conquête, guerre civile, naissance des grosses fortunes... C'est aussi de cette partie que s'empareront les scénaristes d’Hollywood pour forger la stature du cow-boy, longtemps montré comme le libérateur et le civilisé, mythe que le bédéiste met en pièces comme il a pu l'être dans certains films d'Hollywood après la grande période des westerns dits classiques. C'est un bel album assez violent comme l'histoire ou les histoires qu'il narre.

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Est-Ouest

Publié le par Yv

Est-Ouest, Pierre Christin, Philippe Aymond, Dupuis, 2018

Pierre Christin, scénariste de bande dessinée a beaucoup voyagé. Du grand ouest américain aux terres lointaines de l'ex-URSS, chose assez rare en pleine guerre froide.

Il raconte ses voyages et ses rencontres avec des gens qui deviendront des piliers de la BD : Jean-Claude Mézières qu'il a connu pendant la guerre, caché dans les caves pendant les bombardements et avec lequel il collaborera pour Valérian et Laureline, Enki Bilal et Jean Giraud...

Après la vie de René Goscinny, pas banale, racontée par Catel, en voici une autre tout aussi particulière. D'ailleurs les deux se sont croisés, au magazine Pilote, dont Goscinny est le co-fondateur. Ce dernier donnera des conseils à Pierre Christin pour écrire des scénarios de bande dessinée.

Pierre Christin, né en 1938, fait son premier voyage aux États-Unis en 1965 pour aller enseigner le surréalisme à l'Université de Salt Lake City. Il découvre la vie américaine, loin, très loin de celle qu'il vivait en France, sous le général de Gaulle : presse muselée, télé aux ordres... Mai 68 n'était pas encore passé par là. Puis, ce sera l'est, l'ex-URSS, encore un autre monde.

J'aime bien cet album au dessin assez classique, réaliste. Il raconte la différence de vie entre l'ouest et l'est et l'Europe au milieu. C'est une partie de la seconde moitié du XX° siècle qui y est racontée, vue par les yeux de Pierre Christin, forcément subjective, mais qui, je trouve colle assez bien aux images qu'on peut en avoir. Et c'est aussi la naissance d'un parcours artistique avec ses collaborations nombreuses et fructueuses qui donneront des séries et des albums qui ont marqué la bande dessinée. Jugez un peu, des albums créés avec Mézières, Goetzinger, Ferrandez, Bilal, Tardi, Ceppi, Boucq, Balez et Aymond bien sûr.

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Le roman des Goscinny

Publié le par Yv

Le roman des Goscinny. Naissance d'un Gaulois, Catel, Grasset, 2019

Lorsque Anne Goscinny demande à Catel de faire le portrait de son père en BD, celle-ci refuse d'abord, puisque elle, son truc, ce sont les biographies de femmes : Kiki de Montparnasse, Olympe de Gouges, Alice Guy ou Joséphine Baker... Mais fascinée par la vie de René Goscinny, elle trouve un subterfuge pour écrire cet album qui parle d'abord de Anne Goscinny, l'écrivaine... qui raconte son père.

J'aime beaucoup Catel et notamment ses ouvrages cités plus haut. J'ai donc aimé retrouver son trait pour montrer une vie peu ordinaire, celle de l'un des plus grands scénaristes de la BD franco-belge, si ce n'est le plus grand. Lucky Luke, Astérix et Obélix, Iznogoud, Le petit Nicolas, pour parler des plus connus, c'est lui. Des grands classiques de la bande dessinée. Mais avant d'arriver à la notoriété et au succès, il a galéré René Goscinny. Né en France en 1926. Enfance en Argentine, sa famille pour beaucoup morte dans les camps pendant la guerre. Il sait qu'il veut faire un métier rigolo, mais dans les années 40/50, la BD n'est pas encore ce qu'elle est devenue, ce n'est pas un métier en vue. Sans jamais se départir d'une bonne humeur et d'humour, le jeune René dessine d'abord et propose ses dessins à divers journaux. La suite, je vous laisse la découvrir dans ce bel album biographique. Catel reproduit dedans des dessins de Goscinny, des caricatures, ses premières BD avec Dick Dick's un détective maladroit...

Pari réussi, haut la main pour la première biographie dessinée de ce grand scénariste de BD décédé en 1977, une sorte de mise en abîme, signée Catel avec la complicité de Anne Goscinny, qui préface et raconte.

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Journal inquiet d'Istanbul

Publié le par Yv

Journal inquiet d'Istanbul, volume 1, Ersin Karabulut, Dargaud, 2022 (traduit par Didier Pasamonik)

Ersin Karabulut naît à Istanbul au début des années 80, de parents instituteurs, ce qui ne garantit pas l'aisance financière. Son père réalise de petites peintures pour boucler les fins de mois. C'est peut-être de le voir dessiner qui donne l'envie à Ersin de devenir dessinateur.

Mais en Turquie, il n'est pas bien vu de faire du dessin surtout si celui-ci égratigne le pouvoir. Le père d'Ersin lui conseille de faire des études d'ingénieur et de laisser tomber le dessin. Ersin obéit quelque temps, puis n'en peut plus et se dirige vers le dessin et la bande dessinée.

C'est un album biographique qui décrit les envies, les doutes, les peurs de l'auteur et celles de ses proches, le pays qui change, qui, après avoir été une démocratie tend de plus en plus vers un pouvoir autoritaire et religieux. Lorsque Recep Erdogan est caricaturé en animal sur des couvertures de journaux satiriques, il les attaque et même s'il perd ses premiers procès, la censure est quand même proche.

Ersin Karabulut dessine ses jeunes années, avec tout ce que cela suppose de faits pas glorieux, de situations adolescentes pas flatteuses. C'est drôle, parce qu'il n'hésite pas à se moquer de lui-même et que le dessin parfois un peu naïf renforce l'humour. Mais paradoxalement, le même dessin renforce également la tension lorsque la situation devient plus tragique.

Bref, Ersin Karabulut est un auteur de BD à suivre, je l'ai déjà lu grâce à Contes ordinaires d'une société résignée, un recueil de nouvelles futuristes et Jusqu'ici tout allait bien..., une critique virulente du capitalisme et du repli sur soi. Et ce Journal inquiet d'Istanbul est un premier tome, qui devrait donc, logiquement voir des suites.

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La guerre invisible. L'institut

Publié le par Yv

La guerre invisible. L'institut, Franck Giroud, Laurent Galandon, Olivier Martin, Rue de Sèvres, 2022

Manfred Fürbringer, ingénieur allemand, qui fut, au sortir de la guerre, un atout pour les Russes et les Américains qui se le sont disputés, est désormais intéressant pour Israël qui le kidnappe pour qu'il puisse entrer en contact avec d'anciens dignitaires nazis. Ensuite, ceux-ci seront exfiltrés d'Argentine et jugés en Israël.

Troisième et ultime tome de cette trilogie au scénario signé Franck Giroud et Laurent Galandon tandis que Olivier Martin dessine. Après L'agence et Le comité.

Et le panier de crabes des espions de tous les pays s'étend au Mossad particulièrement efficace quelques années après la guerre. Et dans ce tome, encore, il y a des retournements de situations, des imprévus, des couacs, des dommages collatéraux : on ne fait pas d'espionnage avec des bons sentiments, surtout lorsqu'il s'agit de traquer d'anciens nazis. Très rapide, vif, ce tome clôt une trilogie particulièrement intéressante et bien menée.

Dans tous les opus de la série, il y a des femmes fortes, qui souvent mènent les actions ou en sont des rouages essentiels, histoire de ne pas laisser la place uniquement aux hommes. Elles ne sont ni mieux ni pires que leurs collègues masculins, elles font leur job, même si certains aspects les rebutent particulièrement.

Bref, une trilogie d'espionnage bien faite, bien construite, digne des romans ou films du genre, qui réserve pas mal de surprises.

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