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Autobiographie d'une courgette

Publié le par Yv

Autobiographie d'une courgette, Gilles Paris, Flammarion, 2013 (Plon, 2002)

Courgette est un garçonnet de 9 ans qui, accidentellement tue sa maman alcoolique et absente qui passait son temps à boire devant la télévision. Le papa de Courgette étant parti avec une "poule", il se retrouve donc en foyer. Il fera connaissance avec d'autres enfants de son âge, y apprendra l'amitié, l'amour et tout ce qui fait le quotidien d'enfants de cet âge.

Le livre de Gilles Paris précédemment édité chez Plon est revu et corrigé pour la collection Étonnantiss!mes chez Flammarion. Cette collection s'adresse à des adolescents et présente des livres très différents écrits par Octave Mirbeau, Émile Zola, Michel Quint ou Gilles Paris, ... (leur site ici). Petit prix (4.90€), préface présentant l'oeuvre dans son époque, dans la société, parlant de ses spécificités, ici, par exemple de l'écriture de l'auteur qui fait parler un enfant, ou encore des foyers pour enfants, postface avec quizz et jeux pour savoir si le livre a été bien compris (j'ai été très tenté, mais je me suis retenu, laissant ses amusements aux jeunes de la maison. Pff, c'est dur d'être adulte !) et entretien avec l'auteur, et des notes bas de pages en cours de lecture pour expliquer des notions, des mots difficiles.

Belle idée donc pour un livre, qui lorsque je l'ai lu m'avait paru sympa et plaisant (voir mon billet de l'époque, très court, je débutais dans le blog). Après une relecture très rapide et une replongée dans le monde de Courgette, je m'aperçois qu'il me reste beaucoup de cette histoire en mémoire. Si vous avez aimé le dernier roman de Gilles Paris, Au pays des kangourous, vous aimerez aussi celle-ci. Différente bien sûr, mais avec des points communs : narrateurs-enfants qui se confrontent au monde des adultes, trop tôt, écriture simple et agréable et mine de rien, des sujets aussi douloureux que l'abandon, la mort, l'amour, l'amitié abordés. Pas de réponses universelles, mais en existe-t-il ? Mais des questionnements qui eux le sont sans doute, universels !

Je ne saurai trop vous conseiller également la lecture de la postface dans laquelle G. Paris explique son travail d'avant écriture, ses visites dans les foyers, dans une école. Il dit par exemple : "Le foyer n'était pas leur maison, les éducateurs n'étaient pas leurs parents. J'ai aussi compris que ces enfants n'étaient pas différents des autres. Qu'il rêvaient de se fondre dans la masse. Leurs jeux, leurs pensées étaient ceux de tous les enfants." (p.278) Alors là, je dis bravo Gilles. Je suis assistant familial et donc mon travail consiste à m'occuper des enfants que j'accueille chez moi (pour ceux qui ne connaissent pas, nous sommes famille d'accueil) ; je vois donc les enfants évoluer au fur et à mesure de leur placement à la maison. Ma plus grande joie est de les voir accueillis là où nous allons comme les autres. Se fondre dans la masse est l'exacte expression qui convient (petite précision, la masse, ce n'est pas moi, je suis un garçon élégant). C'est le plus grand bien qu'on puisse leur faire. Comme d'ailleurs à toute personne quelle que soit sa spécificité ou sa différence. Tolérance et accueil. 

Un roman qui me parle donc directement et que je conseille à tous pour passer un bon moment, intelligemment.

Merci Gilles.

beaucoup d'avis sur Babelio.

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La vérité pour héritage

Publié le par Yv

La vérité pour héritage, Guillemette de la Borie, Presses de la cité, 2013

Appelés par leur belle-mère pour faire le point sur la situation de leur père, quatre enfants devenus adultes se retrouvent dans la maison familiale du Périgord. Chacun vient, de Bordeaux, de Paris, de Rome ou de Goa en Inde. Les liens familiaux se sont distendus et les retrouvailles ne sont pas vraiment chaleureuses, empreintes des vieilles rancœurs et jalousies et des secrets enfouis bien au fond des placards de Pont Faye, la maison de la famille Albrussac.

Franchement, à m'arrêter au simple titre du bouquin, je ne l'aurais jamais lu. Et c’eut été un tort ! C'est un roman familial avec tous les non-dits habituels, les cadavres dans les placards et autres secrets détenus par bribes par certains. Mais c'est surtout un roman qui met en scène les relations humaines. "De l'humain, beaucoup d'humain" écrit Guillemette de la Borie dans sa dédicace à moi écrite (merci) et je rajouterai : "et toujours de l'humain". La tension entre les frères et sœur, les beaux-frères, les belles-sœurs est palpable dès les premières lignes et ne se dénouera pas avant les dernières lignes. Guillemette de la Borie ne crée pas des personnages caricaturaux, ils ont tous leurs qualités et leurs défauts, leurs bons et mauvais côtés, leurs parts d'ombres. Grégoire, l'aîné sent bien que son mariage bat de l'aile, il consacre tout son temps pour tenter de maintenir sa petite entreprise à flot ; il se sent aussi des droits sur Pont Faye et se voit bien le prochain patriarche ; il est imbu, rigide, bourgeois, et finalement fragile et tellement peu sûr de lui. Aude, la sœur, la seule vivante des jumelles (Marie-Liesse est morte une vingtaine d'années auparavant) vit en Italie, elle est mariée, mère de deux adolescentes et élève également la fille de Marie-Liesse. Pas bien dans sa peau, malgré l'image qu'elle veut donner d'une femme épanouie, riche. En attente d'un contrôle médical, elle pense être atteinte d'un cancer du sein (l'est-elle réellement, ah, ah suspense... ?). Yrieix, le saltimbanque de la famille ; père d'Agathe, 15 ans qui va venir au domaine pendant ce week-end ; séparé de sa femme, il drague à peu près tout ce qui bouge ; photographe, il gagne de l'argent, le dépense, vit en bohème, n'a jamais vraiment réussi sa vie privée ou professionnelle. Cyril, le benjamin a quitté la maison très jeune, a travaillé dur dans la cuisine, le service et s'est construit en Inde une entreprise de tourisme florissante qui le met à l'abri financièrement ; il revient au domaine après 25 ans avec Danhya, sa jeune femme indienne.

"Yrieix se venge en les regardant, pendant qu'il les rejoint. Et il sait regarder. Il voit le brouillage des traits, les griffures des rides, les cheveux trop éclaircis de son élégante sœur. Aude ne doit pas être si heureuse qu'elle le prétend, avec une telle mine de papier mâché. [...] Il voit le dos voûté et le ventre en avant de Grégoire, sa femme ne le surveille pas encore assez !" (p.55)

C'est un roman bien construit qui alterne les points de vue. Chaque chapitre a pour titre le prénom d'un des protagonistes et le temps de ces lignes, on voit les lieux et les autres par ses yeux. Procédé intéressant pour se faire une idée complète de chacun, ce qu'il pense de lui et ce que les autres voient de lui. "Grégoire aime ses frères mais à distance, et en silence ; leur présence le dérange [...]. Trop de silence écoulé entre eux ; et cet air qu'ils se donnent maintenant, les "petits", de tout savoir et de vouloir décider de tout... C'est son privilège à lui..." (p.157)

Ajoutez à ces relations déjà pas simples, un grand domaine mal entretenu, un nom qui dans la région est synonyme de grande famille, respectable, descendante de maîtres de forge, de l'argent, des secrets et vous avez là un canevas parfait pour écrire un bon bouquin. Bon, après il faut un peu de talent pour mettre en mots, pour intéresser le lecteur, ne pas le perdre en cours de route. Tout cela fait manifestement partie de la panoplie de Guillemette de la Borie puisque je n'ai jamais décroché et que j'ai pris un évident plaisir à suivre la famille Albrussac dans ses tourments et ses questionnements.

Guillmette de la Borie à un site : ici.

 

région

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Le dernier des treize

Publié le par Yv

Le dernier des treize, Mercedes Deambrosis, Éd. La branche, 2013

Ils sont treize. Treize copains qui, une nuit de leurs quinze ans décident de payer un tueur à gages pour les éliminer le jour où ils trahiraient leurs idéaux. Lorsque le premier d'eux décède, 30 ans plus tard, on peut croire à une maladie. Mais treize jours plus tard, un deuxième meurt. Alcoolémie aggravée ou meurtre ? Suit un troisième, treize jours plus tard et là, le doute s'installe chez les survivants. C'est alors que Louis-Edouard Dudeuil, fils de préfet, inspecteur prend l'affaire en charge.

Treizième numéro de cette collection Vendredi 13, et un seul échec pour moi (ici). Ce dernier m'a à la fois épaté et déconcerté. Épaté par les personnages que l'auteure décrit, par les situations. Les treize amis sont très différents les uns des autres : ils travaillent tous dans la même société de surveillance de sites sensibles. Il y a l'alcoolique avéré, le dragueur, la flipée, la charmeuse, l'obèse, l'homo, ... Tous sont nommés, sauf le narrateur à la première personne, l'un des treize dont on ne connaît ni le nom ni le prénom et dont on se doute qu'il est le dernier des treize. L'autre narrateur (à la troisième personne) est le flic, et disons-le le personnage le plus intéressant du bouquin. Fils de préfet de région, promis donc à un bel avenir, il se fait une gloire et une joie de n'avoir aucune ambition, de n'être qu'"inspecteur" alors qu'avec l'ancienneté et ses appuis familiaux, il pourrait être au moins commissaire. C'est un dandy, raffiné, extrêmement élégant, très atypique dans le monde des flics.

Ce qui me déconcerte, c'est d'abord l'arrivée simultanée des treize personnages, on ne sait plus qui est qui, mais on se repère assez vite, finalement. Non, le plus déroutant c'est l'écriture de Mercedes Deambrosis. Elle utilise régulièrement les pronoms "elle" et "il", jusque là, rien que de très normal, mais ces pronoms ne concernent pas le personnage cité juste avant dans la phrase, mais celui cité un peu plus loin. Ce qui fait que très souvent, je me suis posé la question de savoir qui avait fait quoi. Ce qui, dans un polar est problématique, car ne pas être sûr du coupable de certains actes posent un problème de compréhension évident. Et la fin est identique. J'avoue ne pas avoir saisi toutes les subtilités du dénouement : ni le ou les vrai(s) coupable(s) et encore moins les motivations d'icelui, d'icelle ou d'iceux (ça c'est pour ne laisser aucun indice dans mon billet). Je reste donc sur ma faim et sur une relative déception.

Déception relative donc parce que dans le développement de son histoire et de son intrigue, l'auteure nous gratifie de passages très justes, drôles, enlevés ou plus critiques voire cyniques :

"- Ah, les quatre morts... Elle demeura songeuse, se déplia et très rapidement revint avec une calculette. [...] L'incidence sur la masse salariale est intéressante, certes, mais guère significative. Nous sommes loin, très loin du ratio que nous pouvions escompter... Elle rougit. Je veux dire que la Direction escomptait." (p.151)

L'entreprise qui mise sur ces morts inattendues pour renouveler son personnel qui lui coûte par des jeunes moins chers n'en sort pas grandie, ni la presse ou la politique en général :

"Le crime en série [...] était le summum pour le journaleux dans l'ère  du tout-sécuritaire. Après le nettoyage des banlieues, devenu une véritable guerre urbaine, l'expulsion des sans-papiers, qui hélas continuait à provoquer bien des remous et atermoiements, l'Intérieur projetait de s'attaquer à d'autres îlots de nuisance, les Roms, peut-être." (p.165)

Pour résumer : un début confus, une fin qui ne l'est pas moins et un milieu très bon. Pas banal ! Moi qui trouve souvent un ventre mou dans les livres, je n'en ai pas trouvé ici, c'est plutôt la tête et la queue, si je puis m'exprimer ainsi  ("elle est où la têtête et elle est où la queuequeue ?", désolé, on a les références qu'on peut, mais j'assume et même les revendique) qui pêchent un peu.

Babelio recense quelques critiques.

 

thrillers

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Jours heureux à Flins

Publié le par Yv

Jours heureux à Flins, Richard Gangloff, Albin Michel, 2013

Flins, l'usine Renault en mai 68. Sortent des chaînes des R8 et des R16. Le travail est dur, mais certains ont trouvé la combine pour bosser moins. Le trafic en tout genre est quotidien et quasiment un travail à plein temps pour ceux qui s'y adonnent. Dans cette usine, une petite bande, joyeuse et débrouillarde enchaîne les coups, les blagues, les défis. Jusqu'au jour où un gros coup est commis, le vol de la paye des ouvriers. Qui est coupable ? la police avec à sa tête l'inspecteur Romanowski entre alors dans les lieux. Dans le même temps, éclate le Mai 68 des étudiants.

Je suis un peu partagé sur ce livre qui est une chronique drôle et enlevée sur des années encore insouciantes. Le chômage n'existait pas, les consommateurs consommaient, la croissance croissait et les étudiants étudiaient encore pour quelques semaines avant leur révolte. A l'usine de Flins, les travailleurs travaillent, mais certains moins que d'autres ; les trafics décrits par Richard Gangloff sont divers et très variés. Totalement incroyables et inimaginable de nos jours. Mais ces deux époques séparées de 45 ans ne sont comparables. La Régie embauchait et les parents voyaient d'un bon œil y entrer leurs enfants : "Le père, il connaît tous les avantages de la Régie, "Quand t'es dedans, tu y restes, et si t'es pas con, tu en vis bien", et c'est vrai, beaucoup viennent de loin pour en profiter. Pour travailler à la Régie, tous les jours ils font la route en car ou en bagnole. Les salaires sont bons, mieux qu'ailleurs c'est sûr. En plus, si tu veux progresser, tu peux, tu suis les formations internes, tu gagnes tes "chèques Tintin" comme ils disent entre eux et tu grimpes, c'est simple et toujours gagnant." (p.17). Quand je vous disais que l'époque avait changé !

Les personnages de R. Gangloff sont pittoresques, ont de fortes personnalités, sont attachants et ne se prennent pas trop au sérieux. L'ensemble du bouquin est à l'avenant, ce qui est une bonne nouvelle en ces temps moroses. Quand j'écris plus haut que je suis partagé, c'est que passés ces bons moments, il y en a de plus longs, moins intéressants qui me font me poser la question de l'utilité d'un tel livre. Je passe vite certains paragraphes sans que cela ne nuise ni à ma bonne compréhension de l'histoire (ou alors, je suis doté de très grandes qualités et je comprends tout très vite ; c'est d'ailleurs sûrement cela, suis-je bête ? Ben, non, je le suis pas, je viens de dire le contraire !)

Malgré mes doutes, je reste sur l'impression d'un livre plaisant qui fait passer de bons moments. Richard Gangloff se perd parfois dans des considérations oiseuses, mais dans ses pages, se cachent des passages formidables, de vrais petits bijoux (choux, cailloux, hiboux, ... désolé, c'est l'habitude, je suis en plein dedans avec un des enfants qui me récite quotidiennement le pluriel des mots en "ou" en ce moment), comme par exemple ce portrait :

"Le tonton Claude, friqué et puant, se pointe avec dix ans de plus, dix ans qui comptent double, parce que Rungis ça fatigue. Surtout quand, à la caisse, t'as ta moitié qui compte double aussi et qui te maintient au boulot pour que tu crèves avec ton commerce en gros et en or. Sans héritier, parce que les enfants, quand on tient un commerce, c'est pas bon et ça détend le ventre... C'est vrai qu'il est bien tendu le ventre de la bourgeoise, elle est tellement gonflée du bas que t'as l'impression qu'elle a gardé sa caisse sous sa robe. [...] Avec la tête qu'il a, Claude, c'est pour dans peu son buffet froid, on va bientôt se retrouver derrière lui dans une allée bordée de granits calibrés." (p.155) Là, j'abrège, parce qu'il y a deux excellentes pages sur le tonton Claude et sa bourgeoise.

Rien que pour ces pages et d'autres qui valent le détour, je suis heureux (mais pas à Flins) d'avoir lu ce roman qui, pour un premier est prometteur.

Véronique la Pyrénéenne a aimé ce livre.

Merci Laure

 

région

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Histoire du chat et de la souris qui devinrent amis

Publié le par Yv

Histoire du chat et de la souris qui devinrent amis, Luis Sepulveda, Joëlle Jolivet (dessins), Métailié, 2013 (traduit par Bertille Hausberg)

Mix est le chat de Max ou Max l'humain de Mix, tel est le début du livre. Max et Mix sont inséparables et lorsque Max grandit et part dans son appartement, Mix le suit. Ils vivent ensemble, étudient ou prennent l'air sur le toit. Mix vieillit et devient aveugle. Mex, petite souris mexicaine volubile entre dans leur vie.

Luis Sepulveda construit son histoire sur l'amitié qui lie les êtres aussi différents soient-ils. D'abord Max et Mix. Puis, Mix et Mex, et enfin, Mix, Max et Mex. C'est une jolie histoire à raconter aux enfants qui reprend des thèmes universels maintes fois utilisés et qui font le contenu de nombre de livres pour la jeunesse. Encore faut-il que cela soit bien raconté. C'est largement le cas avec celui-ci. Thèmes vus et revus mais qu'il est bon de rabâcher -surtout d'une aussi jolie manière- lorsque je vois ou que j'entends comment certains petits et grands accueillent et traitent les gens différents. Le communautarisme et le repli sur soi montent. La différence est vue par certains comme une faiblesse alors qu'au contraire, elle devrait être une force. Voilà pour ma parenthèse sérieuse avant de revenir au livre. De l'humour en prime avec Mex qui est intarissable et que j'imagine bien parler très vite d'une toute petite voix.

Très belles illustrations, simples, qui collent au texte, exactement dans le ton de la couverture du bouquin.

Luis Sepulveda aime les chats, il avait mon estime bien avant cela, il y monte encore d'un cran. J'aime aussi les chats. La première chez qui j'ai habité a vécu 18 ans. Asociale, tricolore, d'un caractère pas très facile, elle était adorable avec moi seul, venait le soir se reposer sur ma poitrine lorsque j'étais en position semi-allongée pour lire. Le second a vécu 18 mois, écrasé par une voiture, le souci premier des chats de ville. Roux, gentil comme tout, trouvé dans un buisson chez une amie, nous l'avions prénommé Funky. Celle qui actuellement est allongée sur un coussin, sous le radiateur se prénomme Eden. Elle dort et elle ronfle ! Nous l'avons recueillie il y a une année, chatte obèse de 9 kilos à l'époque, elle en a perdu 2.5 mais reste assez impressionnante. Petite spécificité qui plairait à Luis Sepulveda, Eden parle. Elle miaule quasiment sans arrêt, nous répond -l'effrontée. Elle aussi a ses têtes : quand ma fille rentre dans la maison, elle va l'accueillir ; nada pour les autres.

Bon voilà pour mes histoires de chat. Tout cela pour coller au sujet du livre que je manquerai pas de faire circuler dans les petites mains de la maisonnée. 

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Le manuel du serial killer

Publié le par Yv

Le manuel du serial killer, Frédéric Mars, Éd. Hachette, 2013

Thomas Harris est un jeune homme, étudiant à Harvard, bénéficiant d'une bourse pour étudier, car très bon élève, mais orphelin depuis le jour de ses dix ans : ses parents se sont noyés lors d'une balade en barque. Une série de meurtres d'enfants qui convulsent, perdent leur sang se produit à Boston, comme dix ans auparavant. Thomas, étudiant renfermé et notoirement amateur de romans policiers, est amené à s'y intéresser par la directrice de la section littérature, qui le lui conseille pour valider sa thèse. Un binôme est créé avec une étudiante, qui étrangement porte le même nom de famille que lui, Sophie Harris.

Je veux rester très léger dans mon résumé, ne dévoiler aucun des rebondissements du livre, et des rebondissements, il y en a légion. Plus que dans deux ou trois thrillers réunis parfois. Jusqu'à quasiment l'ultime ligne. Un roman qui commence très fort par l'agonie d'une première petite victime, pas détaillée, donc très supportable (dans un roman uniquement bien sûr) ; l'hémoglobine n'est d'ailleurs pas le fond de commerce de ce livre ; Frédéric Mars suggère, décrit mais laisse l'imagination du lecteur faire son oeuvre. C'est très bien, drôlement bien mené et maîtrisé et si l'on sent au cours de l'histoire que certains détails ne collent pas ou si même on peut se sentir un peu perdu (ce qui a été mon cas assez régulièrement), c'est pour mieux servir le dénouement et l'explication finale. Les personnages sont assez complexes pour tenir la route jusqu'au bout, Thomas est un jeune homme coincé, phobique : "Je ne pratique mes incursions hors de Cabot, jusqu'au réfectoire de l'autre côté de la grande pelouse du Quad, qu'aux heures les plus creuses. Je vais jusqu'à utiliser mes jumelles pour scruter le réfectoire illuminé et dénombrer les étudiants qui s'y restaurent. A plus de dix occupants, je renonce. A moins, je m'y aventure, non sans d'infinies précautions." (p.100). Tous les autres, les seconds rôles peuvent à tout moment être des "amis" de Thomas ou des suspects, à chacun leur tour.

Voilà pour tout le bien que je pense de ce bouquin, mais je dois dire que si je l'ai trouvé très bon, je l'ai aussi trouvé long et bavard. Les à-côtés, les débuts de chapitre ralentissent le rythme et ne sont pas particulièrement indispensables au bon déroulement de l'histoire. Ils peuvent avoir plusieurs fonctions :

- grossir le bouquin (462 pages) ? Inutile à mes yeux, un thriller ne peut avoir que 300 pages et ne pas lésiner sur la qualité.

- faire des effets de style ? Le thriller n'est pas le genre le plus littéraire qui soit (d'ailleurs F. Mars le dit lui-même dans son roman), et l'auteur à l'écriture agréable, fluide ne fait pas montre ici d'un style qui ferait passer ses apartés pour des petits bijoux littéraires inévitables.

J'avoue donc ici avoir lu pas mal de pages en diagonale pour ne pas rater l'intrigue, mais pour ne pas m'appesantir sur des considérations moins captivantes.

L'expérience néanmoins reste positive car F. Mars sait jouer avec nos nerfs, avec nos pensées. Il les dirige puis les emmène vers d'autres pistes pour les embarquer encore totalement ailleurs. Du grand thriller -un peu trop délayé pour moi-, qui ne se lâche pas tant qu'on a pas la fin mot de l'histoire.

On en parle sur Babelio,

Merci Inès et Gilles Paris

 

thrillers

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L'homme qui frappait les femmes

Publié le par Yv

L'homme qui frappait les femmes, Aymeric Patricot, Éd. Léo Scheer, 2013

Le narrateur est un homme important, président d'une association de lutte contre les violences faites aux femmes. Il tâte aussi de la politique et hante les couloirs de l'Assemblée Nationale. Son côté obscur et insoutenable est empli de ses accès de violence, de ses pulsions : il frappe les femmes. Il a commencé dès le collège et s'est enfin senti vivre. Dès lors, il tente de retrouver ce sentiment de puissance à travers ses passages à l'acte.

Ce roman n'est pas simple à aborder puisque l'auteur se met à la place d'un homme violent. Un homme dominé par ses pulsions qui ne peut y résister au point parfois de se mettre en danger, lui et sa réputation. Dans sa postface intitulée l'Insoutenable, Aymeric Patricot explique son angle de vue : "Ce qui m'a tenu, dans l'écriture de ce texte -et de quelques précédents-, c'était l'envie de saisir l'instant même du traumatisme, l'instant où le monde vous dépasse, vous écrase, outrepasse les capacités de votre esprit. Folie pure où les lignes de force sont bouleversées, où le monde quitte son visage habituel, ou vous perdez tout moyen d'appréhender ce qui vous arrive." (p.160) Il n'est d'ailleurs pas inintéressant de lire cette postface pour mieux comprendre les raisons qui poussent un écrivain à se mettre dans la tête d'un homme violent.

Dans le roman, A. Patricot démarre à l'adolescence du narrateur, lorsqu'il se sent invisible, ni beau ni laid et que la première gifle donnée à une fille lui donne confiance et pense-t-il une certaine aura, sans doute de lui seul visible. Puis, sa vie avance, ses coups augmentent auprès de femmes connues ou inconnues, rencontrées parfois au cours de soirées. Il se marie et vit une vie de couple paisible, sans encore frapper Clarisse sa femme, car aucun point de sa personnalité ne lui est encore insupportable : "J'éprouvais cependant de grandes lassitudes. Il y avait quelque chose de lisse et de monotone dans la succession des semaines, et même d'insupportable : ce n'était donc que ça, le bonheur ? Certains jours, l'excitation de mes dérapages me paraissait désirable. Je l'imaginais se répandre sur ma vie. Mais il fallait tenir, car il était impensable de me livrer en pleine lumière à mon penchant." (p.41)

La violence ira crescendo et cet homme se livre en toute sincérité. Une sorte de confession totalement incroyable lorsqu'il parle de sa souffrance et qu'il implique sa femme qui, le temps avançant, n'échappera pas aux coups, dans ses accès de colère : "Je me suis alors enfermé avec ma femme, et ma fureur a fini de s'en donner à cœur joie. J'espérais que mon fils oublie tout ce qu'il avait vu. Nous devions nous-mêmes être suffisamment forts pour surmonter ces cauchemars, et c'était un cri qui perçait en moi, sans auteur ni destinataire, un cri terriblement puissant que personne n'entendait mais qui me blessait, infiniment." (p.67) Il écrit aussi comment ses crises ont été pour lui l'espoir d'être enfin reconnu comme quelqu'un, par ses parents, les femmes mais il se rend compte qu'elles ne lui apportent rien quant au regard des autres : "[ses] accès de violence [lui] ont semblé plus désespérants qu'à l'ordinaire... Ils ne [lui] servaient donc à rien." (p.93)

Roman court et très bien écrit, maîtrisé, qui ne déborde jamais sur  des scènes insoutenables, dures, certes, mais elles servent l'angle de vue de l'auteur. Un roman pas du tout reposant sur un sujet oh combien délicat, important (pour rappel environ 120/130 femmes meurent chaque année sous les coups de leurs maris ou conjoints). Il est toujours insupportable d'entendre, tous les ans, que des femmes sont agressées physiquement ou psychiquement par leurs conjoints, il n'est pas forcément inutile de lire ce roman qui à sa juste place tente d'apporter un éclairage sur les raisons de cette violence. Ce n'est pas un rapport psychiatrique, juste des questions posées.

Merci Inès et Gilles Paris

PS : il peut être bon de préciser que ce n'est évidemment pas une thèse qui tendrait à défendre les hommes bourreaux. C'est juste tenter de dire pourquoi, avec la violence que chacun de nous a en lui, certains passent à l'acte et d'autres non.

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Rêves d'hiver au petit matin

Publié le par Yv

Rêves d'hiver au petit matin, Collectif, Éd. Elyzad, 2012

Sous-titré Les printemps arabes vus par 50 écrivains et dessinateurs, ce livre est un recueil de textes et de dessins d'auteurs de différentes origines qui sont partis des deux mots "printemps arabes". Chacun était libre ensuite d'écrire ou dessiner ce qu'il voulait, la seule contrainte étant liée au format : 30 lignes maximum. Au départ était, début 2012, une série de manifestations et de débats artistiques autour de ce thème au Théâtre le TARMAC à Paris. Ce livre permet d'en élargir le public.

Étant donné le nombre et la variété des intervenants, le recueil est très divers. Ça commence par un dessin de Plantu, drôle, mais pas que, comme d'habitude chez le dessinateur. Et puis, arrive un texte plutôt humoristique au départ : "Comment réussir de nos jours une bonne révolution ? D'abord, se procurer un dictateur. Contrairement aux idées reçus, c'est un ingrédient assez facile à trouver au Nord comme au Sud. Attention, il circule actuellement sur le marché quelques vieux dictateurs en mal de trône." (p.12, Gustave Akakpo), dont la teneur générale n'est évidemment pas comique. Si l'optimisme et l'enthousiasme envers ces révolutions arabes sont nets : "Rien ne pourra effacer 2011. Ni les vertueux, ni ceux, et ils sont nombreux, qui veulent gâcher la fête. Cette année restera, vaille que vaille, celle où des hommes et des femmes n'ont plus eu peur et ont commencé à pousser vers la porte un ramassis de bandits et d'escrocs qui les avaient longtemps brutalisés." (p.17, Kebir Ammi), les auteurs s'attachent en majorité à la suite, qui ne semble pas forcément si bien partie que cela, mais aussi à dénoncer ce qui était en Tunisie, Égypte ou Libye et qui est encore dans d'autres pays, Syrie en particulier : "Admirative devant le courage des peuples qui occupent les rues, mais triste de penser que les rues et les places ne sont en réalité que d'énormes échiquiers sur lesquels se jouent les vraies batailles des grandes puissances qui n'ont pour éternels objectifs que de s'enrichir toujours et encore." (p.51, Wahiba Khiari)

Certains sont assez virulents et directs en posant des questions précises, évidentes : "Printemps arabe, révolution de jasmin, qu'importe la formule qui dans sa vacuité n'apporte aucune réponse à la question que chacun se pose. Comment un mouvement qui a débuté sous les auspices de la technologie et de la convivialité du Web a fini en catastrophe salafiste ?" (p.34, Derri Berkani)

Certains auteurs, telle Jeanne Bénameur ou Hyam Yared entre autres, prennent le biais de la poésie pour s'exprimer, comme quoi la poésie est aussi très actuelle et peut coller à l'actualité. Pour finir, je me permets un extrait un peu long du texte qui m'a le plus touché, et ce n'est pas peu dire, parce qu'ils sont tous très forts :

"Vous avez pris nos corps et les avez flagellés. Vous avez pris nos mains et les avez entravées. Vous avez pris nos jambes et les avez ligotées. Vous avez pris nos bouches et les avez bâillonées. Vous avez pris nos cœurs et les avez essorés. Vous avez pris nos ventres pour y creuser des gouffres. Vous avez pris nos vies et joué de nos envies. Vous avez pris nos aspirations et les avez broyées. Vous avez pris notre air et l'avez pollué. Vous avez pris nos mots et les avez pervertis. Vous avez arraché notre verbe et soufflé la haine dans nos veines. Vous avez épouvanté les faibles et terrorisé les poètes." (p.24, Yahia Belaskri)

Et comme chaque fois, chez Elyzad, le livre est beau, d'excellente qualité, papier légèrement gaufré.

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Ça coince ! (13)

Publié le par Yv

Hypérion Victimaire, Patrick Chamoiseau, Éd. La branche, 2013

Un commandant de police prêt au départ à la retraite est tenue en joue par un tueur. Une nuit durant, ils se racontent l'un à l'autre.

Il fallait bien qu'un jour cela arrivât : je n'ai pas accroché à un roman de la collection Vendredi 13 ! Non pas que le thème ne me plût point. Non pas que cette confrontation ne m'attirât pas. Que nenni ! Non, en fait, j'ai eu du mal avec le style de Patrick Chamoiseau -et en fait, je me souviens que j'avais également eu beaucoup de mal avec son Texaco- : entre citations latines, et mots créoles, je ne comprends pas tout ce qu'Hypérion Victimaire raconte. Et puis, pour être franc, je m'emmerde un peu. Alors peut-être que lire dans le salon d'attente de l'aéroport puis dans l'avion n'est pas le meilleur endroit, surtout que moi, un deuxième voyage aéroporté -eh oui, j'ai fait mon premier vrai vol en mars 2013 si j'occulte un précédent vol de 45 minutes mouvementées lors de mon service militaire (beurk), dans un coucou à hélices d'une vingtaine de places, au dessus de la ville de Saint Dizier (re-beurk, que les Bragards me pardonnent, mais la base aérienne 113 n'est pas un bon souvenir de leur ville- m'angoisse un tantinet ? Qu'il eut fallu que je lusse bien confortablement dans mon canapé ? Oui, mais non (ce qui ne veut absolument rien dire). Je passe donc, mais vous trouverez de très bonnes chroniques positives sur Libfly et sur Babelio.

 

Le mur de mémoire, Anthony Doerr, Albin Michel, 2013 (traduit par Valérie Malfoy)

Recueil de 6 nouvelles dans lesquelles "les personnages [sont] tous hantés par la perte et la résurgence de leur passé, et confrontés à ce manque vertigineux de ce qui a été mais n'est plus." (4ème de couverture)

Le meilleur de moyen de savoir si un bouquin me plaît c'est l'envie ou l'agacement que j'ai d'abord de le poser pour faire autre chose que le lire et ensuite l'envie de le reprendre après un temps d'interruption pour vaquer à d'autres occupations, et oui, il y en a d'autres dans une maison même tenue par un homme ! Force m'est de constater que cette envie n'est pas présente pour ce recueil. J'ai lu ces nouvelles sans déplaisir mais sans vibrer. Pourtant, la plupart du temps les idées de départ sont bonnes et l'écriture sèche, directe, qui va droit au but a tout pour me plaire. C'est un style littéraire presque clinique notamment dans la nouvelle qui concerne Imogène et Herb qui tentent tout pour avoir un enfant. Leur parcours est sinueux et très difficile. Je le savais par des gens autour de nous étant passés par le même parcours, mais le voir écrit aussi directement ajoute le côté clinique et purement médical, plus aux États-Unis, le fric fou qu'il faut pour faire des procréations assistées ! 

De fait, ce livre n'a pas réellement "coincé" comme le suggère le titre de mon article puisque je l'ai lu, mais que ce fut long et pas vraiment un plaisir. Je le classe donc dans mes échecs toutefois à relativiser, puisqu'il a plutôt un bon accueil que vous pourrez constater de visu en allant sur Babelio ou sur Libfly.

Merci Laure.

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