Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

L'origine du crime

Publié le par Yv

L'origine du crime, Sébastien Lepetit, Flamant noir, 2016....

Le commissaire Bruno Morteau, pas insensible au charme d'une veuve récente -c'est lui qui a résolu le mystère de la mort de son mari- ne résiste pas à sa demande de fouiller un peu dans un dossier : la police vient de lui prendre un tableau, un Courbet, jugé volé voire faux, mais elle n'en croit pas un mot. Puis, un peintre que Morteau veut interroger meurt de manière rapide et étrange, et encore un autre cadavre apparaît... C'est un peu beaucoup pour une même affaire, Morteau assisté de Fabien Monceau, jeune lieutenant impétueux enquête.

La maison Flamant noir s'étoffe : après des polars humoristiques, du réalisme, du jazz, des thrillers, voici un polar doubiste pointilleux, qui explore toutes les pistes méticuleusement ; il pourrait être qualifié de drôle parfois, de réaliste parfois. Pour l'apprécier, il faut savoir prendre son temps ; le lieutenant Fabien Monceau qui ne sait pas le faire est plus d'une fois remis à sa place par Bruno Morteau. Si vous connaissez Besançon, Ornans, les plats et les vins régionaux, vous ne serez pas perdus parce que Morteau est un amateur de bonnes tables et de plats roboratifs accompagnés de savagnin et/ou de poulsard et ne dédaigne pas une bière entre les repas -enfin, une ou plusieurs. Si vous ne connaissez rien à cette région, ne vous inquiétez pas, ne fuyez pas, au contraire, vous aurez très envie d'aller la visiter, je parle d'expérience.

Morteau est alcoolique, divorcé, seul, son âge n'est pas dit, mais il a dépassé la cinquantaine, amoureux de sa région, rien ne pourra l'en faire sortir, il se plaît à nous la faire visiter. C'est un laborieux qui explore toutes les pistes, qui est donc lent et ne se base que sur les faits et jamais sur des hypothèses, des suppositions. Un acharné des faits qui recadre sans cesse son lieutenant qui lui, part tout de suite dans des déductions hâtives : "Morteau haussa les épaules et préféra ne pas polémiquer. Il aimait bien Monceau, mais cette façon de vouloir sauter directement aux conclusions sans prendre le temps de les étayer l'agaçait." (p.132) Ça tombe bien, moi non plus je n'aime pas les flics -dans les livres ou les séries- qui échafaudent tout de suite des hypothèses, c'est souvent tiré par les cheveux et lorsque la solution est au bout d'une de leurs idées, on voit la grosse ficelle. Donc Morteau est à mon goût, un mix de Maigret, Colombo, Wallander, le Doubs en plus, l'alcool itou ; il roule en 404 lorsqu'il ose conduire, est un peu négligé, mal rasé, mal sapé, ... Bon, j'avoue un petit -tout petit- agacement dans les répétitions des hypothèses de son second et des "remises en place" du commissaire, ça devient presque un peu "too much", mais passé cela, ce roman policier est très bien.

Après avoir parlé des personnages, parlons de l'intrigue. Titré L'origine du crime, sous-titré Deux enterrements à Ornans, il ne vous échappera pas que ce polar fait référence à Gustave Courbet, enfant du pays, qui a peint L'origine du monde et Un enterrement à Ornans, entre autres. Trafic de tableaux, faux ou volés ou les deux en même temps, tous en référence au peintre. Si vous ne connaissez que peu Courbet, eh bien, c'est comme pour le pays, vous ressortirez de ce polar un peu plus initiés. C'est quand même vachement bien ces romans qui, sous le prétexte de nous divertir avec un flic peu conventionnel et une intrigue policière, nous instruisent -ou vice-versa. En plus, dans celui-ci, vous n'avez la solution qu'en toute fin, bien difficile à découvrir avant que le commissaire Morteau ne l'énonce. Alors, pourquoi se priver ? Apprendre en se faisant plaisir et en se distrayant, il n'y a rien de mieux.

Voir les commentaires

Envoyée spéciale

Publié le par Yv

Envoyée spéciale, Jean Echenoz, Minuit, 2016.....

Constance est la future ex-femme de Lou Tausk, musicien qui vit -très bien- grâce à un succès interplanétaire et qui peine à créer de nouveau, l'angoisse de la portée blanche. Un jour, Constance est enlevée et emmenée dans une ferme au fin fond de la Creuse, gardée par Christian et Jean-Pierre. Contre toute attente, le trio s'entend bien et se plaît dans ce coin calme. Lou Tausk ne s'occupant pas de la rançon demandée, le séjour se prolonge. Il faut préciser que le commanditaire de ce rapt a des ambitions pour Constance, le kidnapping n'est qu'un premier acte d'un plan machiavélique dans lequel elle joue le premier rôle sans encore le savoir.

Ouvrir un livre de Jean Echenoz, c'est d'abord se confronter à un style littéraire absolument magnifique, et non, n'ayons pas peur du mot tout superlatif qu'il soit. La langue est belle, travaillée, évoque des images ; les phrases sont parfois longues, très ponctuées -peut-être un peu moins que dans ses ouvrages précédents-, nourrie de mots ou de tournures dont on n'use plus que peu, elle est totalement déphasée par rapport au commun des livres et objectivement, vraiment réjouissante. Je lis d'abord Jean Echenoz pour son écriture et je me plais souvent à découvrir ses histoires. Lorsqu'en plus, il joue la carte de l'humour, du décalage, alors je ne résiste plus et j'avale les 313 pages lentement pour en savourer chaque mot, chaque expression et faire durer le plaisir.

Cette fois-ci, l'auteur s'attaque au roman policier et/ou d'espionnage, certes pas toujours crédible ; non seulement il en est conscient mais en plus, il joue avec le lecteur de ce manque de plausibilité, c'est d'ailleurs l'un des ressorts comiques du livre. Les autres ressorts, ce sont les personnages, un peu abimés, cassés, banals au possible et donc peu fréquents dans des histoires d'espionnage international. Jean Echenoz sait aussi se faire croiser les "seconds rôles" sans qu'ils se sachent mêlés à la même histoire. Le suspense est maintenu par les attendues rencontres des "premiers rôles" entre eux et avec les seconds rôles, par des détails qui feront qu'ils sauront être dans le même bateau. La langue de l'auteur ajoute à l'humour une grosse dose d'élégance, de classe. Si l'on compare avec des humoristes on est plutôt dans du Devos -ou du Desproges, mais en moins méchant- que dans du Bigard. Mais Jean Echenoz n'est point humoriste, plutôt blagueur, farceur, aimant par dessus-tout jouer avec les mots, avec ses personnages et les situations dans lesquelles il les met, loufoques, dingues, doucement folles. Lisez par exemple sa description d'un couple qui paraît mal assorti : "Voici maintenant plus d'un mois que Clément Pognel partageait la vie de Marie-Odile Zwang et rien ne se passait comme on s'y serait attendu. L'un ayant pu nous paraître une épave aboulique, l'autre une implacable harpie, on ne pouvait guère envisager d'autre existence commune à ces deux-là que sur un mode SM élémentaire, quotidien scandé d'insultes et d'ecchymoses, œil au beurre noir et dents brisées, Royal Canin en plat unique suivi d'une pincée de Destop dans le café." (p.99) Tout est du même acabit, un vrai plaisir vous ai-je dit. Jean Echenoz nous embarque avec légèreté, adresse et raffinement dans ses histoires, interpellant plusieurs fois les lecteurs avec un "on" qui les englobe dans la narration. Je me suis par moment, senti narrateur -pas écrivain- juste le mec qui raconte l'histoire tout en n'en sachant guère plus que le lecteur, normal me direz-vous puisque je suis lecteur.

Un livre excellent, que je conseille à tous. Un coup de cœur.

Voir les commentaires

Bart is back

Publié le par Yv

Bart is back, Soledad Bravi, Denoël Graphic, 2016....

"En 2015 à Tampa, Floride, un chat enterré depuis cinq jours sort de la tombe à la stupeur de son propriétaire et à l'effroi de ses voisins. Les médias le surnomment aussitôt Zombie Cat. S'inspirant de ce fait divers réel, Soledad imagine, dans le droit fil des maîtres du New Yorker, une ode malicieuse à la vie et à la liberté." (éditeur)

De Soledad Bravi, je connaissais déjà La BD de Soledad, recueil de ses chroniques dans Elle. Sympa (je viens de relire mon article et je me demande bien ce que j'avais pris avant de l'écrire). Bart is Back n'est pas dans le même genre, il ne faut surtout pas se fier à la couverture du livre -pas celle qui est présentée en photo, c'est une jaquette, celle du dessous qui est d'un beau rose pastel avec un chat (en plusieurs poses) qui joue avec une pelote de laine. Car ce roman graphique est cruel, n'oubliez pas que Bart est un Zombie, il n'hésite donc pas à croquer la première personne qu'il croise et qui veut le caresser. Mais je rassure les âmes sensibles, d'abord c'est de l'humour, noir certes, mais de l'humour quand même et ensuite rien dans le dessin n'est choquant, car traité par l'humour itou. Le dessin justement est simple, du gris, du blanc et du noir, du rouge un peu pour le sang et quelques rares couleurs pour Bart lorsqu'il est Zombie Cat notamment.

Plutôt moderne, la BD, sous prétexte d'un fait divers assez drôle parle quand même de la liberté, du prix d'icelle, des sacrifices qu'il faut faire pour l'obtenir. Ce n'est évidemment pas un traité philosophique, mais ce n'est pas ce qu'on demande à Soledad Bravi et à Bart. Pour les amateurs de chats, sachez qu'on est assez loin du bon et beau matou de certains livres qui se prélasse sur le canapé, c'est une autre manière de parler de ces félins, de leur côté sauvage et indépendant. Pas sûr que ça plaise à ceux qui postent des vidéos de chatons tellement adooooooorables sur facebook ! Moi, perso, ça me plaît bien, ça me fait rire.

Voir les commentaires

Toutes ces choses à te dire

Publié le par Yv

Toutes ces choses à te dire, Frédérique Volot, Presses de la cité, 2016...,

2003, Ettore est couché sur un lit d'hôpital en France. Le vieil homme sait sa fin proche et veut absolument revoir sa petite fille, Ange qui habite Moscou, il a son histoire à lui laissé en héritage.

Gorizia, empire Austro-hongrois, 1916, Ettore, petit garçon né slave puis devenu italien, subit la guerre que mène l'Italie pour envahir ces territoires. 1930, Ettore quitte l'Italie fasciste pour la France, son violon sous le bras, son travail de tapissier lui laissant espérer du boulot dans son nouveau pays.

Même époque, Lucie qui a quitté un père alcoolique et violent est installée à Vittel, serveuse dans une pâtisserie. La rencontre des deux jeunes gens changera le cours de leurs vies.

A priori, ce genre de livres n'est pas mon truc. Mais j'ai bien aimé les romans policiers de Frédérique Volot (La Vierge-Folle, 59, passage Sainte-Anne), et comme elle a eu la gentillesse de m'écrire un mot rien qu'à moi sur mon exemplaire, je me suis penché dessus. Ce qui semble être un récit très personnel -même s'il est noté que c'est un roman-, puisqu'il est dédicacé "A Ettore/Hector, mon grand-père. A Lucie, ma grand-mère. A Pierina et Marthe, mes arrière-grands-mères" est finalement assez universel. Les personnages vivants sont très romanesques et même lorsque les vies semblent -malheureusement- plus banales comme celles de Marthe et Lucie, mère et fille frappées par un mari et père violent, Frédérique Volot sait les faire résonner au même titre que le parcours chaotique, difficile et mouvementé d'Ettore.

Je ne vais pas en faire des tonnes, certains aspects du genre ne me plaisent pas : la saga, les anecdotes familiales et villageoises, les très nombreux dialogues, mais le contexte que décrit l'auteure est très bien rendu et une découverte pour moi. Certains paragraphes résonnent fortement aujourd'hui, les situations sont semblables et les réactions, malheureusement aussi, lorsque Ettore arrive en France fuyant le fascisme : "Depuis peu, les conditions d'accueil avaient changé. La Ligue cherchait à limiter l'afflux de nouveaux arrivants, lançait même des avertissements aux allures de menaces à tous les étrangers tentés par l'installation en France. (...) De leur côté, les politiques expliquaient que la France n'était plus la terre d'asile rêvée, que le nombre de chômeurs y était déjà trop élevé, que l'on devait d'abord se préoccuper du sort des nationaux." (p.195). J'avoue ma grande inculture en ce qui concerne la guerre entre l'Italie et l'empire austro-hongrois et les exactions inhérentes aux conflits, je ne connaissais pas non plus l'existence du camp de Watten (dans le Nord) dans lequel étaient déportés les étrangers, essentiellement des Yougoslaves, des Italiens et des Russes, c'est donc une découverte, et m'instruire en lisant un roman, ça me plaît. Ettore a participé à la construction du blockaus d'Eperlecques dans des conditions terribles.

Si vous passez par la collection Terres de France des éditions Presses de la cité, arrêtez-vous un moment auprès d'Ettore et Lucie, qui au travers de leur petite-fille, vous raconteront leurs histoires. Un bel hommage. Un exercice pas toujours facile, qui, malgré mes réserves, se lit avec plaisir.

Voir les commentaires

Quinze rounds

Publié le par Yv

Quinze rounds, Richard Bohringer, Flammarion, 2016.....

Quinze rounds. Quinze chapitres. Dans lesquels Richard Bohringer raconte son enfance, sa jeunesse en banlieue parisienne auprès de sa grand-mère qui l'a élevé, lui, le fils du Boche, né en pleine guerre, 1942. Puis les années de conneries diverses et pas très variées qui permettaient de vivre, de manger et surtout de boire. De se payer la came aussi. Puis Saint-Germain-des-Prés, la musique, les mots déjà avec les diverses rencontres dont celle d'Antoine Blondin. Le cinéma qui lui ouvre ses portes et les belles rencontres avec les réalisateurs, les acteurs, les machinistes, ... Mais aussi le désamour, les colères et le sale caractère qui ferme les portes. C'est tout cela Richard Bohringer. Entier.

Mise à part une remarque liminaire à l'éditeur, sur l'orthographe du nom de l'auteur tour à tour Bohringer ou Borhinger (la bonne est sur la couverture représentée, mais si on ôte la jaquette, c'est l'autre, pareil en 4ème de couverture, ça change en fonction de la ligne), puis sur quelques coquilles laissées, je dois dire que ce livre m'a énormément plu, comme tous les autres de Richard Bohringer. J'aime son écriture, on a l'impression de l'entendre nous lire son texte avec ses changements de rythme, d'intensité, sa voix si reconnaissable, pleine de vie, ses emportements, ses moments de tendresse, ses pauses, tout ce qui fait de l'auteur ce type attachant à la si forte personnalité.

Les premiers rounds sont consacrés à sa jeunesse et aux maladies qu'il a contractées : cécité pendant deux ans puis scoliose sévère qui l'ont obligé à partir loin de Paris pour se faire soigner. Puis le retour, les petites conneries, puis la montée crescendo vers la dope et l'alcool. Le cinéma, le théâtre, les voyages, les rencontres masculines, ceux qui deviendront ses amis, ses proches, les rencontres féminines -la maman de Romane et la maman de ses autres enfants surtout : "C'est en Savoie que j'ai rencontré Astrid. Si jolie avec son anorak bleu dans la neige blanche. Jolie comme l'aurore derrière la montagne. Gracieuse comme une gazelle avec du bélier qui coule dans ses veines. Elle était la nature. Ça me plaisait. J'ai toujours aimé profondément la nature et elle en était un moment." (p.104)-, la recherche du père et de la mère qui l'ont laissé auprès de sa grand-mère....

Je serais trop long si je voulais aborder tous les thèmes dont parle R. Bohringer, c'est l'histoire d'une vie, de sa vie, de sa naissance à la maladie qui le ronge depuis quelques années, le cancer. Le lire, c'est l'entendre, d'autant plus qu'il s'adresse directement à nous, apaisé, sa colère transformée ou laissée de côté pour ne se souvenir que des belles choses : "J'ai soixante-quatorze ans et je tire la route avec toute l'énergie de chaque instant. Il y a des gens qui m'aiment et des gens qui ne m'aiment pas. Alors, ma quête, mon graal, mon attirail de quincailler, mes bontés et le bruit que fait ma vie, le beau et le pas beau, juste un humain, je suis juste un humain. Ça peut prendre toute la vie. C'est promis, vous qui désespérez, chers lecteurs, de devenir meilleurs, vous avez de longues années encore devant vous. Il faut juste se mettre dans l'idée ! Se préparer à son olympisme." (p. 245)

Au fil de ses ouvrages, Richard Bohringer a su construire une œuvre à part, littéraire assurément, qui lui ressemble. J'ai presque tout lu et tout aimé (seuls trois autres titres sont recensés sur le blog, les autres je les ai lus avant : Traîne pas trop sous la pluie, Les nouveaux contes de la cité perdue, C'est beau une ville la nuit). Quinze rounds est différent dans le ton, ressemblant dans la forme. Ceux qui aiment Richard Bohringer apprécieront de le voir apaisé, tranquille et auront -au moins- un pincement au cœur de le voir parler de sa mort. Ceux qui ne l'aimaient pas avant, eh bien je doute qu'ils l'aiment plus avec ce livre. Tant pis pour eux.

Voir les commentaires

Le cuisinier français

Publié le par Yv

Le cuisinier français, François Pierre La Varenne, Éd. Vendémiaire, 2016.....

Sous titré 400 recettes du XVII° siècle, ce livre regroupe les recettes d'un grand chef de l'époque, François Pierre La Varenne. Édité en 1651, le livre obtint un fort succès et devint une bible pour le cuisiniers de l'époque. La version ici présente est abrégée, modernisée et illustrée. Plusieurs chapitres mettent l'eau à la bouche : Potages, Entrées, Accompagnements et ornements, Entremets, Tourtes et pâtés salés, Confits, conserves et salaisons, Desserts et pâtisseries sucrées, Confiseries, confitures, curiosités et délicatesses, Quelques breuvages et agréments pour la table.

La première chose qui vient à l'esprit en feuilletant ce livre, c'est qu'il est beau, richement illustré et que la langue (pas celle de porc ou de bœuf, même s'il en est question) est datée et étrangement belle, des tournures qu'on ne retrouve plus guère maintenant ni dans les romans ni dans les livres de cuisine. Rien que les noms de certains plats ou de titres de chapitres sont dépaysants : "Entrées qui peuvent se faire dans les armées ou à la campagne", "De plusieurs sortes de choses à confire, pour garder dans le ménage de la maison ou de cabaret".

Si certaines recettes semblent encore faisables de nos jours -notamment tout ce qui concerne les confits, confitures, et boissons-, il n'en est pas de même pour toutes quoique elles pourraient endiguer la prolifération de certaines espèces non endémiques : Potage de tortues : Prenez vos tortues, coupez-leur la tête et les pieds, faites-les cuire avec de l'eau, et quand elles seront presque cuites, mettez un peu de vin blanc, des fines herbes et du lard. Lorsqu'elles seront cuites, ôtez-les de la coquille et tirez-en la bile, coupez-les par morceaux et passez-les à la poêle avec du bon beurre, puis faites-les mitonner dans un plat, ainsi que votre pain et votre bouillon. Enfin, garnissez vos tortues bien assaisonnées d'asperges coupées et de jus de citron, puis servez." (p. 21) Végétariens abstenez-vous car il est beaucoup question de viandes, de poissons, dans ces années-là, on présentait cinq plats par repas (pour ceux qui en avaient les moyens, les plus pauvres n'en avaient souvent qu'un seul, le simple potage).

Le XVII° siècle est celui où la cuisine française se modernise et acquiert ses lettres de noblesse qui en feront plus tard et pour longtemps la meilleure cuisine du monde. La Varenne fut un précurseur du livre de cuisine, de la cuisine au beurre (la recette du beurre clarifié que l'on conseille encore de nos jours est dans ce livre). Son éditeur, Pierre David, en 1659, dans la préface écrit des phrases totalement d'actualité : "Nous connaissons quantité d'ouvrages, et qui ont été bien reçus, sur les remèdes et les guérisons des maladies à peu de frais, sans avoir recours aux apothicaires. Mais celui-ci, vous enseignant les manières de corriger les qualités vicieuses des viandes par les assaisonnements diversifiés, qui n'a de même pour but que la conservation et le maintien de la bonne santé, qui ne tend qu'à donner à l'homme une nourriture solide, bien apprêtée et conforme à des appétits qui font, en beaucoup de personnes, la règle de leur vie et de leur embonpoint, ne doit pas, à mon avis, être moins considéré. En effet, il est bien plus doux de faire une dépense honnête et raisonnable, à hauteur de ses moyens, en ragoûts et autres délicatesses de viandes pour faire subsister la vie que d'employer une immense fortune en remèdes pour recouvrer la santé." (p.11)

Un ouvrage à feuilleter, qui peut donner des idées, j'en ai repéré quelques unes pour cuisiner les vieux légumes qu'on a de plus en plus sur les marchés (panais par exemple) voire même ceux qui ne sont jamais tombés en désuétude mais qu'on a tendance à toujours utiliser de la même manière. Bon, je ne dis pas que je ferai des adeptes et je croulerai sous les éloges des convives habituels, mais je vais essayer, ça me donnera la petite motivation qui me manque pour préparer les repas quotidiens.

Allez, bon appétit !

Voir les commentaires

L'odeur du café

Publié le par Yv

L'odeur du café, Dany Laferrière, Zulma, 2016 .....

Dans ce roman, écrit en 1991 et publié à Montréal, puis au Serpent à plumes, en France en 2001, et enfin en poche en cette année chez Zulma, Dany Laferrière raconte l'été de ses dix ans, lorsqu'il s'est retrouvé freiné dans ses ardeurs de jeune garçon par une maladie et les conseils du médecin de se reposer pendant plusieurs semaines. Au côté de Da, sa grand-mère, il observe alors ce qui se passe autour de chez lui, écoute les histoires qui se racontent et les conseils de Da. Il ne résiste néanmoins pas à l'appel des copains pour aller faire quelques bêtises dans les rues de la ville de Petit-Goâve ; la fine équipe n'est jamais méchante mais farceuse. Lorsque les journées sont longues, le jeune garçon se rappelle quelques journées passées, à l'école notamment.

Comme tout le monde, je croyais avoir lu un livre de Dany Laferrière, et, à ma grande surprise, à la lecture des titres de ses ouvrages, je me suis aperçu qu'il n'en était rien. Quelle erreur, surtout que ça fait plusieurs fois que je le vois à des émissions de télévision et qu'à chaque fois, malgré ma volonté de ne pas m'éterniser, eh bien, je l'écoute jusqu'à la fin. L'odeur du café est donc mon premier roman de l'auteur. Essai largement transformé, je me suis régalé à ce récit d'enfance. D'abord, j'ai beaucoup aimé la construction : de courts chapitres formés de courts paragraphes qui se parlent, se répondent sans se suivre obligatoirement, comme lorsque reviennent des souvenirs par bribes, et tous en même temps, ou l'un appelant le début d'un autre avant de revenir au premier, pour en raconter l'entièreté. Loin d'être déroutante, cette disposition dynamise la lecture et l'ancre dans l'enfance dans laquelle on peut passer d'une idée à l'autre sans transition.

Ensuite, l'écriture est un plaisir si évident qu'il paraît même superfétatoire de le signaler. Beaucoup de bonne humeur, d'humour (un peu de culture chrétienne sera nécessaire pour comprendre le dialogue suivant) :

"- Que font les poissons à midi ?

- C'est l'heure de manger.

- Pour les poissons aussi ?

- Pour tout le monde.

- Et qu'est-ce qu'ils mangent ?

- Du poisson, me dit Willy Bony

- Mais on n'est pas vendredi." (p.140)

Même les événement tristes ne sont pas racontés de manière plombante, mais comme des choses qui devaient arriver, des fatalités ; le narrateur ayant dix ans, son insouciance prime, et tant mieux. Il est aussi très à l'écoute des histoires de son pays, des légendes que lui raconte Da. Et puis Dany Laferrière joue avec les notions de vérité donnant à plusieurs reprises différentes versions d'un même fait, vues par différents protagonistes, et là, on s'aperçoit qu'effectivement chacun voit avec ses propres filtres et que la vérité n'est pas toujours telle qu'on la croit être. Habile, très habile et excellent raconteur d'histoire, Dany Laferrière nous embarque totalement dans un sourire permanent. Promis, je le relirai, d'ailleurs un autre titre m'attend...

Voir les commentaires

Ah ! Si j'étais pompiste !

Publié le par Yv

Je voudrais dire ici mon mépris le plus total -c'est le mot- envers tous ceux qui dès que le réservoir de leur putain de bagnole a baissé d'un cran s'empressent à courir la pompe approvisionnée, empêchant donc tous ceux qui ont vraiment besoin de carburant pour travailler de nourrir leur outil de travail. Sans votre empressement aux pompes, nous aurions du stock pour tout le monde pendant plusieurs semaines, au lieu de cela, en deux jours c'est plié, plus rien pour personne, sauf pour vos petites autos d'égoïstes. Naïvement, je pensais que la solidarité était un des piliers de notre société, je pensais même qu'elle avait repris du poil de la bête lorsque les Français sont allés en force manifester un soutien après des attentats. Force est de constater que je me suis trompé, et lourdement. Dès les premières alertes de fermeture des raffineries, le conducteur moyen s'est affolé et a emmené son automobile dans les stations-services, faire la queue des heures pour quelques gouttes qui permettraient de remplir à ras la gueule le réservoir, histoire de faire un ou deux kilomètres de plus que son voisin. Bande de veaux et de moutons ! Et que feront les autres, ceux qui n'ont pas pu, ceux qui n'ont pas eu le temps d'aller faire le plein ? Et ceux qui bossent avec leur voiture, taxis, auto-écoles, artisans entre autres... Chacun sa gueule, chacun sa bagnole et tant pis pour ma voisine ou mon voisin. Bravo la solidarité et l'esprit de partage. Et, n'oubliez pas de remplir vos armoires de farine, de sucre et de boîtes de conserve, on ne sait jamais, dès fois que vous manqueriez...

Je vous crache ici mon mépris d'autant plus volontiers que m'étant petit à petit coupé des actualités, je n'ai appris que vendredi matin, en allant faire mes courses et en voyant une longue file aux pompes à essence, que blocage des raffineries il y avait. Je n'ai pas fait le plein depuis, je ne le ferai que lorsque je n'aurai pas deux plombes à passer dans ma caisse à attendre que les bœufs rajoutent les un ou deux litres qui manquent pour atteindre le ras-bord. Et lorsque je n'aurai plus de carburant eh bien, j'irai à pieds, j'y vais déjà... ou à vélo, ou en transport en commun...

Je serais pompiste, putain, je mettrais le litre de gazole et d'essence à 5 euros, je me ferais des roubignolles en or, et après, je me casserais en vacances loin des cons venus trois ou quatre fois dans la semaine, ou alors, puisque je parle de solidarité, en l'honneur d'iceux -les cons-, je reverserais le surplus à une association de solidarité, ouais, c'est ça, je ferais ça... Mais je ne suis pas pompiste, alors je me contente de vous dire mon mépris et de rêver d'une étincelle, une seule qui mettrait le feu à tous les réservoirs pleins, juste pour le plaisir de voir des belles lumières dans vos bagnoles, ça nous changera, des lumières, elles n'en voient pas souvent !

Voir les commentaires

Boris Bergman

Publié le par Yv

Boris Bergman, ses interprètes, Universal, 2016.....

Boris Bergman, l'homme qui a écrit plus de 1000 chansons est mis à l'honneur dans ce coffret de trois CD. Il a débuté avec Rain and tears d'Aphrodite's child, puis a continué avec des artistes aussi divers que Nana Mouskouri, Dalida, Nicoletta, ... Puis ce fut d'autres rencontres et notamment celle avec Alain Bashung avec qui il écrira Gaby oh ! Gaby et Vertige de l'amour, puis des albums entiers jusqu'au noir Novice, l'album par lequel j'ai vraiment découvert Bashung, que je n'ai plus quitté ensuite. Novice est sombre, noir, totalement décalé en 1989, lorsqu'il sort il marque l'envie du chanteur de casser les codes du rock français (paradoxalement, malgré tout le bien que j'en dis, je n'ai pas cet album, je n'ai commencé ma collection Bashung qu'avec le suivant, Osez Joséphine). C'est le deuxième CD du coffret qui est consacré à Bashung, ses deux grands succès avec Boris Bergman mais aussi d'autres titres moins connus et excellents et des versions d'autres artistes (Keren Ann, HF Thiéfaine, Christophe, ...)

Le premier CD du coffret Bergman est consacré aux Français : Eddy Mitchell (Lèche-botte blues), Juliette Gréco, la très belle chanson de Maxime Leforestier et Vanessa Paradis, Chienne d'idée, les femmes nommées plus haut ainsi que Christophe Maé qui ne sont pas ma tasse de thé, mais aussi l'énergique et excellent Paul Personne...

Le dernier CD est en majorité anglo-saxon, pas mal d'arrangements des chansons de Gainsbourg (Franz Ferdinand et Jane Birkin dans A song for sorry angel, Fautline, Brian Molko et Françoise Hardy dans une reprise d'une de mes chansons préférées de Gainsbourg : Requiem pour un con qui devient Requiem for a jerk, ...). Mais on y trouve également une étrange adaptation de Space Oddity que chante Gérard Palaprat (Un homme a disparu dans le ciel). Le moins qu'on puisse dire à l'écoute de ce coffret c'est qu'en plus d'être très talentueux, Boris Bergman est éclectique

Voir les commentaires