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L'empreinte du renard

Publié le par Yv

L'empreinte du renard, Moussa Konaté, Fayard, 2006
Des morts bizarres surviennent en pays dogon, au Mali. Le commissaire Habib, de Bamako, est envoyé sur place avec son adjoint, l'inspecteur Sosso. Cette enquête n'est pas aisée, car les Dogons sont très attachés à leurs traditions et sont connus pour la puissance de leur magie. En outre, ils voient d'un mauvais œil, l’irruption dans leur communauté de deux flics de la ville.
Roman policier tout en atmosphère. On pourrait comparer le commissaire Habib à Maigret : il prend le temps de bien connaître le contexte dans lequel il évolue, il prend des gants, des garanties avant de faire quoi que ce soit.
Bien lui en prend d'ailleurs, car les Dogons vivent en marge de la société et ont leurs propres règles. Donc, pendant tout le début de l'enquête, Habib et Sosso flairent et emmagasinent indices et intuitions. Puis, d'un coup, tout s'emballe. Si les 160 premières pages sont assez planplan, mais rudement intéressantes, les 100 dernières son beaucoup plus rapides  et enfin la vérité se dévoile. Rien qui ne soit imprévisible -encore que la magie du pays opère-, mais encore une fois, comme un bon Maigret, l'atmosphère est quasiment un personnage. Ajoutez à cela du tourisme au pays des Dogons, et bien sûr vous n'avez qu'une envie, celle de retrouver Habib et Sosso pour d'autres aventures. Bonne pioche pour mon premier polar africain.

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Nous autres

Publié le par Yv

Nous autres, Stéphane Audeguy, Gallimard, 2009
Pierre arrive au Kenya à la mort de son père qu'il n'a quasiment pas connu et qui s'est installé dans ce pays depuis une trentaine d'années. Il découvre la vie que son père y a menée et les habitants de ce pays, berceau de l'humanité. En parallèle, des narrateurs s'exprimant en utilisant le "nous" racontent l'histoire du Kenya, insistant sur la longue colonisation par l'Angleterre et sa volonté d'y laisser sa trace indélébile en construisant une ligne de chemin de fer gigantesque, et sur la décolonisation. Ces narrateurs sont tous les morts (80 milliards) que la Terre a portés. D'autres personnages, bien vivants, eux, apparaissent dans le livre. Tous se rencontreront.
Oserais-je avouer que j'avais peur en ouvrant ce livre : peur parce que je n'avais pas aimé La théorie des nuages du même S. Audeguy, peur parce que le sujet ne me tentait pas et que je sentais un certain élitisme de mauvais aloi ? Que nenni ! Je suis entré dans ce livre pour ne plus en sortir (sauf à la fin, bien sûr !). Quel style ! Le chapitre 0 est à mon sens le plus beau dans l'écriture alors qu'il raconte ce que Pierre vit de pire dans ce pays : un safari. Il émane des ces lignes une poésie qui incite à continuer sa lecture. La suite, si elle est moins poétique, témoigne de la beauté de l'écriture de Stéphane Audeguy. De belles phrases, souvent longues. Pas toujours de verbes. L'histoire n'est pas en reste et pour qui n'aime pas particulièrement le Kenya, rien de rebutant, bien au contraire : on apprend énormément de choses sur ce pays sans avoir la sensation d'assister à un cours d'histoire. L'idée d'utiliser les voix des morts de la Terre est lumineuse et prolonge la poésie du livre.
Le rythme est lent volontairement, s'adapte au climat du pays et nous permet d'y voyager en douceur. Rien à voir avec la soi-disante indolence africaine, concept qui n'a court que dans l'hémisphère nord, parce si nous, nous parcourons le Kenya au rythme des longues phrases de l'auteur, les Kényans eux vivent vite, conduisent vite sur leurs routes cabossées et courent vite, notamment Anyango, championne de marathon, comme d'autres des ses compatriotes. Quant à cet élitisme évoqué plus haut, j'admets que ce livre n'est sûrement pas le plus facile que j'aie lu, mais il est largement lisible par le plus grand nombre.

Interlignes a questionné l'auteur pour un autre roman

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Combat de l'amour et de la faim

Publié le par Yv

Combat de l'amour et de la faim, Stéphanie Hochet, Fayard, 2009
Début du XXème siècle, aux Etats-Unis, Lula, accompagnée de son jeune fils prénommé Marie, comme La Fayette, erre d'homme en homme avec l'espoir de faire un beau mariage. Lorsqu'elle y parvient, Marie, déjà pré-adolescent, comme on dit maintenant, ne s'adapte pas à cette belle-famille qui le rejette et le met à la porte. Il erre alors à son tour, de femme en femme, dans un "combat de l'amour et de la faim", se fixant parfois, plus ou moins longtemps, mais toujours repartant.
Roman très structuré. Stépahnie Hochet maîtrise ses personnages, Marie en particulier. On progresse de l'enfance à l'âge adulte par bonds dans le temps.
Belle écriture permettant de suivre et comprendre les pensées, le cheminement et les complexités de Marie. Dans ce livre -écrit par une femme- celles-ci n'ont que des rôles secondaires, mais tellement importants, puisque toute la vie du héros tourne et se construit autour d'elles. Elles sont puritaines, prostituées, modernes, chacune lui apportant de quoi se détruire et de quoi se construire.

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Prix Orange du livre

Publié le par Yv

Prix Orange du livre, cliquez, c'est là (vous pourrez y voir ma tête, tentant, non ?)
Orange, la société bien connue de téléphonie, télévison et Internet crée son prix littéraire, le prix Orange du livre. Alors, j'entends déjà dire que c'est un énième prix et qu'Orange fait sa pub sur le dos des livres, etc, etc, ...
Eh bien, peut-être -mais je n'en suis pas sûr-, et avant toute chose je voudrais vous dire que je vous laisse médire parce que je fais partie du jury, sélectionné comme internaute (nous sommes 7 internautes et 6 professionnels : plus de détails sur le site). Ensuite, pour avoir rencontré à deux reprises les organisateurs, je peux dire qu'ils y croient et que si évidemment le prix apportera quelque publicité à la société, la démarche est d'abord de promouvoir le livre et que ces trois personnes (les organisateurs donc, Armelle, Laëtitia et Sylvain) sont animés par ce sentiment. Nous n'avons parlé que livre.
Pour ce prix, nous avons puisé dans les fictions parues de janvier à avril 2009. A nous 7 les internautes, nous avons balayé large pour sortir une sélection de 30 livres, parue récemment sur le site, ce qui explique ma frénésie de lecture de ces dernières semaines -et encore, vous n'avez pas tout lu, il me reste quelques articles à écrire.
Et puis, hier, journée à Paris, pour alléger la liste et ne retenir que 5 livres. Exercice hautement difficile et frustrant et rondement mené par le président du jury, Erik Orsenna. Evidemment, je ne vous dévoilerai rien, puisque cette liste ne sera publique que le 15 mai. Ni la torture, ni la corruption, ni la séduction, rien ne me fera faiblir.
Important à savoir : si vous voulez voter, vous pouvez vous inscrire gratuitement sur le site du prix Orange, jusqu'au 7 juin. D'ici là, bonnes lectures.

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La patience des buffles sous la pluie

Publié le par Yv

La patience des buffles sous la pluie, David Thomas, Ed. Bernard Pascuito, 2009
Recueil de textes, parfois assez longs pour s'apparenter à des nouvelles, d'autres fois, une simple demi-page. Tous écris à la première personne, mais le narrateur n'est pas toujours  -ou même jamais- le même. Ils parlent d'amour, de trahisons, de colères, de désamours, de rencontres, de séparations, de solitude, ... Ils sont tour à tour drôles, émouvants, tendres, colériques, nostalgiques, mélancoliques, ...
Le style de David Thomas s'adapte évidemment aux situations : parfois une écriture oralisée, parfois une écriture qui élude les négations et les articles, d'autres fois, un style classique.
En résumé : inclassable. Et c'est tant mieux ! Alors, certes, tous les textes ne sont pas de même valeur, mais aucun n'est mauvais et beaucoup sont très bons. Alors, un bon livre comme cela, on ne peut pas passer à côté.

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Journal intime d'un marchand de canons

Publié le par Yv

Journal intime d'un marchand de canons, Philippe Vasset, Fayard, 2009
Pour le résumé, tout est dans le titre. Pour la forme, on hésite entre roman, récit ou témoignage. Le marchand d'armes est fictif, mais les pays et les protagonistes, eux, sont bien réels ; ce qui fait de ce livre un livre à part ; car c'est bien d'un roman qu'il s'agit.
Il est bien documenté et bien écrit. La froideur et le détachement du narrateur fait un peu peur. Il vend des armes comme il vendrait des cuisines ou des voitures, sans aucun état d'âmes. Seuls les clients changent. Ceux qu'il fréquente sont dangereux et parfois -même souvent- infréquentables (Pinochet, Saddam Hussein, Kadhafi, ...). Philippe Vasset montre comment les différents pays producteurs d'armes se livrent une véritable guerre commerciale sans merci pour vendre leurs produits, au mépris des embargos. Le lobby des fabricants et des vendeurs d'armes est aussi très présent dans le livre.
En fil rouge, la vie de cet homme qui se raconte à travers sa vie professionnelle. Au passage, quelques explications sur la libération des infirmières bulgares par Cécilia Sarkozy,  sur le retour en grâce et en "persona grata" de Kadhafi et sur le conflit Russo-géorgien concernant l'Ossétie du sud.
Riche, intéressant et instructif, en plus d'être original dans la forme.

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A contretemps

Publié le par Yv

A contretemps, Jean-Philippe Blondel, Robert Laffont, 2009
Le narrateur, jeune homme avide de lectures, s'installe à Paris pour poursuivre des études de lettres et accessoirement pour échapper à l'emprise de sa mère. Il sous-loue une chambre chez un homme souvent absent et taciturne le reste du temps. Une suite de hasards (?) font découvrir au jeune homme, chez une amie libraire, un livre écrit 30 ans plus tôt et oublié : A contretemps. L'auteur n'est autre que son logeur qui veut oublier cette période de sa vie.
Après une entrée en matière un peu longue, le livre enfin décolle. Certes, la ficelle -les hasards successifs- est un peu grosse, mais elle permet une présentation sans concession du milieu littéraire des années 70/80 -est-il réellement différent de nos jours ?- et une réflexion intéressante sur la production les doutes et les interrogations d'un écrivain : si tout est mis dans le premier roman, comment en écrire un second ?
C'est aussi le livre du passage à l'âge adulte pour ce jeune narrateur, confronté aux adultes, à leurs faiblesses, leurs peurs.
Roman plutôt pas mal, malgré quelques longueurs, qui vaut qu'on dépasse les 40 ou 50 premières pages un peu ennuyeuses. Le meilleur est après.

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Fake

Publié le par Yv

Fake, Giulio Minghini, Ed. Allia, 2009
Au début du livre, le narrateur, un Italien exilé à Paris, à la suite d'une rupture amoureuse, s'inscrit sur un site de rencontres. La suite est une accumulation de rendez-vous ou d'échecs avec des femmes, une sorte d'inventaire de son année amoureuse -ou plutôt sexuelle. Giulio Minghini évoque -ou dénonce- le pseudo-intellectualisme des bobos parisiens, le milieu artistique de la capitale, et bien sûr les sites de rencontres. Je ne lui reproche pas ses propos, mais d'utiliser, pour les tenir, les ficelles qu'il dénonce : un savoir sûrement étendu, mais méprisant vis-à-vis des moins cultivés que lui. Tout au long du livre, on a le droit à des citations obscures, absconses et des commentaires pédants. Livre qui vous l'avez compris ne m'a  pas plu, que j'ai même trouvé assez détestable.

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Lune captive dans un oeil mort

Publié le par Yv

Lune captive dans un œil mort, Pascal Garnier, Zulma, 2009
Les Conviviales, résidence où la protection et la sécurité sont garanties, accueillent Martial et Odette, Maxime et Marlène, deux couples, et Léa, femme seule, tous seniors. Le gardien est M. Flesh et l'animatrice du club-house, Nadine. Dans cette sorte de huis-clos, la vie s'organise tant bien que mal. Ces seniors ne sont pas exempts de petites lâchetés. Ils croient tout ce qui est dit à la télé : insécurité, violences, jeunesse en perdition, ... Certains sont racistes, homophobes. Ni moins, ni plus que les autres. Ce sont des gens normaux tels qu'aime les écrire Pascal Garnier, avec leurs faiblesses, leurs blessures et leurs limites. Comme à son habitude, Pascal Garnier met en place personnages et lieux, gentiment, jusqu'au moment du clash, ici jusqu'à cette fameuse lune captive dans un œil mort -quel titre formidable !.
J'aime bien les romans de P. Garnier. J'ai bien aimé celui-ci encore, mais j'y ai trouvé quelques longueurs. On se demande parfois dans quelle direction l'auteur veut nous emmener et où lui-même veut aller. Mais je pense aussi que ces questionnements amènent une surprise plus grande quant au dénouement. Pas le meilleur Garnier selon moi, mais tout à fait honorable. Et puis, un auteur qui met en exergue une phrase d'Alain Bashung et Jean Fauque ("Une poussière dans l’œil et le monde entier soudain se trouble") mérite forcément qu'on s'arrête un moment sur son livre. Parole d'amateur de Bashung !

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