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Le corps le sang la rage

Publié le par Yv

Le corps le sang la rage, Elsa Vallot, Hors d'atteinte, 2021

"D'un côté, la violence de la police et des lois. De l'autre, la force de la boxe. Avec l'humilité et le courage de ceux qu'on a chercher à meurtrir, un corps se déploie peu à peu envers et contre le monde qui le contraint." (4ème de couverture)

Je cite sciemment la quatrième de couverture à la place de mon résumé habituel, d'une part parce qu'elle n'en dit point trop et d'autre part parce qu'à la fois précise et un rien énigmatique, je la trouve idéale pour donner l'envie d'ouvrir ce roman, premier d'une jeune auteure passionnée de rap, de boxe thaïlandaise, par l'histoire des luttes populaires et l'antiracisme. Tout cela se retrouve dans son texte intrigant, dur, très moderne. Écrit à la deuxième personne du singulier, il s'adresse à cette jeune personne qui se fait agresser par des policiers et qui va s'investir encore davantage dans la boxe.

Je n'aime pas tout, certains passages m'ont paru longs, mais d'autres sont particulièrement bien vus, précis. La langue est directe, moderne, émaillée de citations de rappeurs, dont une -entre autres- que j'aime beaucoup de Despo Rutti : "J'affectionne moins les drapeaux que les gens, l'homme peut suivre son cœur, les drapeaux eux suivent le vent." (p.127). Chaque court chapitre se clôt par des phrases en gris clair, comme si elles étaient tirées d'autres ouvrages, qui éclairent ou illustrent ce qu'on vient de lire : "Reconnaître le racisme à l'hostilité, c'est déjà trop tard..." (p.85). J'aime bien ce mélange entre les citations en plein milieu d'un texte qui prend des libertés avec des règles syntaxiques comme par exemple ne pas mettre de déterminant devant un nom, ce qui le personnifie, lui donne une place différente, et ces phrases de fins de chapitre. Une écriture sincère et singulière.

Elsa Vallot écrit un texte fort et violent parfois que d'aucuns n'aimeront pas, mais peuvent-ils sans cesse nier les violences de certains policiers : "Si, pour ces policiers, tu te trouves en dehors de la loi et que pour eux, les lois censées protéger les personnes ne te concernent pas, tu ne ressens aucune culpabilité quand c'est envie de casser du flic qui guide tes coups sur le sac. Pour eux, c'est le choix de tes vêtements, de ta coupe de cheveux, de la musique que tu écoutes et des mecs avec qui tu traînes qui justifie que tu saignes. C'est avec un peu de ton sang qu'on écrit dans un registre qu'un coin de rue est criminogène. Ton corps entier est marqué par les droits qu'ils ont sur toi mais tu ne ressens plus aucune peur, car ce n'est pas vengeance que tu recherches, ni même justice, encore moins leur justice." (p.132/133) ?

J'espère que ce court roman aura l'écho qu'il mérite dans cette rentrée littéraire, il sort du lot de ce qu'on peut lire ici ou là. Il n'est pas exempt de réserves, mais pousse à la réflexion sur la société que l'on veut, sur la tolérance, l'envie de découvrir l'autre dans sa différence et me rend encore plus nauséabonds les propos et thèses de ceux et celles qui prônent la haine et le racisme.

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Que sur toi se lamente le tigre

Publié le par Yv

Que sur toi se lamente le tigre, Emilienne Malfatto, Elyzad, 2020

"Dans l'Irak rural d'aujourd'hui, sur les rives du Tigre, une jeune fille franchit l'interdit absolu : hors mariage, une relation amoureuse comme un élan de vie. Le garçon meurt sous les bombes, la jeune fille est enceinte : son destin est scellé. Alors que la mécanique s'ébranle, les membres de la famille se déploient en une ronde d'ombres muettes sous le regard tutélaire de Gilgamesh, héros mésopotamien, porteur de la mémoire du pays et des hommes." (4ème de couverture)

Très court, très beau et très dur texte, très justement récompensé par le prix Goncourt du premier roman et par le Prix Hors concours des lycéens. Pourquoi faire un essai ou un roman de 400 pages puisqu'en moins de cent, Emilienne Malfatto parvient à raconter la société irakienne : chaque membre de la famille représente une opinion, un groupe de la société toute entière ? Chacun s'exprime à son tour dans le livre sur la grossesse hors mariage de la jeune femme, leur sœur, fille ou belle-sœur. Les mots sont simples et forts pour raconter l'enfermement des femmes, l'autorité masculine : "Le médecin s'est remis à parler, il s'est courbé vers moi. Je crois qu'il a essayé de comprendre. Ses yeux étaient désolés. Il a utilisé des mots inconnus, déni, et celui-là encore, psychosomatique. L'infirmière m'avait pris la main. J'ai pensé à ma mère, qui préviendrait elle-même Amir si elle en avait l'occasion. L'honneur est plus important que la vie. Chez nous, mieux vaut une fille morte qu'une fille mère. Le médecin m'a demandé ce que je comptais faire, si j'avais de la famille ailleurs, quelque part, loin. J'ai voulu lui dire que tous étaient morts, et que ceux qui n'étaient pas morts me tueraient. Les mots sont restés bloqués dans mon ventre." (p.21)

Le poids de l'autorité masculine est tel que ni les femmes, ni les hommes qui aimeraient plus de liberté pour elles et pour eux ne s'expriment. Ils laissent faire, par crainte des représailles qui ne manqueraient pas d'advenir, la puissance est du côté des combattants, des traditionalistes qui écrasent tout désir de changement qui ne reste donc que velléité contrainte.

Le récit d'Emilienne Malfatto est fort en cela qu'en si peu de pages, il expose tous les points de vue. Cette tragédie dont on connaît la fin dès le début est intense et se lit d'une traite. Il est d'une beauté et d'une force rares.

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L'or de la momie

Publié le par Yv

L'or de la momie, Valérie Lys, Palémon, 2021

Alors qu'ils sont en visite au Louvre, avant d'aller assister à l'anniversaire du commissaire Delcourt dans son ancien commissariat parisien, et de s'en retourner à Rennes, le commissaire Adrien Velcro et sa collaboratrice Déborah sont les témoins d'une coupure de courant massive dans la salle Égypte et d'un vol audacieux du contenu d'une momie exposée.

Puis, c'est le gardien d'un laboratoire de recherches qui est retrouvé mort et une vieille dame qui appelle sans cesse le commissariat pour ce qu'elle pense être un bébé en danger. Tous ces événements dans le court laps de temps où Velcro et Déborah sont à Paris, ils vont prêter main forte à leurs collègues.

Un peu longue parfois, cette aventure de Velcro et Déborah a néanmoins beaucoup de mérites. D'abord celui d'une intrigue bien ficelée, originale et documentée. Ensuite deux personnages bien fouillés -surtout Velcro qui se questionne beaucoup pour son attirance pour sa collègue alors qu'il est marié et heureux. Et enfin des seconds rôles bien campés et des visites des sous-sols et de quelques salles du Louvre. Et le petit plus, ce sont ces histoires qui, a priori n'ont rien en commun et qui, bien sûr, se rejoignent de manière assez inattendue et fine. Je ne me suis jamais douté de quoi que ce soit dans cette enquête, et même si Velcro et Déborah doivent compter sur un peu de chance et des auxiliaires surprenants, ils savent poser la pièce finale, celle qui finit le puzzle.

Très fréquentable, une série avec des héros sympathiques, documentée et qui en prime, est élégamment écrite, avec des tournures un peu désuètes -en fait du passé simple peu usité de nos jours et des réparties entre Velcro et Déborah qui se voussoient pleines d'humour et de respect- qui rajoutent un charme supplémentaire indéniable.

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Le pont du diable

Publié le par Yv

Le pont du diable, Pierre Pouchairet, Palémon, 2021

Après un parcours particulièrement épuisant, et presque arrivés au but, trente-trois Afghans qui fuyaient leur pays sont retrouvés morts, dans un camion frigorifique en Nord-Finistère, au pays des Abers. Seul un jeune garçon a survécu, qui est parvenu à s'échapper.

C'est la commandant Léanne Vallauri cheffe de la PJ de Brest qui est chargée de l'enquête. Avec ses deux amies d'enfance, Élodie médecin-légiste et Vanessa psychologue pour la police, elles forment un trio efficace et respecté. Léanne saura également s'appuyer sur son équipe de flics et sur les gendarmes co-saisis dans cette enquête qui ne sera pas de tout repos.

Toujours excellente cette série avec les trois Brestoises. Pierre Pouchairet, tout en gardant les mêmes personnages, les mêmes lieux -la Bretagne-, sait se renouveler et ne pas écrire toujours la même histoire. Donc, à chaque fois que j'ouvre un de ses livres, je sais que je serai happé et ravi. Plus de 400 pages qui passent à toute vitesse et qui, cette fois-ci, parlent des filières de passeurs et des femmes, des enfants et des hommes qui fuient leurs pays pour davantage de paix et de liberté. Ses réfugiés sont pour la plupart des Afghans, car le régime des talibans est en passe de se reformer avec toutes les interdictions, les restrictions et les violences inhérentes à un tel pouvoir. Pierre Pouchairet connaît le pays pour y avoir été en poste il y a quinze ans.

Dans ce roman, on sent tout le respect qu'il a pour les Afghans et son mépris des passeurs, de ceux qui vivent sur le dos des personnes ne sachant plus quoi faire d'autre que de fuir leur pays pour vivre. Dit comme cela, ça fait un peu la palissade du genre "la guerre c'est mal et la paix c'est bien", mais évidemment, l'auteur est plus subtil et son roman ne se contente pas de ce constat. Il construit une histoire pleine de rebondissements, de personnages ambigus, de fausses pistes, de travail acharné des flics pour tirer le moindre fil trouvé, du travail pas spectaculaire mais qui paye. Tout cela dans des paysages somptueux et sans oublier les vies personnelles des trois filles, cette fois-ci c'est Léanne qui a la vedette. Un roman -et une série- ancrée dans le monde actuel, Pierre Pouchairet ne se contente pas d'une intrigue policière, celle-ci est là pour décrire la société, pour ce qui ne va pas : l'hyper-violence, les réseaux promettant un bel avenir aux candidats à l'exil, les fortunes qui se construisent là-dessus, l'individualisme, l'enfermement sur soi et la peur de l'autre... mais il écrit également ce qui va bien, et l'espoir repose souvent sur des individus curieux et ouverts à l'altérité.

Un roman qui va vite et qui permet de ne pas oublier que chaque jour, aux portes de chez nous, des réfugiés qui ont vécu des trajets violents, mortels, difficilement supportables, arrivent, en Europe, sont refoulés ou mal accueillis. Et ce n'est pas ce qui se passe aujourd'hui en Afghanistan qui va en faire baisser le nombre. Et Pierre Pouchairet d'être malheureusement dans une actualité forte.

Septième tome d'une série que j'aime beaucoup, inévitable car addictive, passionnante et fort bien documentée, très réaliste ; et toujours la Bretagne omniprésente. Je la place dans mes coups de cœur, mais c'est un peu comme avec les romans de Mankell avec Wallander, c'est toute la série qui y est.

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Mort aux cons

Publié le par Yv

Mort aux cons, Carl Aderhold, Le livre de poche, 2009 (Hachette, 2007)

Un homme, un peu par hasard, découvre que supprimer les gens qui le gênent lui donne dans un premier temps une grande satisfaction, puis dans un second temps, l'envie de recommencer. Se faisant la main sur les animaux de son quartier, il passe assez vite aux humains tout en échafaudant une théorie sur les nuisibles, les cons. Une concierge bavarde, allez hop. Un voisin patibulaire qui promène ses chiens qui terrorisent tout le voisinage, un automobiliste qui colle de trop près, un mec qui sait tout sur tout et a un avis sur tout..., hop itou... etc etc

Mort aux cons, la tâche est ardue, digne des travaux d'Hercule et sans doute l'objectif est-il inatteignable. Je me dis que 400 pages ne seront pas de trop pour tenter de résoudre le problème. Les premières sont réjouissantes, le narrateur n'ayant pas encore défini le mot con, ne cherchant qu'à se débarrasser des importuns, des empêcheurs de penser et de vivre comme il l'entend. Puis, un déclic après avoir supprimé un petit chef de service : "Le con, m'écriai-je, voilà l'ennemi ! " (p.153). A noter que Carl Aderhold commencera tous les (petits) chapitres suivants, pendant un douzaine de pages, par un mot débutant par la syllabe "con", histoire de bien enfoncer le clou.

Et puis, plus j'avance, plus je me dis que l'homme est en train d'empiler des cadavres et l'auteur des banalités. Il se répète, ne fait pas avancer la cause de la chasse aux cons. Il est drôle par moments lorsque le narrateur, pur intellectuel qui n'aime ni la campagne, ni les enfants, ni les animaux, ni le travail -ce n'est pas moi qui le blâmerait sur ce dernier point-, écrit un scénario et se retrouve à parler philosophie sur un plateau de tournage de porno. Mais dans l'ensemble, je m'ennuie, ça tourne à vide et je me dis finalement que 400 pages c'est long, très long. Et de me dire que ce mec qui théorise la connerie d'autrui devrait aller faire un tour dans les télés et sur les réseaux dits sociaux -mais ça serait un véritable génocide- avant d'envisager un suicide, parce qu'il faut bien le dire, je le trouve un peu con...

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Le papier peint jaune

Publié le par Yv

Le papier peint jaune, Charlotte Perkins Gilman, Tendance négative, 2020 (traduit par Marine Boutroue et Florian Targa)

Une jeune femme en dépression post-partum est emmenée par son mari médecin, pendant trois mois, dans une maison isolée. Dans cette maison, il lui destine une chambre tout en haut, peu accueillante, barreaux aux fenêtres, plâtre qui tombe et papier peint d'un jaune douteux en partie arraché. C'est là qu'elle va passer ses journées et ses nuits et bientôt les motifs et la couleur du papier lui donnent des hallucinations, font apparaître d'étranges formes.

Écrit en 1892, ce court roman bénéficie d'une nouvelle traduction pour les éditions Tendance Négative. Je dois bien dire que ce qui m'a, de prime abord, attiré c'est l'écrin du texte. Un livre très beau que je n'ai pu qu'à peine feuilleter car il faut en couper les pages. Le texte est au début sur des pages blanches, puis de plus en plus sur des pages illustrées, un papier peint. La mise en page est elle-même très originale : parfois des pages pleines, d'autres très aérées parfois vides... C'est vraiment un bel objet et si vous allez sur le site de l'éditeur (Tendance Négative), vous pourrez voir que tous leurs ouvrages bénéficient d'un traitement particulier et original.

Le texte de Charlotte Perkins Gilman (1860-1935) flirte vers le fantastique tendance Edgar Allan Poe, et parle d'une femme séquestrée par un mari médecin qui ne comprend rien à son état de jeune maman et qui, comme beaucoup à l'époque, savait qu'il suffisait de beaucoup de repos, d'abandon de rêves d'écriture et de recentrage sur les tâches féminines -entendre tâches ménagères et de maman- pour que tout aille mieux. L'autrice a vécu la dépression post-partum et l'incompréhension et a suivi les conseils d'un médecin avant de tout balancer et d'aller mieux. Elle fut une militante et une écrivaine féministe. Ce beau livre et cette nouvelle traduction moderne et facile à lire -ce qui n'est pas toujours le cas des textes de l'époque- lui rendent hommage et la remettent en tête de gondole dans toutes les bonnes librairies.

Un petit extrait que j'aime bien pour finir (la mise en page en moins), une description sommaire du papier peint, la première fois que la jeune femme le voit :

"Il est assez fade pour égarer l’œil qui cherche à le suivre, assez marqué pour constamment irriter et susciter l'étude, et quand on suit les courbes médiocres, incertaines sur une courte distance elles se suicident soudainement s'engouffrent dans des angles révoltants, s'autodétruisent en des contradictions inouïes. La couleur est repoussante, presque révoltante un jaune asphyxié et sale étrangement décoloré par la lente course du soleil. C'est un orange à la fois cireux et criard en certains endroits une teinte corrosive et sulfureuse en d'autres." (p.28/29)

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La paresse

Publié le par Yv

La paresse, Joseph Kessel, Ed. du sonneur, 2013

Très court texte de Joseph Kessel qui, à travers ses expériences tout autour du monde, invoque la paresse qui, à ses yeux est l'une des plus grandes vertus si ce n'est la mère de toutes les vertus.

Ce texte est extrait d'un livre publié en 1929 aux éditions Kra qui s'intitule Les sept péchés capitaux.

Je n'aime pas beaucoup les livres de Joseph Kessel -on risque de me crier dessus-, mais après plusieurs tentatives, je dois me résoudre à cette négation. Oui mais, l'autre jour en cherchant des petits livres dans les rayons de ma librairie préférée, je tombe sur ce titre : La paresse. Inévitable, forcément. Après Paul Lafargue et Le droit à la paresse, je ne peux que me laisser tenter à la paresse de m'allonger ou m'asseoir pour déguster ce petit livre. Et là, je vois le nom de l'auteur et me dis tout de go que c'est un moyen de me faire mentir. Et j'ai raison, car j'ai aimé. Comment n'aurais-je point pu ? "Un mot a raison par lui-même sans que le sens intervienne. Or, quoi de plus séduisant et de plus loyal à la fois que celui de "paresse". Ne le voyez-vous point qui s'étire, avec langueur, mais aussi avec franchise. Comme ses deux syllabes se fondent miraculeusement -la première claire, sonore, la seconde, étouffée, chantante et moelleuse- dans une harmonie où la vigueur et la nonchalance sont aussi précieuses l'une que l'autre !" (p. 9)

La suite est tout aussi bien, avec un tour du monde d'exemples de paresse, bien sûr sur les rivages de l'océan Indien où cela semble aisé, mais aussi dans des zones moins évidentes comme par exemple la boue de Vladivostok. "Nous ne savons plus être paresseux. [...] Pouvoir demeurer étendu des heures sans que la satiété ne vous effleure. Goûter dans le repos du corps l'essentielle des joies. Par l'immobilité vaincre l'éphémère, les contingences, le désir toujours inefficace. Avoir le cerveau si vide ou si riche qu'il ne souffre point de l'inaction." (p.38/39)

En conclusion, soyons paresseux, mais attention, cela demande du travail, au moins celui de lire ce court texte !

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Les diaboliques de Saint-Goustan

Publié le par Yv

Les diaboliques de Saint-Goustan, Jean-Marc Perret, Palémon, 2021

Fin novembre, une femme fuyant des poursuivants fait irruption sur une petite route et est tuée par un automobiliste. Quinze jours plus tôt, Auray, Lina jeune femme, escort-girl se fait agresser au bas de son immeuble. Dans la même ville, trois hommes se rencontrent autour d'un projet commun mystérieux censé mettre en péril l'état français. Il y a le notaire Jean-Pol Forquet, le curé Tersiquel et le colonel Müller. L'adjudant Louis Kerlo reçoit à la gendarmerie un message lui indiquant que ces trois hommes préparent un gros coup. Il veut enquêter mais son supérieur l'en empêche. Malgré cela, il mène en solitaire des investigations.

Nouveau venu chez Palémon, Jean-Marc Perret signe un polar moderne et réaliste qui m'a bien plu. Deux parties assez différentes, la première avec Lina et Louis Kerlo et la seconde avec Marc Renard, enquêteur privé qui entre en scène. Très équilibré, ce roman se suit avec grand plaisir et nous fait entrevoir ce que pourrait être un complot d'envergure nationale pour faire tomber un gouvernement. Je ne cache pas que ça fait un peu flipper puisque c'est somme toute assez réaliste, surtout depuis quelque temps où les paroles se libèrent et montent en violence en agressivité. Certains en font leur fonds de commerce en vue d'une éventuelle présentation aux élections ou pour préparer le terrain à certaine qui deviendra du coup modérée aux yeux et oreilles des électeurs. Beurk...

Pas de temps mort dans le récit de JM Perret qui va de rebondissements en découvertes, qui ne ménage ni ses effets ni ses surprises. Pas mal de personnages qui cachent eux-mêmes des choses, d'autres plus lisibles, tous concourent à faire de ce roman policier, le premier d'une série si j'en juge par le numéro 1 apposé sur la tranche, un bon moment de lecture.

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A l'ombre des saules

Publié le par Yv

A l'ombre des saules, Michel Bouvier, Gilles Guillon, 2021

1900, Marquise, près de Boulogne, Gaston Dewiquet est commissaire et chargé de retrouver un anarchiste en fuite. Ses recherches le mènent à Wierre-Effroy, un village dans lequel un paysan est retrouvé assassiné d'un coup de sa fourche. Dewiquet est certain que c'est son homme l'assassin. Puis lorsqu'une banque est dévalisée, il devine que c'est toujours le même auteur. Se heurtant aux gendarmes et aux paysans locaux, son travail n'est pas aisé, d'autant plus qu'il est également appelé aux fonderies locales pour y rétablir l'ordre, la révolte gronde. Pris entre plusieurs feux, il ne sait plus où donner de la tête.

Troisième roman de Michel Bouvier chez Gilles Guillon, et dans celui-ci, le commissaire Dewiquet, héros de l'un des précédents rencontrera son homologue Riqueval héros de l'autre.

Après un début un peu long très axé sur la place de la religion à l'époque et dans la région, tout cela à travers l'esprit de Gaston Dewiquet qui doute beaucoup et s'inquiète pour son fils adoptif qui semble tourner bigot et un curé pas très franc du collier -moi, l'anticlérical, je suis à la fois agacé qu'encore une fois, la religion tienne une sigrande place dans les romans de Michel Bouvier et ravi de l'angle pris, celui du doute et du questionnement-, le roman démarre enfin et, comme à chaque fois, je me fais cueillir par la belle langue de l'auteur, travaillée, élégante au risque parfois d'en faire un peu trop et de gêner la bonne compréhension de l'histoire, mais cela s'oublie vite, emporté par l'ambiance un rien surannée, le caractère particulier du policier qui doute beaucoup de lui, de ses croyances, de ses méthodes, de son efficacité, de sa place dans le monde de Marquise...

En plus d'une enquête policière c'est l'histoire d'un homme qui tente de comprendre le monde dans lequel il vit qui change au tournant de deux siècles : on commence à parler de révolte ouvrière, de patrons qui optimisent leurs gains, des femmes qui sont encore très soumises à leurs maris mais certaines commencent à revendiquer une place dans la société, de l'église qui perd peu à peu de son poids sur les hommes (tant mieux)...

Bon roman policier et en outre, très belle couverture.

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