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Morsure

Publié le par Yv

Morsure, Dan Nisand, Ed. Naïve, 2007
Le narrateur, professeur tranquille, voit grandir en lui une étrange obsession : mordre. La rencontre improbable avec son jeune voisin, Jimmy,  et son chien, un rottweiler prénommé Ivan ne va faire qu'aggraver la situation.
Roman étrange, inégal. Cela commence par un chapitre que j'ai trouvé assez mal écrit, le choix de certains mots ne s'accordant pas au style des phrases. Cela continue avec des chapitres mieux construits : l'auteur nous abreuve parfois de sa théorie sur nos instincts primaires, violents, carnassiers. C'est parfois bien vu, parfois lourd et répétitif. Cela finit beaucoup mieux que ça ne commence, notamment les deux derniers chapitres -surtout l'ultime ! Je ne connaissais pas les éditions Naïve, je ne regrette pas ma lecture, mais je ne suis pas complètement emballé non plus.
PS : à noter la très belle couverture : dessin de Frédéric Poincelet.

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Chucho

Publié le par Yv

Chucho, Grégoire Polet, Galliard, 2009
Chucho est un gamin pauvre des rues de Barcelone, hébergé par Bélito, un souteneur et par Dumbre, une ex-prostituée. Malgré cet environnement, Chucho ne perd pas l'idée de réaliser son rêve de quitter cette ville pour New-York.
Court roman, atypique parce que Grégoire Polet écrit en utilisant plusieurs styles : dialogues, phrases courtes en alternance avec des phrases très longues, style très descriptif entrecoupé de passages très poétiques.
On a l'habitude de parler de personnages attachants dans les romans que l'on lit, mais s'il en est réellement un pour qui le terme n'est pas galvaudé, c'est bien Chucho. On aimerait tellement que ses rêves se réalisent, sans tombrer cependant dans un sentimentalisme facile.
Malgré quelques passages que j'ai trouvés longs, c'est un roman qui me laisse le sentiment d'avoir déambulé dans les rues mal famées de Barcelone en compagnie d'un gamin déluré, curieux et éminemment sympathique et touchant.

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Nueva Königsberg

Publié le par Yv

Nueva Königsberg, Paul Vacca, Ed. Philippe Rey, 2009
1944, fuyant les bombes soviétiques, les habitants de Königsberg, patrie du philosophe Immanuel Kant, débarquent au Paraguay. Ils fondent la communauté Nueva Königsberg dans laquelle ils vivent selon les principes particulièrement austères de leur maître philosophe. Pour eux, le monde s'est arrêté en 1771. Seule une question les taraude : quelle doit-être leur vie sexuelle ? C'est pour répondre à celle-ci que le célèbre philosophe, spécialiste de Kant, Jean-Baptiste Botul et son assistant zazou, Sébastien, arrivent à Nueva Königsberg. En huit causeries, Botul devra faire le tour de cette question : sexe ou pas sexe ?
Comme beaucoup, j'avais été sous le charme du premier roman de Paul Vacca : La petite cloche au son grèle. L'exercice du second roman n'est pas toujours aisé. Paul Vacca s'en tire haut la main. Je lui sais gré de changer totalement d'angle et de genre. D'un roman tendre et émouvant, il passe à une fable philosophique très drôle - j'en ai même eu des "remontées" de Candide !
Je me suis promené avec joie dans les rues de Nueva Königsberg en compagnie de Sébastien et Sofia, l'institutrice du lieu. J'ai écouté leurs arguments et leurs discussions sur l'Amour, la liberté, le sens de la vie et le bonheur. Je suis resté discret ne voulant pas troubler leur intimité naissante. J'ai aussi assisté aux causeries de J-B Botul devant statuer sur ce que résume ainsi Sébastien : "To fuck or not to fuck. That is the question." Paul Vacca oppose malicieusement l'austérité de Kant -je me suis renseigné en cours de lecture- à la vie "normale" de l'après guerre notamment dans ce qu'elle avait de plus festif : le jazz et les zazous.
Je ne suis point féru de philosophie. J'avoue même mon inculture en ce domaine. Comme il n'était pas nécessaire d'avoir lu Proust pour apprécier La petite cloche, il n'est point utile de connaître Kant pour déguster Nueva Königsberg.
Et maintenant, en guise de conclusion, une question à l'auteur : vous rendez-vous compte, M. Vacca, qu'avec ce livre érudit, au style riche, et en même temps très drôle -ce qui tendrait à prouver que l'on peut s'instruire gaiement, en riant- vous réussissez à nous intéresser à la philosophie de Kant ; vous m'obligez à modifier votre image suite à votre premier livre -si tant est que j'en avais une-, tellement vous changez de registre ; vous me faites également écrire une phrase très longue, mais j'espère toujours intelligible ?
PS : j'applaudis lorsque les gens quels qu'ils soient ne vont pas là où on les attend, a fortiori les artistes, les écrivains. Alors clap clap clap ! Merci donc à vous M. Vacca et bravo pour ces aventures philosophiques rocambolesques.

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L'empreinte du renard

Publié le par Yv

L'empreinte du renard, Moussa Konaté, Fayard, 2006
Des morts bizarres surviennent en pays dogon, au Mali. Le commissaire Habib, de Bamako, est envoyé sur place avec son adjoint, l'inspecteur Sosso. Cette enquête n'est pas aisée, car les Dogons sont très attachés à leurs traditions et sont connus pour la puissance de leur magie. En outre, ils voient d'un mauvais œil, l’irruption dans leur communauté de deux flics de la ville.
Roman policier tout en atmosphère. On pourrait comparer le commissaire Habib à Maigret : il prend le temps de bien connaître le contexte dans lequel il évolue, il prend des gants, des garanties avant de faire quoi que ce soit.
Bien lui en prend d'ailleurs, car les Dogons vivent en marge de la société et ont leurs propres règles. Donc, pendant tout le début de l'enquête, Habib et Sosso flairent et emmagasinent indices et intuitions. Puis, d'un coup, tout s'emballe. Si les 160 premières pages sont assez planplan, mais rudement intéressantes, les 100 dernières son beaucoup plus rapides  et enfin la vérité se dévoile. Rien qui ne soit imprévisible -encore que la magie du pays opère-, mais encore une fois, comme un bon Maigret, l'atmosphère est quasiment un personnage. Ajoutez à cela du tourisme au pays des Dogons, et bien sûr vous n'avez qu'une envie, celle de retrouver Habib et Sosso pour d'autres aventures. Bonne pioche pour mon premier polar africain.

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Nous autres

Publié le par Yv

Nous autres, Stéphane Audeguy, Gallimard, 2009
Pierre arrive au Kenya à la mort de son père qu'il n'a quasiment pas connu et qui s'est installé dans ce pays depuis une trentaine d'années. Il découvre la vie que son père y a menée et les habitants de ce pays, berceau de l'humanité. En parallèle, des narrateurs s'exprimant en utilisant le "nous" racontent l'histoire du Kenya, insistant sur la longue colonisation par l'Angleterre et sa volonté d'y laisser sa trace indélébile en construisant une ligne de chemin de fer gigantesque, et sur la décolonisation. Ces narrateurs sont tous les morts (80 milliards) que la Terre a portés. D'autres personnages, bien vivants, eux, apparaissent dans le livre. Tous se rencontreront.
Oserais-je avouer que j'avais peur en ouvrant ce livre : peur parce que je n'avais pas aimé La théorie des nuages du même S. Audeguy, peur parce que le sujet ne me tentait pas et que je sentais un certain élitisme de mauvais aloi ? Que nenni ! Je suis entré dans ce livre pour ne plus en sortir (sauf à la fin, bien sûr !). Quel style ! Le chapitre 0 est à mon sens le plus beau dans l'écriture alors qu'il raconte ce que Pierre vit de pire dans ce pays : un safari. Il émane des ces lignes une poésie qui incite à continuer sa lecture. La suite, si elle est moins poétique, témoigne de la beauté de l'écriture de Stéphane Audeguy. De belles phrases, souvent longues. Pas toujours de verbes. L'histoire n'est pas en reste et pour qui n'aime pas particulièrement le Kenya, rien de rebutant, bien au contraire : on apprend énormément de choses sur ce pays sans avoir la sensation d'assister à un cours d'histoire. L'idée d'utiliser les voix des morts de la Terre est lumineuse et prolonge la poésie du livre.
Le rythme est lent volontairement, s'adapte au climat du pays et nous permet d'y voyager en douceur. Rien à voir avec la soi-disante indolence africaine, concept qui n'a court que dans l'hémisphère nord, parce si nous, nous parcourons le Kenya au rythme des longues phrases de l'auteur, les Kényans eux vivent vite, conduisent vite sur leurs routes cabossées et courent vite, notamment Anyango, championne de marathon, comme d'autres des ses compatriotes. Quant à cet élitisme évoqué plus haut, j'admets que ce livre n'est sûrement pas le plus facile que j'aie lu, mais il est largement lisible par le plus grand nombre.

Interlignes a questionné l'auteur pour un autre roman

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Combat de l'amour et de la faim

Publié le par Yv

Combat de l'amour et de la faim, Stéphanie Hochet, Fayard, 2009
Début du XXème siècle, aux Etats-Unis, Lula, accompagnée de son jeune fils prénommé Marie, comme La Fayette, erre d'homme en homme avec l'espoir de faire un beau mariage. Lorsqu'elle y parvient, Marie, déjà pré-adolescent, comme on dit maintenant, ne s'adapte pas à cette belle-famille qui le rejette et le met à la porte. Il erre alors à son tour, de femme en femme, dans un "combat de l'amour et de la faim", se fixant parfois, plus ou moins longtemps, mais toujours repartant.
Roman très structuré. Stépahnie Hochet maîtrise ses personnages, Marie en particulier. On progresse de l'enfance à l'âge adulte par bonds dans le temps.
Belle écriture permettant de suivre et comprendre les pensées, le cheminement et les complexités de Marie. Dans ce livre -écrit par une femme- celles-ci n'ont que des rôles secondaires, mais tellement importants, puisque toute la vie du héros tourne et se construit autour d'elles. Elles sont puritaines, prostituées, modernes, chacune lui apportant de quoi se détruire et de quoi se construire.

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Prix Orange du livre

Publié le par Yv

Prix Orange du livre, cliquez, c'est là (vous pourrez y voir ma tête, tentant, non ?)
Orange, la société bien connue de téléphonie, télévison et Internet crée son prix littéraire, le prix Orange du livre. Alors, j'entends déjà dire que c'est un énième prix et qu'Orange fait sa pub sur le dos des livres, etc, etc, ...
Eh bien, peut-être -mais je n'en suis pas sûr-, et avant toute chose je voudrais vous dire que je vous laisse médire parce que je fais partie du jury, sélectionné comme internaute (nous sommes 7 internautes et 6 professionnels : plus de détails sur le site). Ensuite, pour avoir rencontré à deux reprises les organisateurs, je peux dire qu'ils y croient et que si évidemment le prix apportera quelque publicité à la société, la démarche est d'abord de promouvoir le livre et que ces trois personnes (les organisateurs donc, Armelle, Laëtitia et Sylvain) sont animés par ce sentiment. Nous n'avons parlé que livre.
Pour ce prix, nous avons puisé dans les fictions parues de janvier à avril 2009. A nous 7 les internautes, nous avons balayé large pour sortir une sélection de 30 livres, parue récemment sur le site, ce qui explique ma frénésie de lecture de ces dernières semaines -et encore, vous n'avez pas tout lu, il me reste quelques articles à écrire.
Et puis, hier, journée à Paris, pour alléger la liste et ne retenir que 5 livres. Exercice hautement difficile et frustrant et rondement mené par le président du jury, Erik Orsenna. Evidemment, je ne vous dévoilerai rien, puisque cette liste ne sera publique que le 15 mai. Ni la torture, ni la corruption, ni la séduction, rien ne me fera faiblir.
Important à savoir : si vous voulez voter, vous pouvez vous inscrire gratuitement sur le site du prix Orange, jusqu'au 7 juin. D'ici là, bonnes lectures.

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La patience des buffles sous la pluie

Publié le par Yv

La patience des buffles sous la pluie, David Thomas, Ed. Bernard Pascuito, 2009
Recueil de textes, parfois assez longs pour s'apparenter à des nouvelles, d'autres fois, une simple demi-page. Tous écris à la première personne, mais le narrateur n'est pas toujours  -ou même jamais- le même. Ils parlent d'amour, de trahisons, de colères, de désamours, de rencontres, de séparations, de solitude, ... Ils sont tour à tour drôles, émouvants, tendres, colériques, nostalgiques, mélancoliques, ...
Le style de David Thomas s'adapte évidemment aux situations : parfois une écriture oralisée, parfois une écriture qui élude les négations et les articles, d'autres fois, un style classique.
En résumé : inclassable. Et c'est tant mieux ! Alors, certes, tous les textes ne sont pas de même valeur, mais aucun n'est mauvais et beaucoup sont très bons. Alors, un bon livre comme cela, on ne peut pas passer à côté.

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Journal intime d'un marchand de canons

Publié le par Yv

Journal intime d'un marchand de canons, Philippe Vasset, Fayard, 2009
Pour le résumé, tout est dans le titre. Pour la forme, on hésite entre roman, récit ou témoignage. Le marchand d'armes est fictif, mais les pays et les protagonistes, eux, sont bien réels ; ce qui fait de ce livre un livre à part ; car c'est bien d'un roman qu'il s'agit.
Il est bien documenté et bien écrit. La froideur et le détachement du narrateur fait un peu peur. Il vend des armes comme il vendrait des cuisines ou des voitures, sans aucun état d'âmes. Seuls les clients changent. Ceux qu'il fréquente sont dangereux et parfois -même souvent- infréquentables (Pinochet, Saddam Hussein, Kadhafi, ...). Philippe Vasset montre comment les différents pays producteurs d'armes se livrent une véritable guerre commerciale sans merci pour vendre leurs produits, au mépris des embargos. Le lobby des fabricants et des vendeurs d'armes est aussi très présent dans le livre.
En fil rouge, la vie de cet homme qui se raconte à travers sa vie professionnelle. Au passage, quelques explications sur la libération des infirmières bulgares par Cécilia Sarkozy,  sur le retour en grâce et en "persona grata" de Kadhafi et sur le conflit Russo-géorgien concernant l'Ossétie du sud.
Riche, intéressant et instructif, en plus d'être original dans la forme.

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