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Bel abîme

Publié le par Yv

Bel abîme, Yamen Manai, Elyzad, 2021

"Je revenais du collège quand j'ai rencontré Bella. Une après-midi de novembre, morose. Un garçon triste, chétif, une tête à claques, la tête baissée, la peur qui habite ses tripes, et parfois, l'envie d'en finir. On n'imagine pas ce que ressent un enfant quand il faut qu'il se fasse encore plus petit qu'il n'est, quand il n'a pas droit à l'erreur, quand chaque faux pas prend un air de fin du monde. Mais en l'entendant, ce jour-là, j'ai redressé le menton." (4ème de couverture)

Et voilà, vous n'en saurez pas plus de ma part sur le contenu, car vous rateriez la belle surprise. Ne lisez point trop autour de ce livre remarquable, courez l'acheter ou si vous l'avez déjà, ne traînez pas, lisez-le. 110 pages, ça va vite et c'est un long monologue du jeune homme qui attend un procès. Il parle à son avocat commis d'office et au psychiatre détaché par le tribunal. On ne sait pas trop au début les raisons de son enfermement, il les explique à ses deux visiteurs.

Jeune homme en Tunisie post-révolution, il vit avec un père universitaire, fainéant, qui ne s'intéresse qu'à sa voiture et frappe sa femme et ses enfants. L'archétype de l'homme autoritaire tel que la société tunisienne en produit, qui doit se faire servir et respecter dans sa maison. Il livre ses réflexions, son amour de la lecture qui l'a sauvé, lui permet de vivre malgré la violence : "Des gens qui savent lire au pays, il y en a à la pelle, mais que lisent-ils, dites-moi ? Que dalle, pour l'écrasante majorité. Elle est fâchée avec les livres, il faut se l'avouer. Vous connaissez ce proverbe ? La parole de nos ancêtres ? Elli kraw métou : ceux qui ont lu sont morts eux-aussi. Oh, mes aïeux ! Lire ne donne pas de pouvoir, lire ne sauve pas ? Cela ne fait aucune différence, on finit toujours les deux pieds devant ? Ok, lire ne rend pas immortel, je vous l'accorde,  mais ça rend moins con, et ça, c'est déjà beaucoup." (p.20)

Puis sa réflexion s'étend à la société tunisienne, qui, malgré la révolution, ne satisfait ni ne permet aux Tunisiens de s'épanouir : "On a quand même gagné la démocratie ? La belle affaire ! Avant, on avait la peste, maintenant, on a le choix entre la peste et le choléra. Avant, on avait les quarante voleurs, maintenant on en a quarante mille." (p.69). Lucide et amer, il sait qu'il n'a rien à espérer de son pays ni des autres, sauf de Bella qui le tient debout.

C'est un court roman, fort, direct, comme si nous étions avec le jeune détenu et qu'il nous exposait ses pensées et son histoire. Très bien écrit, il se lit assez vite, même s'il vaut mieux prendre son temps, pour rester dans l'ambiance et avec le narrateur que l'aon aimerait avoir rencontré dans d'autres circonstances.

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La mécanique du pire

Publié le par Yv

La mécanique du pire, Marco Pianelli, Jigal polar, 2022

Mano Lander se rend à Paris pour une dernière mission, celle qui devrait lui permettre de vivre tranquille par la suite. Lui, l'ancien commando, habitué au pire, devenu un errant solitaire. Sur la route, il porte secours à une jeune femme seule au bord de la route, voiture en panne. Marie est veuve, son  ex-mari s'est suicidé en service, il était flic à la BAC 96. La BAC 96, menée par Ciani est un repère de ripous, de voleurs, de voyous, de violents. Mano Lander accepte d'enquêter sur le suicide du flic et découvre qu'il s'agit d'un meurtre commandé par Ciani, car Lucas, l'ex-mari de Marie voulait dénoncer ses trafics en tous genres.

Face à ces redoutables adversaires, Lander devra user de tactique et de puissance.

Ouh la, ça dépote, ça décoiffe, ça envoie du lourd, ça déménage ! Action survitaminée à toutes les pages. Et m'est avis que ce n'est pas si simple en écriture qu'en cinéma. Marco Pianelli s'en sort très haut la main si l'on aime le genre et même si sans y adhérer totalement, comme moi, on prend le risque e commencer son livre, car, ferré et totalement et pris par le rythme, l'intrigue et les personnages, il devient difficile d'en sortir. C'est violent, évidemment, dur, parfois à la limite du supportable pour une petite âme sensible comme la mienne, mais quel bouquin !

Mano Lander, ex Paco Sabian rencontré dans le précédent roman de l'auteur L'ombre de la nuit, change d'identité pour brouiller les pistes et empêcher quiconque de remonter à lui. Son personnage est un peu développé dans ce roman, au moins les raisons qui l'ont poussé sur la route à aider la veuve et les orphelins. C'est un solitaire sur-entraîné et prêt à tout. Aucun scrupule, aucune attache, mais il est bien sympathique quand même, il vaut mieux l'avoir dans son camp que contre soi.

Je n'ai pas pu résister à lire quasiment en une traite ce roman très noir, brutal. Autant je n'aime pas les films de gros bras, répétitifs et convenus voire conformistes et moralisateurs, autant ce roman est une vraie dose d'adrénaline sans bouger du canapé. En outre, il évite les écueils du cinéma, et sait poser des questions sur la société, son hyper connectivité, sa violence, son chacun pour soi, sa fin inéluctable : "La décadence des plus grandes civilisations s'enracinait dans leur grandeur, quand la faiblesse en leur sein les y prédestinait." (p.222)

Et le lecteur romantique que je suis -on ne rigole pas- de se prendre à rêver d'une happy end tout en redoutant le tragique. Qu'adviendra-t-il ?

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Appelez-moi César

Publié le par Yv

Appelez-moi César, Boris Marme, Plon, 2022

Été 1994, un séjour à la montagne pour des adolescents, qui de jeux en provocations et en volonté d'en montrer aux autres, basculent dans le tragique.

C'est Étienne, qui, vingt-cinq ans plus tard, raconte ce séjour, jour après jour. Comment les jeunes gens qui ne se connaissent pas se testent, se jaugent, s'apprivoisent. Des clans se forment, par âge, affinités. Jessy et son air détaché est celui qui attire les envies, qui est celui à qui les autres voudraient ressembler. Il est cool, semble avoir déjà vécu beaucoup de choses, l'alcool, les cigarettes, les filles, les fugues...

Deuxième roman de Boris Marme, fort bien construit, car si l'on sait dès le début, dès le prologue titré "Rien qu'un épilogue", qu'un drame s'est déroulé, on ne sait pas lequel et la suite du roman est la montée en tension vers l'acmé, le tragique. Très bien fait donc, mais long, j'eusse préféré que le séjour de deux semaines détaillé jour par jour ne durât qu'une semaine ou que les journées de 24 heures n'en fissent que 12. Un peu plus de trois cents pages pour un roman qui, condensé eût été quasi parfait, tendu du début à la fin.

Cette remarque mise à part, j'ai bien aimé l'histoire et sa construction, ça vous l'aviez compris, mais aussi le soin apporté aux personnages, des ados en plein questionnements et souhaits de dépasser les limites. Si Étienne et Jessy sont les plus décrits, les autres ne sont pas en reste, et le groupe est crédible, réaliste. C'est un roman initiatique qui met en scène des jeunes gens qui, sans cesse, se cherchent, doutent, se jaugent, se jugent et veulent surpasser l'autre pour exister.

Boris Marme donne une image fidèle des années 90, la musique, la société, les préoccupations de adultes et des adolescents, le racisme, la montée du front national, le sexisme... tout ce qui, trente ans plus tard, est toujours d'actualité.

Le texte de Boris Marme est beau, très bien écrit, qui varie les niveaux de langage, lorsqu'il passe par exemple des dialogues au récit. Travaillé, fluide, il coule très agréablement. Franchement, mise à part ma réserve du début -c'est mon côté grincheux-, j'ai trouvé ce roman excellent sur tous les plans. Un écrivain à découvrir et dont je cite les premières phrases, histoire de mettre en appétit :

"J'imagine que l'alerte fut donnée aux alentours de 8 heures. Les trois moniteurs prévinrent finalement les gendarmes.

Ils avaient sans doute pensé pouvoir régler ça eux-mêmes, ils avaient attendu une bonne partie de la nuit, avec les jumeaux, les deux seuls qui n'avaient pas participé à la mutinerie, attendu au pied de la montagne, plus agacés qu'autre chose par nos comportement de p'tits cons, déterminés à nous laisser nous démerder et à prendre les mesures qui s'imposeraient pour régler cette affaire." (p.9)

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Casse-tête à Cointe

Publié le par Yv

Casse-tête à Cointe, Francis Groff, Weyrich, 2022

Stanislas Barberian bouquiniste franco-belge, carolo-parisien pour être plus précis, de Charleroi à Paris pour affiner encore davantage se trouve à Liège pour mener des recherches sur la guillotine. Au même moment, et comme par hasard, à Cointe, quartier de Liège, un corps sans tête est retrouvé par deux jeunes urbexeurs (adeptes des découvertes architecturales abandonnées). Sans vraiment le vouloir, mais sans rejeter l'idée, Stanislas est mêlé à l'enquête et apporte ses lumières à la police et à la presse réunies.

Toujours très sympathiques ces enquêtes avec Stanislas Barberian, c'est ici la cinquième, après Morts sur la Sambre, Vade retro, Félicien !, Orange sanguine et Waterloo, mortelle plaine. Francis Groff nous fait la visite des lieux, Liège de part en part ainsi que son histoire et l'histoire de la guillotine en Belgique. C'est très instructif, jamais ennuyeux, sérieusement mais légèrement mené, car si Stanislas est un fervent travailleur, passionné par les livres, l'histoire et les rencontres de ses pairs et au-delà, il ne dédaigne jamais une petite blague ni une bonne soirée arrosée. Entre Belges, autour d'une trappiste, l'ambiance est souvent légère.

Pour cette enquête liégeoise, Stanislas sera davantage une oreille attentive et à l’affût qu'un véritable enquêteur. Il saura cette fois-ci se faire apprécier de la maréchaussée locale ce qui n'est pas toujours le cas dans les autres enquêtes. Comme toujours avec les romans policiers de Francis Groff, le voyage est agréable et l'on n'a guère envie qu'il se termine, alors, on fait durer un peu le plaisir. Et de se demander où Stanislas nous emmènera la prochaine fois, je connais peu la Belgique, n'y suis allé qu'une seule fois et ai beaucoup apprécié mon séjour, et l'envie d'y retourner me prend à chaque fois que j'ouvre un livre de la belle collection Noir corbeau. Icelui débute ainsi :

"Toute l'eau du ciel semblait s'être concentrée dans un gigantesque entonnoir dont la pointe vomissait des torrents de pluie sur le quartier de Cointe, juste au-dessus de la gare des Guillemins. Depuis des jours, la Belgique était plongée dans un chaos liquide qui dévastait les vallées et ravageait des villages entiers." (p.9)

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On the brinks

Publié le par Yv

On the brinks, Sam Millar, Seuil, 2013 (traduit par Patrick Raynal)

Sam Millar a dix-sept ans lorsqu'il est enfermé dans la prison de Long Kesh, l’enfer pour le militants de l'IRA, torturés, humiliés, battus quotidiennement. Il fait partie des blanket men, ceux qui refusent de porter l'uniforme de l'établissement et de travailler, ce qui leur vaut la haine et les châtiments évoqués. Ils sont nus dans leurs cellules nues elles aussi. Rien, un simple matelas et une couverture pour se couvrir. Huit années de sévices, de violences subies, d'humiliations physiques et verbales. Puis la sortie, et Sam tente sa chance aux États-Unis. Il y sera croupier illégal, puis tentera un gros coup, le cambriolage du dépôt de la Brinks à Rochester. Un gros coup, plus de 7 millions de dollars. Et un autre séjour en prison...

Quel bouquin ! Quelle vie ! Puisque c'est sa vie que Sam Millar raconte, ses huit années de détention en tant que militant de l'IRA, mais aussi la vie à Belfast dans les années 60/70 et la violence omniprésente, la vexations envers les catholiques qui ne peuvent pas prétendre à des emplois en vue. L'humiliation et le pouvoir exacerbé de l'Angleterre dans les rues, et encore davantage dans les murs de Long Kesh. Les matons sadiques qui inventent mille et un moyen de rabaisser les Irlandais emprisonnés, de nier leur condition humaine, de les traiter encore pire que des animaux. "Les cellules étaient désormais privées de tout mobilier en châtiment de notre comportement non civilisé. La peinture d'un blanc écœurant avait été remplacée par un marron encore plus écœurant, qui, malheureusement, n'était pas de la peinture vu que les matons, avec leurs gants de caoutchouc épais -les mêmes que ceux dont ils se servaient pour nous donner notre bouffe- avaient rejeté nos excréments dans les cellules, nous forçant à les étaler sur les murs." (p.96)

C'est glaçant, certains passages m'ont pétrifié. Lorsque l'on croit que le pire est atteint, les matons inventent une torture encore plus redoutable. Mais comment ces hommes ont pu tenir ? Huit ans pour Sam Millar.

J'ai découvert Sam Millar il y a quelques années et approfondi la connaissance de son œuvre plus récemment, et je retrouve dans ce roman autobiographique pas mal de situations décrites par l'auteur dans ses polars, souvent durs. Ce n'est pas l'histoire d'un surhomme, mais celle d'un homme qui ne veut pas plier devant l'injustice, l'autoritarisme, qui ne veut pas renier ses valeurs. C'est une lecture forte, puissante, dérangeante car elle fait frissonner de peur qui même si depuis des années le conflit nord-irlandais semble apaisé montre qu'il est loin d'être fini. Le Sinn Fein est au pouvoir depuis peu, mais a laissé un peu de côté les revendications d'indépendance ou d'unification de l'Irlande. Affaire à suivre.

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Les musiques de l'âme

Publié le par Yv

Les musiques de l'âme, Annie Cohen, Des femmes-Antoinette Fouque, 2022

"Nous ne sommes qu'un, acharné à rendre droit ce qui ne demande que cela. Le silence additionné à la quête d'exprimer l'inexprimable. C'est la gouache qui connaît le chemin, qui se fait plus que je ne la fais. Elle soulève des mystères, elle dévoile des formes inédites, elle prend tournure, elle s'impose au point d'éliminer tout geste supplémentaire. L'écriture n'est jamais loin du poignet de celle qui peint. Toujours le noir et le blanc. [...] Avec des pinceaux extrêmement fins, comme des plumes. On n'attend rien, on se laisse faire, on jubile à la montée d'une apparence, on voit qu'elles sont solidaires et actives dans la construction d'un dessin autonome toujours prêt à accueillir d'autres apparences." (4ème de couverture, extrait du livre)

C'est un long monologue intérieur que livre Annie Cohen. Elle va d'idée en idée, de réflexion en réflexion, l'une chassant l'autre et y revenant ensuite, pas pour nous perdre, mais pour suivre son cheminement. Elle évoque son enfance en Algérie, ses souvenirs, ses parents, sa mère surtout, sa création qu'elle soit picturale, la gouache, ou littéraire. Les deux se confondent dans les mêmes gestes, se nourrissent, s'entremêlent. Elle parle librement de la maladie qui l'entrave : physiquement avec des jambes qui ne répondent plus aussi bien qu'avant et psychiquement : sa bipolarité et ses séjours réguliers à Sainte Anne.

Lire Annie Cohen n'est pas de tout repos. Son écriture est abstraite, elle fait penser à de l'écriture automatique et penche vers le surréalisme. : "Et les mots se présentent comme les aplats du blanc de Titane sur le papier ton ficelle. L'expérience de la peinture ouvre les portes pour une écriture abstraite et profonde." (p.18/19) Le texte est parfois tortueux, difficile à comprendre et plusieurs fois, je me suis dit que j'allais l'abandonner, mais non, chaque fois j'y revenais comme happé, fasciné par son rythme, sa beauté, sa poésie. J'ai mis un peu de temps à le finir, l'ai entrecoupé avec d'autres lectures plus linéaires, plus prosaïques. Alterner, découvrir des livres et des lectures très différentes les unes des autres, voilà ce que j'aime. Rien ne me déplairait davantage que d'avoir la sensation de toujours lire la même chose. Écueil largement évité avec Annie Cohen.

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Mémoires d'un gros mytho

Publié le par Yv

Mémoires d'un gros mytho, François Rollin, Hugo Desinge, 2022 (illustré par Stéphane Trapier)

François Rollin, le génial acteur, le maître de l'humour absurde, le dieu du décalage et du non-sens -on ne sait, jamais s'il me lit, il faut que je sois à la hauteur et digne d'au moins un smiley ou un pouce levé, si tant est que Sa Grandeur daigne intervenir sur un blog somme toute modeste-, François Rollin disais-je, écrit un livre de mémoires, de ses rencontres avec les plus grandes personnalités françaises, puisque, humble et pas du genre à se faire mousser, il ne fait que citer ses amis-stars internationales qui ont intercédé auprès de lui pour qu'il trouve un moment dans son agenda surchargé pour discuter avec Sophie Marceau, Gad Elmaleh, Catherine Deneuve, Dany Boon, Isabelle Adjani, Laurent Ruquier, Fanny Ardant, Jean Gabin, Vanessa Paradis, Jean Dujardin, Florence Foresti, Christian Clavier, Carole Bouquet, Gérard Depardieu, Nathalie Baye, Arnaud Tsamère, Sophie Davant, Alain Delon, Emmanuelle Béart, Daniel Auteuil, Isabelle Huppert, Omar Sy, Marion Cotillard, Philippe Etchebest, Juliette Binoche, Fabrice Luchini et Sarah Bernhardt.

Écrire que ce livre est drôle est un euphémisme, il est hilarant, d'une hilaration -je néologise-, qui ne fait point s'esclaffer bruyamment -quoique parfois, je n'en fusse pas loin-, mais bien se tordre les boyaux, se dilater la rate, se froisser la luette -je néologise également dans les expressions. Absurde, mythomane et mégalomane, François Rollin est tout cela et l'assume. Je ne dévoilerai rien des turpitudes, étranges hobbies ou manies, des passions et des bassesses qu'il prête à ses collègues et admirateurs de sa personne, encore que je pourrais dire des trucs sur la mégalomanie de Dany Boon qui bien que maltraité, écrit la préface. Un petit truc : si vous lisez lentement, vous pourrez entendre la voix de l'auteur vous raconter ses histoires, son ton sarcastique et décalé.

Pour conclure, citons l'illustre illustrateur, Stéphane Trapier, auteur également de l'excellent Mes plus grands succès, qui illustre donc -c'est son job- magnifiquement ce délire délirant de gros mytho.

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La dame blanche

Publié le par Yv

La dame blanche, Quentin Zuttion, Le Lombard, 2021

Estelle est infirmière dans un EHPAD. Tous les jours, elle est confrontée à la fin de vie, à la mort de résidents auxquels elle s'est attachée. Ce lien dont les personnes âgées ont besoin, n'est pas toujours du goût des familles, et il pourrait bien faire perdre pied à Estelle.

Heureusement, son amie Sonia est très présente, elle aussi infirmière dans le même établissement, et Estelle a trouvé un moyen de se souvenir de chacun des résidents dont elle s'est occupé.

Très beau roman graphique bleuté, avec ça et là, des touches d'autres couleurs, lorsque la vie se déroule en extérieur ou hors de l'EHPAD. Même si Quentin Zuttion romance son histoire, il met en avant l'implication des soignants auprès des personnes âgées, le soin qu'ils apportent à la fin de vie, à tenter de pallier aux absences des familles qui s'éloignent par manque de temps, par peur de voir son parent veillir et mourir... Estelle est sans doute très -trop- impliquée, qui ne parvient qu'à peine à se sortir de son travail lorsqu'elle est en repos. Mais ce travail est tellement prenant qu'on le comprend aisément.

Quentin Zuttion raconte le quotidien des soigants, à l'encontre de ce que l'on peut entendre sur les maltraitances qui ont cours dans certains établissements, mais il décrit néanmoins les conditions de travail, les sous-effectifs, le manque de temps et la pression des familles qui peuvent mener vers ces dérives.

C'est extrêmement bien fait, et le dessin et les couleurs sont magnifiques. Parfois,  le bédéiste suggére davantage les formes qu'il ne les dessine de manière réaliste, c'est très beau. Un hommage au personnel des EHPAD dont le travail est mal reconnu, et pourtant éprouvant physiquement et émotionnellement.

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