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L'affaire Birdie Barclay

Publié le par Yv

L'affaire Birdie Barclay. Une enquête d'Arrowwod, Mick Finlay, Harper Collins, 2019 (traduit par Patrick Imbert).....

1896, Londres, les parents de Birdie Barcklay sont inquiets car ils n'ont pas vu leur fille, Birdie, depuis plusieurs mois. Icelle, déficiente mentale, mariée à Walter Ockwell, fermier dans le village de Catford semble empêchée de les voir. Ils font appel au détective privé William Arrowood et à son assistant Norman Barnett qui vont se heurter au mutisme et à l'hostilité du village entier de Catford et découvrir une machination de grande ampleur.

Retour du duo d'enquêteurs encore une fois bien aidé par Ettie la sœur de William et Needy, le jeune garçon qu'ils emploient régulièrement, après leur première aventure sobrement intitulée Arrowood. Arrowood est toujours obsédé et jaloux des succès et de la reconnaissance dont jouit le célèbre détective de l'époque, Sherlock Holmes et se démarque de lui par son approche de son travail : "Holmes travaille sur des indices physiques, il se sert de sa fameuse logique, mais j'ai constaté de mon côté que beaucoup d'affaires ne présentent pas d'indices. Il faut alors étudier les gens. Et les gens ne sont pas logiques, précisément. Leurs émotions ne sont pas logiques. Pour élucider ces affaires, il faut connaître ces personnes. Il faut comprendre leurs douleurs, leur confusion, leur besoin de reconnaissance. Il faut tenter de voir le monde à leur manière. Je n'ai rien contre Holmes, révérend, mais il considère que les émotions biaisent le raisonnement. Je travaille différemment. Je suis un détective émotionnel. Je résous mes affaires en comprenant les gens." (p. 59)

J'aime beaucoup cette série dont ce deuxième opus est vraiment très bien. Les personnages, les lieux, l'époque bien qu'en perpétuelle évolution sont bien installés. L'un des autres attraits est de nous plonger dans le Londres poisseux et pauvre, à la rencontre des travailleurs, des misérables qui peinent à vivre et à élever leurs enfants. Mick Finlay, cette fois-ci y ajoute le traitement réservé aux "idiots" et "imbéciles" tels qu'ils étaient nommées à l'époque, voire "idiots mongoliens" ou "mongoliens", puisque le syndrome de Down (trisomie 21) venait d'être identifié par le Dr John Langdon Down. Evidemment et heureusement, ces termes ne sont plus utilisés de nos jours. On sent que l'auteur s'est documenté, et il nous présente tout cela de manière extrêmement plaisante et instructive.

Si j'ajoute à cela le fait que les personnages sont vraiment bien campés et leurs relations particulièrement bien décrites, que les seconds et troisièmes rôles sont très présents et renforcent la solidité du récit, de l'ambiance et que la ville sombre et froide, que les écarts entre les pauvres et les très riches qui profitent du système et que l'intrigue monte en tension et se tient très largement jusqu'au bout, vous aurez alors un roman policier excellent, une série très prometteuse que je vous conseille fortement. En plus, Harper Collins a la bonne idée de l'éditer en poche, donc aucune excuse pour la rater.

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Arrowood

Publié le par Yv

Arrowood, Mick Finlay, Harper Collins, 2018 (traduit par Marta de Tena)....

Caroline Cousture, jeune femme française qui travaille pour un photographe de Londres en cette année 1895 fait appel au détective privé William Arrowood et à son assistant Norman Barnett pour retrouver son frère Thierry, cuisinier dans un restaurant détenu par l'un des hommes les plus puissants et cruels de Londres, M. Cream. Arrowood, contrairement à Sherlock Holmes qu'il déteste et jalouse ne se fie pas qu'aux faits, il s'intéresse à la psychologie, aux personnes et à leurs sentiments et émotions. Contrairement à Holmes qui fraie avec les grands de ce monde, Arrowood vit pauvrement et travaille dans les bas-fonds de la ville.

Vous connaissez Sherlock Holmes et ses enquêtes résolues en des temps record avec des indices qui nous paraissent anodins et qui lui permettent de résoudre les énigmes. Découvrez Arrowood, plus besogneux, féru des nouvelles sciences du comportement, des livres de Darwin et d'autres scientifiques de son époque. Arpentez avec lui et Barnett, les rues des quartiers de Londres, mal famés, pauvres voire miséreux où les hommes travaillent pour de chiches salaires qu'ils boivent en délaissant leurs femmes et leurs nombreux enfants lorsque ceux-ci ont survécu à la forte mortalité infantile, où les femmes triment et n'y arrivent pas, où les enfants mendient, sont laissés à eux-mêmes. Arrowood et Barnett ne sont pas connus et les policiers les méprisent, ce qui ne facilite pas leur tâche. Puis, M. Cream, auquel ils ont déjà eu affaire n'est pas un tendre et est même très dangereux.

A l'instar de Watson pour Holmes, c'est Barnett qui raconte les aventures de leur duo, trio si l'on ajoute Needy, le jeune garçon qui les aide de temps en temps voire quatuor en ajoutant Ettie, la sœur d'Arrowood. C'est une très bonne surprise que ce premier tome de la série qui plante le décor sans négliger l'enquête ni l'action. J'ai beaucoup aimé la description du Londres de la fin du 19° siècle, et celle des principaux personnages, leurs traits de caractère, leurs rapports. 

Polar de poche sorti en 2018 et la deuxième enquête, sortie cette année est actuellement entre mes mains et tout aussi passionnante.

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Des opéras de lumière

Publié le par Yv

Des opéras de lumière, Jean-Noël Blanc, Le réalgar, 2019 (première édition, 2016).....

François-Auguste Ravier (1814-1895) est destiné au notariat par son père qui l'envoie faire des études de droit. Mais François-Auguste ne rêve que de dessiner et peindre. Toute sa vie sera consacrée à chercher la bonne lumière, à tenter de peindre ce qu'il a dans la tête, exigeant et insatisfait.

Félix Thiollier (1842-1914) est un industriel stéphanois, fils d’industriel qui se passionne très tôt pour la photo et les arts en général. Il rencontre beaucoup d'artistes, de peintres dont Ravier. Ils deviennent amis.

Personnellement, je ne connaissais aucun des deux personnages, j'ai beaucoup appris. Jean-Noël Blanc a choisi le roman pour parler de leur amitié, se donnant donc quelques libertés avec la vérité, peut-être assez peu d'après ce qu'il écrit en post-face. François-Auguste Ravier fut un peintre en perpétuelle recherche d'absolu, de représenter sur la toile ce qu'il avait en tête. En attendant son "grand ouvrage", il produit des "casseroles" : "... jusqu'ici je n'ai fait qu'accumuler des notes et des documents, et le grand ouvrage, mon Dieu, le grand ouvrage, je crains que la mort ne soit là bien avant." (p.159). Pour atteindre cet objectif, il refusa de montrer ses œuvres dans des expositions, des salons, ne voulant montrer que le meilleur. Bien que, devenu une référence, voire même un précurseur aux yeux de beaucoup de ses contemporains, une sorte de Turner avant Turner, un peintre qui peignait la lumière comme personne, jamais il ne dérogea de sa règle au risque avéré de ne jamais être reconnu et connu. Un peu misanthrope et peu sociable, la vie à l'écart qu'il avait choisie lui alla parfaitement. 

Au contraire, Félix Thiollier toucha à tout, fut un hyperactif qui voulut bouger sa ville de Saint Etienne peu ouverte aux arts et à la culture. Il photographia, peignit, produisit du ruban dans son usine, édita des monographies, acheta et tenta de faire connaître des peintres comme Ravier et bien d'autres. 

Ce sont ces deux hommes opposés qui deviendront amis, des hommes sans détours, francs et honnêtes. Jean-Noël Blanc les décrit, parle de la peinture et de la création artistique, de la recherche permanente de l'œuvre parfaite qui a obsédé Ravier sa vie durant, en des termes magnifiques. L'écriture emporte le lecteur et ne le lâche jamais, c'est une vraie merveille. Une langue d'une élégance rare qui varie la longueur des phrases, qui use de termes parfois rares. Voilà par exemple sa description du Paris que François-Auguste peine à peindre : "Le ciel, surtout, le déçoit : ce n'est pas un ciel sérieux, il s'effarouche pour un rien et s'afflige au moindre prétexte. Un courant d'air descendu des canaux du Nord, un souffle venu de l'Ouest et de la mer, une bourrasque bénigne, une bise, une chiquenaude de l’atmosphère, et ça y est les nuages rappliquent, le ciel prend la mouche, tout vire à la grisaille, s'assombrit, s'attriste, s'éteint. Pas de colère, pas d'orage, pas de nuées vindicatives, pas de vastes bousculades de cumulus, ou alors si rarement. Ce sont plutôt des susceptibilités de pluie mince, des chagrins citadins, des mélancolies patinent les rues d'une ombre d'alcôve, dans un chien et loup de plein mitan du jour." (p. 35)

Roman qui parle d'art, de peinture, de photographie, d'équilibre d'une œuvre, de sa création, des échecs, de la recherche de la perfection. Un coup de coeur que Le Réalgar a la bonne idée de rééditer. Pour les amoureux de la peinture, de la littérature, pour tous ceux qui ont envie de s'instruire dans la beauté et l'élégance et de sortir des sentiers battus.

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La nuit du tricheur

Publié le par Yv

La nuit du tricheur, Hugo Buan, Pascal Galodé, 2010 (Palémon, 2015).....

Cinq toiles de Georges de la Tour vont être exposées dans l'ancien couvent des Jacobins de Rennes. Exposition exceptionnelle qui demande des moyens exceptionnels. C'est donc le commissaire Lucien Workan qui est chargé de contrôler la sécurité des lieux et des toiles. 

Mais Fletch Nowski, redoutable amateur d'art et surtout cambrioleur est à Rennes en ce moment, bien décidé à faire main basse sur les cinq tableaux et à se venger de son lointain cousin, Lucien Workan.

Et maintenant, pour ce troisième tome, voici le commissaire Workan confronté à une partie de sa famille. Cela permet à Hugo Buan de nous montrer une partie de l'arbre généalogique de son héros, et donc de le connaître un peu mieux.

Ce n'est pas le tome le plus drôle de la série, même si les dialogues sont toujours aussi savoureux, cette fois-ci surtout entre Workan et la procureure et entre Workan et son adjoint, le capitaine Lerouyer. Hugo Buan montre une autre facette de Workan, plus intime, moins grand con rustique. On n'est pas non plus dans un polar à contexte qui nous apprendrait plein de trucs sur un fait historique, un lieu, etc. C'est un polar à confrontation familiale, à intrigue et questionnement, car, le couvent des Jacobins étant une véritable forteresse, on se demande bien comment Fletch Workan et son équipe -et là, permettez-moi de faire une longue parenthèse, car le recrutement de bras cassés, de collègues atypiques (c'est pour être gentil), de branquignols, doit être génétique lorsqu'on étudie l'entourage des deux cousins-, je disais donc qu'on se demande si et comment Fletch va réussir son coup, cinq toiles ce n'est pas rien !

Encore une fois fort bien fait, un troisième tome qui change des autres, et c'est tant mieux, rien de plus terrible que de lire toujours la même chose. Une série qui ne promet plus, elle comble. 

Néanmoins, pour cause de rupture de stock (j'ai acheté les deux premiers tomes et ai emprunté ce troisième à la bibliothèque), je vais être obligé de faire une pause dans ma remontada de la série. 

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Cézembre noire

Publié le par Yv

Cézembre noire, Hugo Buan, Pascal Galodé, 2010 (Palémon, 2016).....

Lucien Workan, commissaire à la DIPJ de Rennes est mandé sur l'île de Cézembre, au large de Saint-Malo, en ce 8 novembre pour surveiller les activités de deux scientifiques étasuniens qui travaillent pour la CIA. Leila Mahir, la lieutenante préférée du commissaire -mais ça doit rester secret- l'accompagne, ainsi que le capitaine Lerouyer -normal, c'est son bateau qui fait le voyage- et le lieutenant Roberto. Equipe au complet à laquelle est adjointe la lieutenante Cindy Vitarelli. Tout ce monde logera au Barge'hôtel avec la famille Monsiret en séminaire d'entreprise, les trois propriétaires de l'hôtel, Léon et Noël Darec (grand-père et petit fils palindromes) et Marie-Line, fille et mère. Sans oublier Berty, tueur à -petits- gages et son taxi-bateau Hale-Ta-Patte. Et voilà l'île étrangement animée pour ce mois de novembre et isolée par une forte tempête.

Deuxième enquête de Workan et son équipe qui cette fois-ci se retrouvent dans un huis-clos qui ne l'est pas d'ailleurs puisque tout est ouvert sur cette île de laquelle, vu le temps, il est difficile de s'enfuir. Île qui fut véritablement pilonnée en 1944, car aux mains des Allemands qui refusaient de se rendre, contrairement à ceux d'en face à Saint-Malo ; rarement un endroit reçut autant de bombes et d'engins explosifs et même des bombes au napalm et au phosphore pour déloger les occupants. D'ailleurs, toujours pas entièrement déminée, elle n'est que très partiellement ouverte au public. C'est donc le lieu idéal pour placer une intrigue policière. Et quand c'est Hugo Buan qui s'en charge, nul doute que ça va dépoter et que ça va faire rire. Les dialogues avec Workan sont toujours aussi drôles, surtout lorsqu'il s'adresse à Leila qui ne peut s'empêcher de le titiller, parfois, il est difficile de se retenir de rire tout haut. Mais les dialogues ne sont pas les seuls à donner ans le comique, le décalé : "Enfin la veine jugulaire fut tranchée. Le sang bouillonnant jaillit par saccades. La scène, interminable, dura treize secondes." (p.117) Bon, je conçois que de prime abord, ce n'est pas drôle, c'est la juxtaposition de "interminable" et "treize secondes" qui me fait sourire, mais sans doute ces mêmes phrase dans un thriller glauque n'auraient pas le même effet.

Retour à Cézembre, où les flics bossent, le tueur à gages hésite, parce que quand même tuer alors que cinq flics sont aux alentours, ce n'est pas aisé, les scientifiques étudient discrètement, et Noël Darec, surdoué étale ses connaissances à un Workan subjugué. L'enquête part dans tous les sens, les flics ne peuvent compter que sur eux, exit l'ADN, les relevés téléphoniques, et toutes les techniques modernes. Retour à l'ancienne, papier stylo et investigations. 

On ne lit pas les aventures de Workan uniquement parce qu'elles sont drôles, on les lit également parce que Hugo Buan nous apprend plein de trucs sur les lieux dans lesquels elles se déroulent, donc ici, Cézembre -que personnellement je ne connaissais pas du tout- et parce que l'intrigue se tient et nous tient. Encore une fois le mélange est très réussi.

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Mort aux vaches/Geronimo/Montana 1948

Publié le par Yv

Mort aux vaches, François Ravard, Adrien Ducoudray, Futuropolis, 2016....

Après un braquage réussi, quatre malfaiteurs, trois hommes et une femme vont se mettre au vert à la campagne chez le cousin de l'un d'entre eux. Un mois pour se faire oublier et pouvoir partir chacun de son côté. Mais en ce milieu des années 1990, l'épidémie de la vache folle traîne et les pandores aussi, ce qui ne fait pas le bonheur des quatre brefs néo-ruraux.

Très bonne bande dessinée avec des tronches, des truands et les autres qui ont vécu et ça se voit. Le dessin en gris est excellent et le scénario n'est pas en reste. On se balade dans cette campagne se demandant ce qu'il va arriver aux uns et aux autres et comment ils vont s'en sortir ou se faire gauler. 

Très bel album qui multiplie les rebondissements et surprises. 

Geronimo, Matz, Jef, Rue de Sèvres, 2017...,

Geronimo, qui ne s'appelait pas encore comme cela est né en 1829 dans la tribu apache au Nouveau-Mexique. Quelques années plus tard, les Mexicains massacrent son village, sa femme et ses trois enfants. Geronimo n'aura alors de cesse de se venger et de tenter de reconquérir les terres des tribus indiennes que les Mexicains d'abord puis, les Américains leur volent. Il s'allie à d'autres, Cochise, Mangas Coloradas pour la lutte.

C'est l'histoire de ce chef apache légendaire que raconte Matz et dessine Jef et plus globalement l’histoire de la colonisation puis de l'élimination des Indiens d'Amérique. Dans certains vieux westerns, le message véhiculé est celui des méchants Indiens contre les bons blancs venus s'installer dans le nouveau monde. Il est bon de connaître les vraies raisons de la violence de Geronimo et autres chefs indiens qui, simplement, luttaient pour leur survie.

L'album joue avec les tailles de cases, les couleurs et si j'ai eu un peu de mal au début avec le dessin, je m'y suis habitué. Une belle manière de revoir l'histoire du grand guerrier Geronimo.

Montana 1948, Larry Watson, Nicolas Pitz, Sarbacane, 2017 (roman traduit par Bertrand Péguillan, Gallmeister, 1996)....

David est un jeune garçon qui vit dans le Montana. Son père y est shérif. C'est un coin paisible qui ne nécessite que peu d'interventions. L'oncle de David, le frère de son père, héros de la guerre, médecin est soupçonné d'abuser de ses patientes indiennes. Le shérif, qui n'a pas l'aura de son frère, réformé suite à un accident qui l'oblige à user d'une canne, doit intervenir. Il tergiverse.

Je ne connais pas le roman de Larry Watson, ce que je peux dire c'est que cette bande dessinée est très bien. L'histoire paisible au départ s'active et les tensions montent ainsi que les haines et peurs entre blancs et Indiens. David est au milieu de tout cela, qui entend et voit et ne peut agir. il voit son père hésiter entre la justice et l'amour pour son frère et la volonté de ne pas se mettre sa famille et toute la ville à dos.

Le dessin  a des côtés naïfs qui me plaisent beaucoup, une douceur même pour raconter des faits terribles. C'est un bel album, une BD à découvrir, et peut-être même le roman.

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Hortensias blues

Publié le par Yv

Hortensias blues, Hugo Buan, Pascal Galodé, 2008.....

Un immeuble de plusieurs étages à Rennes est occupé par des praticiens médicaux et para-médicaux. L'un d'eux, dentiste et activement dragueur et beaucoup plus si affinités, est retrouvé mort, attaqué par l'un de ses clubs de golf -introuvable depuis-, et avec une particularité florale : une branche d'hortensia bleu fleuri planté dans le fondement. 

C'est le commissaire Workan, petit-fils de résistant, fils cousin, neveu et probablement d'autres liens familiaux de gens très bien placés, totalement incontrôlable, bagarreur, l'opposé total du politiquement correct, qui mène l'enquête. Assisté d'un capitaine et de lieutenants particuliers -pour être gentil- dont la superbe Leila Mahir, il va bousculer la bourgeoisie rennaise.

Alléché par mes lectures des tomes neuf (Requiem pour l'Ankou) et dix (Plus puissants que les dieux) des aventures de Lucien Workan, me voici remonté aux origines de ce flic atypique. Paru initialement chez Pascal Galodé éditeurs, toutes les enquêtes sont rééditées chez Palémon. 

Pour faire bref, je pourrais dire que tout ce qui fait le succès et le plaisir des cette série est déjà dans ce premier opus : humour, décalage, quiproquos et dialogues basés sur l'incompréhension des interlocuteurs, absurde, personnages bien barrés, enquête et suspense savamment entretenus et tenus jusqu'au bout avec des rebondissements, des retournements de situation, des supputations sur la culpabilité de tel ou tel intervenant, un peu d'amour. Le plus, c'est qu'on apprend plein de trucs sur Workan et que son équipe de bras cassés se met en place doucement mais sûrement. Et Hugo Buan de s'en donner à coeur joie, de nous régaler de ses bons mots et trouvailles linguistiques, comme par exemple pour parler d'un spécialiste potentiel future victime et proctologue de son état : "Le praticien diplômé de spéléologie troudeballesque". C'est drôle et pas lourd, parce qu'il sait jusqu'où aller et ne franchit pas la ligne du vulgaire. 

Du coup, j'ai acheté le tome 2 et je vais m'y plonger tout de suite tant je me régale. Attention néanmoins, il existe un risque à lire les enquêtes de Workan, celui d'avoir des éclats de rire sonores et intempestifs qui risquent d'étonner vos voisins.

Polar qui débute ainsi : 

"Lucien Workan, un morceau de pizza au bout de sa fourchette, parcourait nonchalamment son quotidien préféré ; la sonnerie de son téléphone portable retentit, il regarda sa montre, 22h30 : "Merde ! On ne peut jamais avoir la paix !" (p.7)

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Pierre Soulages. Présences d'outrenoir

Publié le par Yv

Pierre Soulages. Présences d'outrenoir, Bruno Duborgel, Le Réalgar, 2019.....

Peinture, 56 cm x 39 cm, 08/07/2013 (collection particulière). C'est la couverture du livre et c'est aussi son sujet : le tableau qui inspire toutes les lignes à Bruno Duborgel.

Rien de tel, avant de marquer une pause estivale, que de parler de poésie, si en plus cette poésie est inspirée par l'oeuvre de Pierres Soulages, c'est encore mieux. J'ai visité le musée Soulages de Rodez il y a quelques années et j'ai été conquis, je n'en reviens toujours pas qu'on puisse faire autant de lumière avec du noir. Bruno Duborgel l'écrit formidablement. Il parle aussi de la manière de regarder ces toiles et je me suis revu tournant autour des tableaux : "Le regard du spectateur, si mobilisé soit-il, prioritairement, par la contemplation frontale des états de surface du tableau, aime aussi, cependant s'attarder parfois à l'examen des côtés, à gauche et à droite, de la peinture ; il suit alors la tranche des sillons et des arêtes, la ligne de crête de leur découpe, la coupe en quelque sorte de leurs courbes de niveaux, l'épaisseur crantée et crénelée de cet admirable et matériel relief pictural" (p.27)

Les textes sont courts, beaux, poétiques, d'une admiration non feinte pour le peintre et la magie de ses tableaux et plus particulièrement celui de la couverture du livre. Très travaillés, parfois avec références culturelles, picturales, littéraires.

"Une telle peinture, loin de réduire ses effets au choc premier qu'elle déclenche en nous, donne avenir, prolongements, retentissements imprévus à ce choc ; elle nous engage dans la longue durée d'un cheminement interrogatif, d'une délectation et d'une méditation toujours relancées." (p.23)

Un beau et court livre qui permet de se revoir au musée ou d'entrer dans l'outrenoir de Pierre Soulages. Ah, si j'avais un petit, voire tout petit tableau, pour moi aussi me délecter et méditer. Je sais déjà où l'accrocher. Je peux rêver ...

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Tombé dans l'oreille d'un sourd

Publié le par Yv

Tombé dans l'oreille d'un sourd, Grégory Mahieux, Audrey Levitre, Steinkis, 2017.....

Grégory et Nadège viennent d'avoir des jumeaux, Charles et Tristan. Dès sa naissance, Charles contracte une infection qui le rendra intolérant à beaucoup d'aliments. Tristan semble aller bien, puis il est diagnostiqué sourd profond. S'engage alors un véritable parcours du combattant pour les deux parents qui veulent absolument que leurs enfants ne soient pas rejetés mais au contraire totalement intégrés dans toutes les activités de leur quotidien.

C'est l'histoire de Grégory Mahieux qui est racontée là. Encore une fois, la bande dessinée est un fameux vecteur, accessible, direct pour parler cette fois-ci du handicap et des difficultés auxquelles sont confrontés les parents d'enfants différents. Et pourtant, il suffirait parfois d'un tout petit rien : un patron (ici un proviseur de lycée) conciliant, des collègues à l'écoute, des dossiers moins contraignants, une meilleure prise en charge des frais inhérents aux difficultés des enfants, ... Il en faut de l'énergie pour les parents de Tristan pour surmonter les obstacles et au petit garçon beaucoup d'optimisme et de joie de vivre pour ne pas sombrer.

Du noir et blanc, un dessin classique presque enfantin parfois dans les traits, ronds, un format roman graphique tout cela concourt à la prise en main et à la facilité de lecture. 

Ouvrage qui, malgré le thème, reste positif et bien que relatant les nombreux pièges, bâtons dans les roues et autres intervenants réfractaires à l'intégration des personnes porteuses de handicap, il ne tombe jamais dans un discours plombant. Quand on a eu l'occasion de monter des dossiers pour des enfants à difficultés, de se déplacer souvent pour rencontrer les bonnes -et parfois mauvaises- personnes, on sait que les démarches sont longues et ardues, qu'elles agissent sur le moral et le bien-être de tous. Lorsque le résultat se voit quelques mois ou années après, on se dit que ça valait le coup de s'accrocher, s'énerver, menacer, tout en protégeant les enfants... tout ce qu'ont fait Grégory et Nadège.

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