La malédiction du Lamantin

La malédiction du Lamantin, Moussa Konaté, Fayard, 2009
La communauté des Bozos, peuple d'Afrique vivant principalement au Mali, est en émoi : leur Dieu protecteur, le Lamantin, génie du fleuve veut se venger. Et en effet, le chef des Bozos et sa femme meurent lors d'un orage terrible qui arrose et inonde Bamako. Les villageois voient dans ces éléments déchaînés et dans les morts la patte divine de Maa, le Lamantin. Pour eux, ces morts sont surnaturelles. Le commissaire Habib et son adjoint Sosso, eux, n'y croient pas, mais leur enquête est bien perturbée par les croyances et le pouvoir des sages de l'éthnie Bozo.
Après L'empreinte du renard, livre dans lequel les deux policiers enquêtaient dans la communauté dogon, les voici donc confrontés cette fois-ci à la tribu Bozo, à ses fortes croyances ancestrales, mâtinées d'Islam, puisqu'elle est en majorité musulmane. Le meurtre, puisque c'est bien de cela dont il s'agit, est déroutant, très empreint de certains rites bozos. Habib et Sosso vont avoir du mal à enquêter sereinement tellement l'influence des communautés est forte dans ce pays.
Fidèle à son précédent polar, Moussa Konaté nous plonge directement au coeur du Mali : on y apprend énormément de choses sur ce pays, sur les éthnies qui le composent, sur la difficulté de bien vivre ensemble en acceptant les pratiques et croyances des autres. La difficulté aussi pour un commissaire local, formé à l'école des blancs de se faire respecter totalement. Oh, certes, le commissaire Habib est connu honorablement et son travail est salué, dès lors qu'il ne gène pas les combines et arrangements locaux, ni même les us et coutumes du coin.
L'intrigue est crédible et tient la route, mais encore une fois, comme dans le roman précédent, le contexte est formidablement plus intéressant ; Le Mali et les peuples qui le composent donnent une densité au roman, aux personnages. C'est loin, très loin des polars européens ou américains, et c'est tant mieux. Une vraie bouffée d'air orageux, chaud et humide. Un peu de poussière des pistes en plus.
Catherine en parle aussi.