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Souvenirs de l'année terrible

Publié le par Yv

Souvenirs de l'année terrible, Georges le Tervanick, Ramsay, 2010

"En décembre 1908, Jules Garçon, jeune écrivain originaire de Saint-Pol- sur-Ternoise, dans le Pas-de-Calais, termine, sous le pseudonyme de Georges le Tervanick, la transcription des souvenirs de Dominique Thelliez relatifs à son engagement dans la guerre franco-prussienne de 1870"(4ème de couverture). Puis, Jules Garçon compile les lettres de son grand oncle, Léopold Foulon, celles qu'il envoie à sa famille depuis le front de Normandie. Tous deux, Léopold et Dominique sont de simples soldats (Léopold est tout de même caporal) qui témoignent de leur guerre. Ce carnet est resté dans la famille de Jules Garçon, transmis de génération en génération, jusqu'à ce qu'il arrive dans les mains d'Anne-Catherine Blanc, écrivain, qui a travaillé plusieurs mois sur le carnet de Jules pour en établir l'édition.

"Quelle triste chose que la guerre !

[...] De temps à autre un engagement avait lieu çà et là ; le cercle de fer que formait l'ennemi était fermé autour de la ville et l'on sentait qu'il se resserrait de plus en plus.

Mais pourquoi restait-on inactif, pourquoi les chefs n'encourageaient-ils plus leurs hommes, pourquoi cet abattement général ?

On en sut bientôt la cause.

Les munitions manquaient." (p33)

Lorsqu'on voit l'équipement et l'état des troupes, mal préparées, on comprend aisément la cuisante défaite de l'empire français. D'ailleurs Jules Garçon fait un constat intéressant : "Que vouliez-vous qu'une troupe qui n'a jamais manié un fusil, fasse en face d'un ennemi formé de longue date ? en beaucoup plus en nombre (sic). Il arriva ce qu'il devait arriver : nos mobiles quand ils voyaient l'ennemi fuyaient de toute part. Ajoutez à cela que les armes données à ces hommes étaient dans un état déplorable. M. Léopold Foulon me conta lui-même qu'il n'avait jamais pu tirer une cartouche avec son fusil malgré que son arme eût été plusieurs fois chez l'armurier !... Alors ?..." (p.139)

Voilà pour l'état général des troupes, mais ce livre est plutôt la guerre vécue de l'intérieur. Entre avancées, reculades, ordres, contre-ordres, les soldats ne savent plus quoi penser. Ils passent leur temps à le perdre, à chercher à se nourrir, à se vêtir, à dormir et à se sécher tant l'hiver est pluvieux. C'est la débandade, les chefs n'y croient plus et les troupes fuient les Prussiens, si bien que Léopold, dans une de ses lettres avoue qu'il n'en a jamais vu et que ses parents pourraient en voir avant lui, s'ils occupent le Pas-de-Calais !

J'ai beaucoup aimé la première partie, celle dans laquelle D. Thelliez raconte sa guerre et sa captivité en Prusse. Jules garçon fait preuve d'une écriture bien agréable. C'est clair et précis. Un peu chargée en verbes au passé simple, qui lui donne un petit côté désuet, mais cela sied à l'époque qu'il décrit et j'imagine à la manière d'écrire en 1908. En sus, quelques dessins de l'auteur illustrent fort bien ses propos.

La seconde partie, les lettres de Léopold, est plus dure à suivre, parce qu'il nomme beaucoup de villes et villages et que je m'y suis un peu perdu. Et puis, je ne suis pas très amateur des romans ou livres basés sur la correspondance par lettres. Mais elle est intéressante également : elle montre l'évolution des pensées et du moral des soldats. Elle montre également le désarroi des gradés et des soldats, la totale improvisation de l'Etat Major et le désastre que fut 1870/1871.

Un travail remarquable qui ne bouleversera pas la Littérature avec un grand L, mais qui est un témoignage vécu de l'intérieur de ce conflit oublié, supplanté, malheureusement, par les deux Grandes Guerres qui l'ont suivi. A découvrir. Merci à B.O.B, à Ramsay et à Anne-Catherine Blanc.

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H
<br /> Parfois, les petits livres qui marquent un lecteur sans marquer la Littérature, sont encore plus agréables à découvrir.<br /> <br /> <br />
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Y
<br /> <br /> de toutes manières, les livres qui marquent la Littérature ne sont pas légion.<br /> <br /> <br /> <br />