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Le courage des rêveuses

Publié le par Yv

Le courage des rêveuses, Jacqueline Merville, Des femmes Antoinette Fouque, 2021

Une femme marche. Elle vient de s'échapper d'un camp dans lequel elle était enfermée depuis cinq ans, suite à une contamination après une catastrophe dite naturelle. Elle marche, ne rencontre que peu de gens. Sa mémoire l'a abandonnée au soir de son enfermement et elle lui revient peu à peu, par bribes, mais sont-ce vraiment des souvenirs ?

Il semble que les livres d'après la catastrophe écologique fleurissent depuis quelques années. Après, entre autres, Soleil de cendres d'Astrid Monet, Tempête Yonna de Cyril Herry ou encore Après nous le déluge de Yvan Robin, un autre, ce court roman de Jacqueline Merville. Heureusement, je ne suis pas réticent au genre, car il permet de se poser pas mal de questions sur notre avenir, sur les solutions pour amenuiser les conséquences de nos actes... et puis, en prime, ces romans cités sont excellents. Celui de Jacqueline Merville est un peu à part, plus introspectif, plus court ans doute également verse-t'il davantage vers la poésie. Il fait référence à la Shoah, au tsunami de 2004, à la pandémie actuelle, mais parle aussi des conséquences de nos agissements : "Beaucoup devraient mourir sous les bombes, au travail ou par manque de boulot ou empoisonnés à petit feu par l'air, la nourriture, des virus, par l'eau. C'était pénible, c'était mondial. Une expiation. Un état de péché de l'espèce humaine." (p.17)

Tout cela est subtilement amené par les interrogations de cette femme qui marche, comme dans un rêve, qui se souvient d'avant mais aussi du camp, qui tente de rassembler ses bouts de mémoire. Bien écrit, un peu poétique, onirique, c'est un texte qui coule doucement en nous.

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RIP. Albert. Prière de rendre l'âme sœur

Publié le par Yv

RIP. Albert. Prière de rendre l'âme sœur, Gaet's et Monier, Petit à petit, 2021

Albert c'est le petit jeune de l'équipe chargée de nettoyer les lieux d'habitation des personnes décédées. L'avorton, le gringalet, celui qui ne fait peur à personne et pire que ses collègues ne voient qu'à peine, sauf lorsqu'il les gêne. Albert supporte facilement son environnement de travail pourtant particulièrement glauque : des pièces dans lesquelles la mort et parfois des cadavres en état de décomposition avancée rôdent. Jamais un haut-le-cœur, jamais un mot plus haut que l'autre, il sait se faire petit et efficace. Albert porte en lui un secret terrible, de ceux qui obligent à une vigilance de chaque instant.

Tome 4 de la série RIP après Derrick, Maurice et Ahmed. Et toujours le même état d'esprit pour moi, je suis enthousiaste et classe cet opus dans mes coups de cœur, comme les précédents. Je rappelle pour les éventuels ceusses qui ne me liraient pas -il paraîtrait que ça existe, je n'en ai pas rencontré mais je veux bien le croire- que cette série s'intéresse au fil de ses tomes -6 en tout- à chaque membre de l'équipe de nettoyeurs, chacun racontant son entrée et son travail au sein de ce groupe et les événements auxquels il participe ou dont il est témoin. Ce qui fait que chaque dit-évenement est revu dans chaque tome et donne au lecteur un éclairage nouveau, une autre vérité. J'adore l'idée. Et lorsqu'elle est associée à d'autres excellentes idées cela donne de très bons albums. Les chapitres sont séparés d'une page noire avec des citations, et là, à ma très grande joie, de l'une d'une des chansons de Dominique A que je préfère : Il ne faut pas souhaiter la mort des gens -ci-dessous en cadeau- et une autre d'une chanson d'Alain Bashung écrite par ce même Dominique A : Immortels.

Qui connaît la série ne sera point déçu par le scénario ni les dessins ni les couleurs qui en sont les marques de fabrique et les repères. Avec une originalité en sus cette fois-ci, la personnalité hors-norme d'Albert qu'on croyait petit et effacé et qui révèle pas mal de surprises. Je ne peux que conseiller très fortement cette bande dessinée -la série entière cela va sans dire, mais je le dis quand même. Série débuté en 2018 qui devrait donc se conclure en 2023, j'ai à la fois hâte d'en connaître l'entièreté et l'envie de prolonger l'attente...

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Les meilleures intentions du monde

Publié le par Yv

Les meilleures intentions du monde, Gabriel Malika, Intervalles poche, 2021 (première édition, 2011)

"A Dubaï, un riche en influent homme d'affaires décide d'organiser un tirage au sort dont le premier prix est une croisière sur le détroit d'Ormuz. Les heureux gagnants viennent des quatre coins du monde. Depuis le navire, ces personnages aux destins singuliers vont assister à une catastrophe qui va changer la physionomie de la région. Passé le choc initial, l'organisateur de la croisière tient à ce que l'un des passagers, un jeune Français récemment installé à Dubaï, interroge les participants afin de trouver dans leurs parcours personnels un sens à ces événements extraordinaires." (4ème de couverture)

Gabriel Malika, pseudonyme de Olivier Auroy déjà chroniqué sur le blog, a vécu dix ans au Moyen-Orient, il connaît donc la région, ses us et coutumes, ses règles et l'émergence de Dubaï depuis quelques années. Son roman est un excellent moyen de découvrir qui sont les gens qui viennent s'installer à Dubaï et leurs raisons. Il parle aussi des conditions de vie très différentes des conditions occidentales notamment sur le manière de s'habiller -pour les femmes surtout-, sur la consommation d'alcool... Le paradoxe de Dubaï est l'attirance qu'elle produit pour de nombreuses personnes, l'espoir de gagner beaucoup d'argent aisément, car l'argent coule à flot dans l'île, la modernité exacerbée de son architecture, les prouesses technologiques contre les conditions de vie difficiles -voire le déni des droits de l'homme-  pour les ouvriers-migrants et pour les femmes dans un certain traditionalisme des coutumes.

L'auteur parle également de la naissance et du développement de l'Émirat de Dubaï : "Et à chaque nouvelle crise, Dubaï se développait un peu plus. La menace de la guérilla communiste en Oman permit aux Émirats d'exister sur la scène internationale. La révolution islamique fit affluer les capitaux iraniens. La guerre Iran-Irak et le régime de Saddam Hussein conduisirent les riches familles irakiennes à placer leurs économies dans les banques de Dubaï. La guerre du Golfe contraignit le rival koweïtien à reconsidérer ses relations avec les Émirats. Les attentats du 11 septembre enfin, achevèrent de convaincre les Saoudiens qui croyaient bienveillante la terre de l'Oncle Sam. Eux aussi finirent par garnir les coffres des banques de Dubaï. Que dire de la guerre civile au Liban, du conflit israélo-palestinien ou des dictatures de l'Est africain ? Plus le Golfe s'embrasait, plus Dubaï s'engraissait." (p. 80)

Voilà toute l’ambiguïté de l'île qui se construit grâce à l'argent de pays ne prônant pas la liberté, qui est donc indirectement sous leurs coupes et qui dans le même temps veut paraître à la pointe. Tout cela est formidablement décrit dans ce roman, notamment à travers les portraits des femmes, qu'elles soient de la région ou des Occidentales. Jusqu'où peuvent-elles aller sans choquer et risquer pour leur sécurité ?

Il y est question également des sacrifices que chacun peut et veut faire pour gagner de l'argent, du mal du pays, du déracinement, des désillusions. Et si justement, Dubaï n'était qu'une illusion, une bulle un peu irréelle, un monde factice construit sur du rêve ? Le retour à la réalité pourrait s'avérer brutal.

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L'ombre de la nuit

Publié le par Yv

L'ombre de la nuit, Marco Pianelli, Jigal polar, 2021

Un vagabond, une nuit, sur une route d'Ardèche sous des trombes d'eau. Trempé, il ne rêve que d'un arrêt de car, une grange ou tout autre endroit où s'abriter, lorsqu'une voiture s'arrête. A son bord, une femme seule, Myriam, qui rentre du travail et refait inlassablement le trajet sur lequel son fils a disparu cinq années auparavant.

La femme offre le gîte et le couvert à Paco Sabian qui peut se sécher, se laver et qui, touché par la détresse de Myriam accepte de jeter un œil sur le dossier de disparition de son fils. Il devient alors un gêneur pour certains et un homme difficile à contraindre et impossible à contrôler.

"La pluie s'acharnait, comme intentionnelle. Elle faisait payer quelqu'un. C'était en tout cas son impression. Il faisait du stop depuis l'aube. Il tombait de quoi noyer un navire." (p.7) Voilà les premières phrases de ce roman qui ont confirmé mon envie de l'ouvrir. Et le reste est à l'avenant, Marco Pianelli aime jouer avec les mots, les expressions, pour noircir des pages et son roman qui est déjà très très sombre : "Larmes en rétention à la limite de la fuite oculaire, en funambule." (p.12) Pour un premier roman, il fait très fort, et très noir. De la pure action, avec un Paco Sabian, sur-entraîné, capable du meilleur et surtout du pire, de se sortir de toutes les situations. Entre Sherlock Holmes pour son sens de l'observation et de la déduction et un héros de film-de-gros-bras-étasunien. Un solitaire, un taiseux dont on ne sait pas grand chose et qui ne s'épanche pas. Héros solitaire typique du cinéma hollywoodien dans un roman français noir, dur et violent. Du pur testostéroné avec un gentil -mais pas seulement- qui défend la veuve -qui ne l'est d'ailleurs pas.

De l'action, des rebondissements là où l'on croyait que l'histoire se finirait facilement, un poil de finesse là où l'on pensait à des échanges musclés et virils et tout cela dans, je me répète, une langue bien choisie, des mots et des formules qui cognent. Pas mon genre de littérature noire préféré, mais c'est d'une part très bien fait et d'autre part ça l'est tellement qu'une fois commencé, il est bien difficile d'en sortir, sauf parfois pour se reposer après une altercation entre Paco et d'autres gros bras (on ressentirait presque la douleur des coups), mais c'est pour mieux y retourner voir si Paco va bien.

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Le corbeau des lavoirs

Publié le par Yv

Le corbeau des lavoirs, Claire Connan, Palémon, 2021

1978, Pontrieux, petite commune de ce qui s'appelait encore les Côtes-du-nord, un notable, sans doute le futur maire est retrouvé mort pendant le pardon de Notre-Dame-des-Fontaines. C'est le bedeau et fossoyeur local qui, tentant d'endiguer une inondation, a retrouvé le cadavre.

Quelques jours avant, Muriel, trentenaire est de retour après dix-sept ans de diverses galères dans la ville qui l'a vue grandir. Elle retrouve son amie d'enfance Sylviane. Muriel est nommée en tant qu'agent administratif à la gendarmerie. Pas encore gendarme parce que femme, elle ne peut s'empêcher du fouiner dans l'enquête et met à jour des secrets datant de la guerre concernant sa propre histoire.

Claire Connan est nouvelle venue chez Palémon et dans le roman policier. Si son roman souffre de quelques longueurs qui permettent néanmoins de visiter Pontrieux, il est habilement construit et décrit admirablement la vie d'une petite ville dans les années 70. Enfin, j'imagine, car si j'étais déjà né, j'étais d'une part un peu jeune et citadin dans une cité d'une grande ville. Tout est là : les notables aux fortunes dont l'origine ou la croissance ne sont pas toujours très urfs, les secrets des activités de certains pendant la guerre bien tus et enfouis, les jeunes gens qui aspirent à une vie davantage libérée (mais 68 est passé par là)... Muriel fait partie d'iceux et entend bien mener sa vie sans demander à quiconque son approbation. Elle s'impose par son enquête parallèle et sa découverte d'éléments troublants.

Le roman débute comme une enquête assez légère, une comédie avec une Muriel directe et franche, qui tient tête aux hommes et veut prouver qu'elle est au moins aussi douée qu'eux et légitime pour entrer dans la gendarmerie. Elle est gouailleuse, impulsive et réfléchie et fait preuve d'une force de caractère peu commune. Puis, une fois les personnages installés, l'autrice change de registre et la comédie s'efface laissant place au cœur de l'intrigue loin de la légèreté et de l'insouciance. Le tout donne un roman policier très agréable et bien construit qui se suit aisément et qui donne même envie d'aller faire un tour vers Pontrieux.

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Médée

Publié le par Yv

Médée, Nancy Peña, Blandine Le Callet, Casterman, 2021

"Qui Médée était-elle vraiment ? Une mère aimante et une amoureuse assumant ses désirs, que sa passion finit par égarer ? Une femme libre refusant la tyrannie des hommes ? Une barbare venue semer la confusion dans le monde civilisé des Grecs ? Une sorcière redoutable, maîtresse de forces occultes ? Un monstre, tout simplement ? Pour percer ce mystère, c'est Médée en personne que les autrices ont choisi de nous faire entendre : par delà calomnies, et déformations infligées par le temps, Médée nous raconte sa véritable histoire, depuis les jardins luxuriants de son enfance en Colchide jusqu'à l'île mystérieuse d'où elle livre son ultime confession et purge à jamais le geste inhumain et impardonnable d'avoir tué ses deux fils." (description éditeur)

Paru initialement en 4 volumes, voici l'intégrale de cette série passionnante. Si vous êtes, comme moi, une quiche en mythologie, vous adorerez. J'imagine que si vous êtes férus de mythologie, certains détails et libertés que les deux autrices prennent avec la réalité (mais peut-on parler de réalité lorsqu'on évoque la mythologie ?) vous choqueront voire vous révulseront, mais elles s'en expliquent en fin d'ouvrage et je trouve leurs arguments bons. Elles ne tentent pas de rendre Médée sympathique mais juste de la resituer dans son époque où la femme n'était qu'à peine tolérée, alors qu'elle instruite, intelligente, curieuse et avide de nouvelles connaissances ne rêvait que de liberté. Ce n'est pas non plus une lecture féministe du mythe de Médée, que les vrais hommes se rassurent. Non, les deux autrices racontent leur version de la vie de Médée. Blandine Le Callet écrit un scénario qui fait parler Médée, qui livre donc sa version, édulcore certains faits pour en mettre d'autres en avant comme n'importe qui le ferait. Franchement, j'aime beaucoup, j'ai même souvent consulté le dictionnaire pour vérifier la vie de tel ou tel intervenant dont je connais le nom mais pas forcément la biographie : Jason, Égée, Créon, Créüse...

J'aime également le dessin de Nancy Peña, classique, qui rend bien l'insouciance de Médée enfant et la violence et la vie tumultueuse de Médée devenue femme. Les couleurs changent en fonction des périodes, des lieux. Une série qui me permet de réviser la mythologie avec tout l'attrait et le plus que peut apporter la bande dessinée, notamment dans l’accessibilité et la simplicité tout en restant instructive et distrayante.

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Les beaux mensonges

Publié le par Yv

Les beaux mensonges, Céline de Roany, Presses de la cité, 2021

Céleste Ibar est capitaine à la PJ de Nantes, tout juste en provenance de la BRI de Paris, après une agression d'une rare violence dont elle a été victime. Dès son premier jour, elle se fait remarquer du commissaire Quémeneur, qui, pour s'en débarrasser lui demande d'aller constater le suicide d'une femme influente de la région. Sur place, Céleste doute du suicide, certains détails lui font penser qu'il s'agit d'un homicide. Aidée du lieutenant Ithri Maksen, elle commence une enquête qui va la mener à entrer dans le monde feutré et discret de la bourgeoisie nantaise.

Nouvelles venues dans la littérature policière, Céline de Roany et sa capitaine Céleste Ibarbengoetxea dite Céleste Ibar par simplicité s'en sortent pas mal du tout. Je ne suis pas complètement enthousiaste, car les presque 500 pages m'ont paru parfois longues même si la construction en courts chapitres aux points de vue des différents intervenants en rend la lecture aisée. L'ayant lâché quelques jours, j'ai eu du mal à me remettre en tête quelques personnages secondaires qui ont pourtant un rôle important. Il y a aussi un côté un peu racoleur à situer une intrigue dans les milieux bourgeois décadents, à grand coup de partouzes, d'échangisme et de consommation de drogue : "Du cul, du cul, du cul", comme disait une marionnette des Guignols de l'info. Néanmoins, néanmoins, néanmoins, parce qu'un néanmoins il y a -il y en a même trois-, ce polar a pas mal d'atouts. L'intrigue principale et celles qui en découlent sont bien menées et les suspects nombreux, tous plus insoupçonnables les uns que les autres, des gens bien sous tous rapports. Céline de Roany fouille et détaille le milieu dans lequel elle fait évoluer ses protagonistes sans aller dans le voyeurisme ou les descriptions pornographiques. Ce qui fait surtout l'intérêt de ce premier titre, ce sont les personnages et Céleste Ibar en premier. Mystérieuse, peu bavarde, elle forme un duo peu conventionnel avec Ithri Maksen. Si Céleste est comme il est dû au personnage principal, la plus en vue, la plus travaillée, nul doute que la série de romans qui débute avec elle en héroïne gagnera en densité et en intensité avec un développement de ses proches, sa compagne Marie et son collègue Ithri.

Je me suis laissé dire que deux autre titres étaient en cours d'écriture, je prends histoire d'affiner ma première impression.

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Tenir debout dans la nuit

Publié le par Yv

Tenir debout dans la nuit, Éric Pessan, École des loisirs, 2020 (poche, 2021)

Lalie, 16 ans,  vit avec sa maman à Nantes modestement. Un jour un de ses amis beaucoup plus aisé, Piotr, lui propose une semaine à New York ; il accompagne sa mère qui fait plusieurs allers-retours par an. Lalie réunit ses économies pour payer son voyage et se fait une joie de son séjour.

Mais Piotr se comporte mal avec elle à peine arrivé dans leur logement new-yorkais. Lalie s'enfuit et se retrouve seule la nuit dans la grande ville avec la seule obsession de résister.

Éric Pessan lors d'une rencontre à laquelle j'ai assisté, avait dit qu'il n'écrivait pas différemment pour les adultes et pour la jeunesse. Cela se ressent dans ce roman qui s'adresse à un public large et les parents seraient bien mal venus de le laisser à leurs ados sans l'ouvrir. D'abord par les thèmes abordés : les violences faites aux femmes, le harcèlement de rue, le harcèlement en général et la difficulté d'être naturelle lorsqu'on est une femme et qu'on veut vivre comme on l'entend, se vêtir comme on aime court ou long sans se soucier du regard et des remarques des autres et de certains hommes en particulier... En parler et encore en parler à nos enfants pour qu'ils ne deviennent ni des proies ni des prédateurs, les livres aident à ouvrir la discussion.

Ensuite parce qu'Éric Pessan c'est une belle plume et des textes de qualité. Il ne fait pas dans la facilité sous prétexte que le public est jeune. Par exemple, le début : "Au début, au tout début, une fois la surprise et la douleur passées, c'est la colère qui m'a fait tenir debout. J'avais beau avoir peur, être perdue, blessée, terriblement honteuse, paniquée, la colère l'a emporté sur les autres sentiments [...] une fille ne sera jamais écoutée comme un garçon est entendu [...], une femme est une proie et un homme, un prédateur [...], l'on invente mille démonstrations, mille excuses, mille causes, mille malédictions, mille prétextes, mille justifications, mille arguments, mille versets, mille sourates, mille décrets, mille lois, mille raisons médicales, mille raisons psychologiques, mille mensonges pour soumettre les femmes au bon vouloir des hommes [...], l'on invente de toutes pièces que les femmes sont plus faibles quel les hommes, qu'elles doivent être soumises, dociles, obéissantes, dominées et commandées par des hommes." (p.9/10)

Lalie est un beau personnage de jeune femme qui ne se résigne pas. A l'image des femmes que l'on a pu voir récemment suite aux différents mouvements pour dénoncer les agressions dont elles sont victimes. Éric Pessan est juste, fin et point trop pesant ni démonstratif. Il pointe les travers de nos sociétés patriarcales, lance un pavé dans le jardin déjà bien rempli des hommes qui pensent encore que la place d'une femme est à la maison, si possible silencieuse et aux petits soins.

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