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Waterbed

Publié le par Yv

Waterbed, Sophie Goettmann, Plon, 2023

Ondine est la petite-fille d'un industriel très en vue, qui fréquente du très beau monde jusque dans les hautes sphères du pouvoir. Il est aussi tyrannique et partouzeur. Il vit nu et impose la nudité chez lui, notamment dans sa maison de vacances, autour de la piscine -"haut lieu du libertinage français de l'époque". Les enfants, ses petits-enfants subissent, assistent à des scènes très déplacées, sont plongés dans une atmosphère où tout tourne autour du sexe, du libertinage voire de la pornographie. Les propos sont vulgaires, violents, mais ne restent que des propos. Pas d'inceste. De l'incestuel qui est selon Paul-Claude Racamier, psychiatre et psychanalyste, cité en exergue "un climat où souffle le vent de l'inceste, sans qu'il y ait inceste."

Ondine que l'on imagine sans difficulté être l'autrice, qui comme elle est médecin, guitariste et chanteuse et dessinatrice raconte son enfance, son adolescence et sa vie de jeune adulte à deux voix. Celle de l'enfant qui subit sans comprendre, qui sent bien que ce qui se passe chez elle ne se passe pas ailleurs, qui ne se sent pas à l'aise nue, entourée d'hommes et de femmes nus. Ces mots sont corroborés, expliqués par Ondine devenue adulte et médecin, qui écrit ce livre et qui s'adresse à son grand-père en disant "Monsieur". Les textes, courts, alternent et se distinguent aisément d'une part par le ton employé, le style et d'autre part par la police d'écriture. "Papie Martial n'est pas très beau. Il a un grand nez, les cheveux raides Il ne porte jamais de vêtements, sauf quand il va au bureau. [...] Par contre, il est effrayant quand il crie. Alors tout le monde est toujours d'accord avec lui." (p.37/38)

Très bien écrit, dans un langage direct et cru, sans être ni vulgaire ni grossier, qui tente de coller au mieux aux sensations de la jeune Ondine, ce livre évite le voyeurisme et raconte la difficulté de grandir dans cette ambiance, dans cette peur qu'un jour les jeunes gens soient eux-mêmes livrés aux instincts des amis de Papie Martial. Il dit également le manque des parents, sous la coupe du grand-père : la mère d'Ondine est la fille de Martial, elle participe aux journées échangistes, et son père travaille pour Martial et accepte tout, il participe lui aussi : "Chez nous, la caresse était sexuelle ou elle n'était pas. Le grand-père nous touchait, nos parents, non. Le manque d'un contact chaleureux, sincère et bien intentionné court encore sur ma peau, tant d'années après. L'absence de l'étreinte aimante et rassurante, qui donne à l'enfant l'envie de grandir, ne trouvera jamais réparation. La sensation de n'avoir aucune place dans le monde non plus." (p.71)

Un livre qui se lit assez vite, qui nous fait passer par des tas de sentiments ou sensations notamment le dégoût et la colère, mais qui au-delà de ça fait prendre conscience que beaucoup d'enfants encore aujourd'hui sont confrontés à ces dérives, avec des adultes qui ne comprennent pas que la vie intime doit rester intime et qu'exposée à tous et tout le temps, elle blesse et détruit ceux qui subissent. Des enfants qui auront du mal à construire leur propre vie intime.

"Un livre explosif et saisissant, qui lève le dernier tabou de la génération post-libération sexuelle." (4ème de couverture)

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40 hommes et 12 fusils

Publié le par Yv

40 hommes et 12 fusils. Indochine 1954, Marcelino Truong, Denoël Graphic, 2022

1953, Hà Nôi, Minh est un jeune homme, artiste peintre, qui vit des subsides de ses parents propriétaires terriens puisqu'il ne vend pratiquement pas de tableaux. Il aime Lan qui lui sert parfois de modèle. Le pays est partagé en deux, le nord (dont Diên Biên Phu) sous contrôle Viêt-Minh (République Démocratique du Viêt-Nam) et le sud (dont Hà Nôi) sous contrôle des Français. Lorsque Minh reçoit son ordre d'incorporation dans l'armée nationale, celle qui combat auprès des Français, il est abasourdi. Son père a obtenu une année de sursis et l'envoie gérer leurs terres en province. Le voyage ne se déroule pas comme prévu et Minh est contraint, pour sauver sa vie, de s'engager dans l'armée communiste qui lutte pour la réunification et l'indépendance du pays.

Gros roman graphique de Marcelino Truong qui se déroule pendant la guerre d'Indochine. J'aime beaucoup le dessin dans des tons grisés avec quelques rares touches de couleur, puis, parfois de grandes pages très colorées sur les paysages vietnamiens ou des actes forts. L'histoire n'est pas en reste avec Minh, jeune homme peu sensible à la propagande, qui ne peut la critiquer frontalement sous peine des pires sanctions, mais qui n'en pense pas moins. Il y travaillera pourtant sous les ordres d'un Français communiste qui s'est rallié : "Ici, tu travailles pour la propagande, mon vieux ! Tu n'es pas là pour INFORMER le peuple, mais pour le FORMER !" (p.175). Malgré son peu d'enthousiasme, il devient un soldat aguerri qui témoigne de l'asservissement du peuple, de son endoctrinement, mais aussi de sa volonté de chasser le colonisateur. Il montre les hommes au combat et aussi les femmes qui luttent, qui transportent les blessés, le matériel, sûres d'être reniées à la fin de la guerre considérées comme souillées au contact des soldats.

En France, si l'on parle un peu de la guerre d'Algérie, je n'ai pas vu beaucoup d’œuvres sur la guerre d'Indochine, sans doute l'humiliante défaite de Diên Biên Phu n'est-elle pas évidente à raconter. Ce roman graphique l'aborde, du côté des indépendantistes, ce qui permet de mieux comprendre le pays et ses habitants lassés par les Français mais pas certains de gagner au change avec un régime soutenu par la très autoritaire URSS. Très belle découverte tant dans le fond que la forme.

PS : quelques erreurs se sont glissées dans mon texte que l'auteur, Marcelino Truong a aimablement corrigées dans un commentaire ci-dessous qu'il est intéressant et instructif de lire, en plus de son roman graphique.

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Le héron de Bondoufle

Publié le par Yv

Le héron de Bondoufle et autres transports animaux, Elia Sikander, Ed. Y, 2022

Au gré des voyages en automobile, l'on croise ou l'on suit des transports d'animaux, l'on observe des oiseaux au bord des routes, dans les champs. Ce sont eux qu'Elia Sikander met dans des poésies tantôt drôles, tantôt tragiques, qui racontent le traitement des hommes envers les animaux.

C'est assez original de situer son recueil sur les routes, parler du trafic, des véhicules, des chauffeurs, des passagers. J'avoue avoir bien aimé bien que peu ouvert à la poésie. Les textes d'Elia Sikander sont pour la plus grande partie, très accessibles :

"Groins égarés

Semaine riche, à la radio,

info du midi.

Les petits gorets échappés le matin

de leur véhicule accidenté

semaient encore la panique sur

l'autoroute.

On attendait de les rattraper tous.

Pour les gorets déserteurs...

Clémence !"

Celui que j'ai préféré, Non, vous ne rêvez pas..., où il est question d' "Arrivage de cuisses de poulets", je ne peux pas le citer, trop long, je vous laisse le soin de trouver le livre dans une bonne librairie, et pour finir en beauté, je cite un court texte

"Chevaux helvètes

Van de luxe, Georges V ou Ritz

pour ces Juments ou Étalons Suisses."

 

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Les grandes oubliées

Publié le par Yv

Les grandes oubliées. Pourquoi l'histoire a effacé les femmes, Titiou Lecoq, L'iconoclaste, 2022

"De tout temps, les femmes ont agi. Elles ont régné, écrit, milité, créé, combattu, crié parfois. Et pourtant elles sont pour la plupart absentes des manuels d’histoire. [...] Pourquoi ce grand oubli ? De l'âge des cavernes jusqu'à nos jours, Titiou Lecoq s'appuie sur les découvertes les plus récentes pour analyser les mécanismes de cette vision biaisée de l'Histoire. Elle redonne vie à des visages effacés, raconte ces invisibles, si nombreuses, qui ont modifié le monde." (4ème de couverture)

J'aime bien Titiou Lecoq, pour ce que j'en ai lu (Les morues) et ce que j'ai entendu dans diverses émissions. Elle a l'art et le talent de nous expliquer simplement et avec pas mal d'humour, son sujet. Cette fois-ci, elle s'attelle à un thème qui lui tient à cœur, vaste et très actuel : la place des femmes dans l'Histoire. Thème qui devrait tenir à cœur à tout le monde et qui n'est pas qu'actuel car de tous temps et universel. De l'âge des cavernes à notre époque, elle explique comment, petit à petit, les hommes ont imposé leur loi et ont effacé les femmes supposées plus faibles de constitution et aussi un peu d'esprit, d'où une inutilité à les instruire puisque en gros, elles n'imprimaient rien. Ah si, la couture, le ménage, faire et élever des enfants, ça c'est facile. Tellement que ce serait rabaisser les hommes que de faire ces travaux à leur place.

Je pousse volontairement le bouchon, mais Titiou Lecoq y va aussi de ces remarques acerbes, ironiques, décalées et drôles, ce qui rend son essai très accessible et très instructif. La femme n'a pas toujours été soumise, il y eut des temps où elle régna -avant l'invention de la loi salique par exemple. Elle écrivit même, n'en déplaise à certains grands auteurs, tel Voltaire. Les autrices -à préférer à auteures, car les autrices étaient reconnues comme telles avant que le terme soit supprimé par l'Académie Française-, avaient du succès et quelques mâles des plus célèbres s'inspirèrent -pour ne pas dire plagièrent- de leurs écrits.

Le combat des femmes est toujours d'actualité dans le travail, la politique, la vie quotidienne pour obtenir qu'elles bénéficient simplement des mêmes droits que les hommes. Femmes et hommes, pour ne pas faire preuve d'ultracrépidarianisme en société, lisez ce livre de Titiou Lecoq et vous pourrez argumenter face aux sexistes, aux tenants d'une vieille France moisie qui voudraient que madame restât à la maison et que monsieur, chef de famille, gagnât l'argent de la famille.

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Les tombes du bout du monde

Publié le par Yv

Les tombes du bout du monde, Denis Voignier, Palémon, 2022

Pont-Croix, une vieille dame apparemment sans histoire est assassinée. Puis un deuxième meurtre est perpétré de la même manière, quasiment au même endroit. Plus des tentatives qui ne resteront que tentatives parce que le tueur n'a pas suffisamment préparé ou que les victimes ont eu de la chance. Une drôle de série s'abat sur le Cap Sizun. Rien ne semble relier les agressés et les tués.

Le capitaine Franklin Clermont-Tonnerre de la PJ de Strasbourg qui passe quelques jours chez des amis en Bretagne se retrouve mêlé à l'affaire et se retrouve à épauler les gendarmes d'Audierne.

Axe est-ouest pour Franklin Clermont-Tonnerre qui ne semble pourtant pas dépaysé et est même sous le charme des paysages bretons et d'une gendarme. Dans cette intrigue, Denis Voignier mêle habilement l'histoire de la région et notamment la période de la Terreur, entre 1791 et 1793, lorsque les Chouans s'élevèrent contre la Première République. S'ensuivirent des exactions et des massacres de chaque côté, et c'est de l'un d'eux que naît l'enquête contemporaine dans laquelle gendarmes et policiers collaborent  pleinement, loin des querelles de polices. Tout va donc pour le mieux, c'est même peut-être un peu idyllique, mais ne boudons pas notre plaisir de lire un polar très agréable, bien mené et captivant jusqu'au bout. Sans être joyeux -il y a quand même quelques morts et agressés-, c'est un roman policier qui ne plombe pas, notamment grâce aux personnages sympathiques, positifs qui savent nouer des relations cordiales et franches. Et puis, on a beau dire, mais la Bretagne est une terre de légendes certes, mais aussi une terre sur laquelle il fait bon vivre, une région dans laquelle le beau temps n'est jamais loin -parfois, il est même présent. Elle a tout pour plaire et ce n'est pas Franklin Clermont-Tonnerre qui me contredira.

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Pamplemousse

Publié le par Yv

Pamplemousse, Julie Bressollette, éditions Y, 2021

"Pamplemousse est un récit doux-amer qui relate une classe de neige pendant les années Giscard." (4ème de couverture)

Une nouvelle épatante dans laquelle je me projette d'autant plus que j'ai à un an près le même âge que la narratrice, que j'ai grandi en cité, dans une tour -moi au septième étage, elle au sixième- qui représentait, dans les années 70, un confort indéniable : chauffage au sol, ascenseur, premiers locataires donc appartement propre... Bon, je ne suis jamais allé en classe de neige, mais pas mal de choses qu'elle décrit, j'ai pu les vivre dans d'autres circonstances.

Le reste, c'est une autre histoire, très joliment écrite. C'est une fillette de dix ans devenue adulte qui raconte, c'est parfois drôle : "Valéry Giscard d'Estaing était président de la République depuis un an. On le disait jeune, je le trouvais vieux avec ses trois cheveux qui traversaient le sommet de son crâne." (p.22) Ça l'est aussi lorsqu'elle raconte sa tenue vestimentaire, imperméable si une fois tombée dans la neige, elle se relève vite et à d'autres moments. Mais le tragique n'est pas bien loin.

Pamplemousse est le premier titre des éditions Y sises à Saint-Nazaire en Loire-Atlantique, maison d'édition associative née en 2021. A découvrir.

Lino L. illustre ce récit par ses gravures.

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La disparition de Josef Mengele

Publié le par Yv

La disparition de Josef Mengele, Olivier Guez, Matz, Jörg Mailliet, Les arènes, 2022

Josef Mengele, médecin tortionnaire à Auschwitz pendant la guerre, qui, sous le prétexte de faire avancer la science pratiqué des expériences abominables sur les prisonniers du camp et notamment des enfants, parvient à s'enfuir. En 1949, il arrive en Argentine sous un faux nom. Mais la traque des anciens nazis le contraint à quitter le pays, à se réfugier au Paraguay puis au Brésil. Sa riche famille pourvoit à ses besoins et le réseau pour aider les ex-nazis à se cacher est dense et bien organisé. Il parviendra à échapper pendant trente ans d'errance à toutes les poursuites, passant parfois très près d'une arrestation. Il meurt mystérieusement sur une plage du Brésil en 1979.

D'après le roman d'Olivier Guez paru en 2017, Matz écrit un scénario efficace. Des retours aux années de guerre pour expliquer qui était Mengele et ce qu'il a pratiqué, puis des années de fuite et d'errance qui se suivent, sans que jamais il ne renie ce qu'il a fait, convaincu qu'il a fait avancer la science au-delà de beaucoup d'autres scientifiques. Mengele vitupère contre les juifs, les communistes, les homosexuels, les Américains, tous ceux qu'il hait et qui sont pour lui, responsables de son exil.

Jörg Mailliet dessine l'Amérique du sud, les pays qui, sous des régimes autoritaires ont accueilli les anciens nazis. Il y a parfois malgré la haine de ces hommes d'être contraints à quitter leur pays des scènes d'une certaine insouciance lorsqu'ils se rencontrent entre eux, qu'ils vont au bordel... Des hommes qui n'ont aucun regret, qui s'honorent même de ce qu'ils ont fait et ne rêvent que de réhabilitation.

Un très bel album qui permet de ne pas oublier qui furent ces types odieux, inhumains et ce qu'ils ont fait en toute connaissance de cause, en adhérant aux thèses nazies et en ne regrettant jamais rien.

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Bons baisers de Saint-Malo

Publié le par Yv

Bons baisers de Saint-Malo, Claude Picq, Palémon, 2022

A la demande du commissaire Saint-Antoine et pour aider la femme d'icelui, Cicéron Angledroit, assisté de Momo, son bras droit - l'autre il l'a perdu dans un attentat-, de Vanessa sa flicque préférée et quasiment concubine, enceinte de ses œuvres, et de l'inimitable et inattendu -normalement, il ne devait pas venir - René, part pour la Bretagne, entre Cancale et Saint-Malo, enquêter sur la disparition du fils d'un ostréiculteur demi-frère de madame la commissaire, donc demi-neveu de Saint-Antoine. Ouf...

Ils pataugent. Une sorte de torpeur s'empare de Cicéron est ses acolytes. La Bretagne les endort, loin de Vitry-sur-Seine, ils perdent leurs repères...

Une nouveauté, qui, renseignement pris, date du roman précédent des enquêtes de Cicéron, c'est désormais Claude Picq qui les signe en lieu et place de Cicéron himself. Sinon, rien ne change, tout en évoluant : Cicéron joue les enquêteurs privés tout en tentant de ménager Vaness', enceinte et qui s'ennuie un peu d'être mise au placard le temps de sa grossesse. Elle qui aime l'action semble déprimer un peu. Momo est toujours aussi silencieux et efficace. Et René, ben c'est René. Toujours à l’affût d'une aventure sexuelle -Paulette, sa femme est en croisière-, un langage très personnel : une sorte de Bérurier de Vitry, ramasseur de caddies à l'Interpasher de la ville. Pour qui ne connaît pas l'équipe, pas de souci, Claude Picq, en début de chaque ouvrage la présente et chaque titre peut se lire seul.

On les sent fatigués les banlieusards, lorsqu'ils arrivent en Bretagne. Ils peinent à trouver des pistes, des indices : "Je ne nous sens pas du tout sur ce coup-là. On n'a pas le pied marin, on navigue à vue. [...] Au fond de moi, je partage cette opinion, mais mon amour-propre me contraint à résister sans conviction. Je ne veux pas laisser la main, mais force est de constater qu'on peine pas mal." (p.184). Il est dans l'cirage Cicé. Perdu, carrément l'Angledroit !

Dans son style très particulier qui emprunte au classique, mais aussi à l'interpellation des lecteurs, et au plus argotique voire grivois dès que René entre en scène, Claude Picq écrit de nouveau une histoire décalée, drôle et franchement hilarante par moments. Mais si l'on veut intellectualiser le truc, pourquoi pas, après tout, on peut lire entre les lignes l'angoisse du futur papa qu'est Cicéron, le blues de la future maman, la galère des ostréiculteurs face à la pollution, aux vols d'huîtres, le tourisme à outrance qui ne permet plus de profiter d'endroits calmes, Saint-Malo, entre autres, est envahie toute l'année...

Vous voyez, il y en a pour tout le monde dans ce polar, une valeur sûre dans le genre...

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Les Ouïghours, un peuple qui refuse de mourir

Publié le par Yv

Les Ouïghours, un peuple qui refuse de mourir, Eric Darbré, Eliot Franques, Marabout, 2022

"Le drame ouïghour... J'étais là quand les premières grandes manifestations ont été réprimées dans le sang. 
C'était en 1996, il y a 25 ans. Je débutais alors dans le journalisme.
À l'époque, le monde entier ne se sentait pas concerné par cette minorité turcophone de Chine. J'étais là aussi quand les Chinois ont commencé à stériliser de force les femmes ouïghoures. Et puis, j'ai vu les camps de prisonniers se dresser dans le désert et la mise en place de ce qui deviendrait un génocide culturel.
Alors, j'ai promis à ces Ouïghours de ne pas les laisser mourir dans le silence et l'indifférence. J'y suis retourné encore et encore. Avec cette question qui reste coincée au fond de la gorge : jusqu'où peut aller un journaliste pour se rendre utile ?"
(4ème de couverture)

Pour parler des Ouïghours, Eric Darbré propose de raconter une partie de sa vie, celle qui l'a amené à s'intéresser à ce peuple et à ce coin de Chine, et qui l'a ensuite amené à ne pas lâcher, à toujours tenter de faire parler de ce peuple dans les médias. En vain souvent, sauf quelques articles et reportages ici ou là, mais les Ouïghours, entre la fin des années 90 et la fin des années 2010, ça ne fait pas vendre. Ils se font massacrer, siniser par les autorités chinoises, sont envoyés dans des camps, ramassent, tels les esclaves, le coton pour les industries chinoises en étant payé un minimum même pas vital. C'est cela que raconte Eric Darbré, ainsi que l'histoire du peuple Ouïghour, turcophone, musulman qui a eu son indépendance entre 1944 et 1949, une monnaie, un président avant que Mao ne réintègre le pays dans la Chine communiste.

Le combat des Ouïghours n'a pas cessé, malgré les risques de mort et enfin, quelques pays ont parlé de génocide, mais la Chine n'entend pas céder ce territoire riche, et le génocide continue.

Roman graphique indispensable pour comprendre le drame que vivent les Ouïghours, raconté par un journaliste qui connaît son sujet depuis vingt-cinq ans et dessiné par Eliot Franques. On ne sort pas de cet album aussi léger qu'on a pu y entrer.

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