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C'est une pastèque ? Non, c'est un chien

Publié le par Yv

C'est une pastèque ? Non, c'est un chien, Pierre Charentus, Ed. Margot, 2018.....

"Vous vous demandez ce que peuvent bien se raconter Miranda le chameau et Jean-Michel l'oie lorsqu'ils se croisent ? Vous avez toujours rêvé d'assister à la rencontre entre Zorro et un type déguisé en le Mont-Blanc ?

Interrogations existentielles, discussions autour du pâté végétal, tranches de vie et aventures épiques... Plongez les yeux fermés dans ce bain d'humour et de poésie !" (4ème de couverture)

Plongez, certes, mais les yeux fermés, ça risque d'être compliqué pour lire les textes et apprécier les dessins. Facile -mais inévitable- comme blague, je le sais, je me mets au diapason de ce drôle de livre. Drôle par le titre, par la préface de l'auteur et par son contenu dans lequel on passe de gamineries, de blagues potaches à des questions philosophiques, des remarques qui interpellent. Si vous connaissez l'expression "avoir un dialogue de sourd", sachez que Pierre Charentus l'illustre parfaitement, ses personnages, parfois humains, parfois animaux, parfois un mélange des deux ne s'écoutant pas toujours, voire presque jamais. Il doit être un frère ou un fils caché de Philippe Katerine tant leurs univers se télescopent. Cette manière de ne rien prendre au sérieux, de dire des banalités, des conneries et au détour de l'une d'elles, hop, l'illumination pour le public de se dire, pas con, il vient de dire un truc profond, en quelques mots simples et une pirouette ou une boutade. De même que la voix du chanteur est fragile, le dessin de Pierre Charentus est volontairement (?) enfantin, malhabile, un peu comme si c'était moi qui avais pris le bic effaçable -et même les pires dessins de vos enfants ramenés de l'école vous apparaitraient alors comme des chefs d'oeuvre. 

Franchement très drôle, très décalé, loufoque, burlesque, ubuesque, au-delà de l'absurde, je dirais absurdissime. Je découvre aussi les éditions Margot grâce à ce titre qui en plus ne coûte pas très cher. Aucune raison de se priver.

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L'amour propre

Publié le par Yv

L'amour propre, Olivier Auroy, Intervalles, 2018.....

"Au salon de massage de M. Victor, rue de Courcelles, Waan semble jouir d'un statut de favorite. Est-ce parce que le propriétaire des lieux l'a vue grandir ?

Depuis qu'elle est devenue orpheline, Waan sait gré à M. Victor de lui avoir évité la fin tragique de la plupart des filles de sa condition en Thaïlande. Mais toute protection a un prix, et si l'écrin somptueux dans lequel elle pratique aujourd'hui n'a rien à voir avec les arrière-cours miséreuses de Chiang Rai, depuis quelques semaines Waan ressent une inquiétude diffuse." (4ème de couverture)

On entre de plein fouet dans ce roman et bien malheureux  serait celui -ou celle- qui ne parviendrait pas à s'intéresser à icelui, car il passerait à côté d'un roman noir étonnant, original et captivant pour ne pas dire envoûtant, de bout en bout. Envoûtant sans doute par le lieu central, le salon de massage. Le travail de Leïla la Marocaine, Katia la Russe et Waan la Franco-Thaïlandaise est minutieusement décrit et concourt pour beaucoup dans la sensualité, l'ambiance très particulière, ouatée mais aussi dure notamment lorsque le désir des hommes est abordé. Ceux qui avec arrogance et suffisance méprisent les masseuses et s'attendent à des extras sexuels. Ceux qui, pourtant pas très attirants sentent que le pouvoir qu'ils exercent dans la société les rend désirables, alors que les trois jeunes femmes ne voient que des corps. L'écriture d'Olivier Auroy est fine, délicate, directe ; s'il sait décrire les corps, les massages sensuellement ou cliniquement, il sait aussi dire les violences que ces femmes ont subies, psychiques, physiques. 

Rendu à la moitié du volume, soit environ à la page 130, je me suis fait la réflexion que je n'étais pas vraiment dans un thriller, que l'histoire avançait doucement, mais en fait, c'est juste que j'étais déjà totalement en empathie avec Waan et que son histoire m'habitait au point de ne pas m'apercevoir que la tension montait irrémédiablement. L'autre raison pour laquelle je me sentais bien dans ce roman, c'est l'ambiance que je décrivais plus haut et les personnages d'Olivier Auroy, très fouillés, les trois masseuses du salon de M. Victor notamment. Chacune d'elle a des raisons de se retrouver à exercer ce job dans des conditions de soumission et de "semi-captivité". De très belles pages leurs sont dédiées, elles-mêmes parfois violentes, dures, mais aussi pleines de tendresse, d'amour et de respect. Et encore ont-elles eu un peu de chance, elles auraient pu se retrouver dans des réseaux de prostitution sans doute encore plus mal loties que dans ce salon. 

La force de ce roman est d'allier "l'univers clos et énigmatique des salons de massage" (4ème de couverture) à une intrigue policière beaucoup plus terre à terre et de nous faire voyager entre la France et la Thaïlande. Je sors de ce roman chamboulé, nul doute que me resteront longtemps en tête Waan et ses collègues, mais aussi tout ce que j'ai pu lire sur les conditions de vie des femmes en Thaïlande (notamment les très jeunes), des femmes dans certains salons de massage attirant des hommes de pouvoir, des femmes en général soumises au désir des hommes et à leur violence. 

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Confucius toute une vie

Publié le par Yv

Confucius toute une vie, Chun-Liang Yeh, Clémence Pollet, HongFei, 2018..... 

551 avant notre ère, Qiu Kong naît dans un pays gouverné par les Zhou depuis des siècles. Celui qui deviendra Confucius va à l'école, apprend à compter, à écrire et aime aller au temple. Bref, Confucius, sa vie son oeuvre. Texte de Chun-Liang Yeh et illustrations de Clémence Pollet pour ce très bel album, beau-livre illustré, pas une bande dessinée. 

Livre destiné à la jeunesse pour mieux savoir qui était Confucius, comment il est devenu ce grand penseur et lire quelques unes de ses maximes. Un dossier final permet aux plus grands de préciser la vie du philosophe chinois et pourra servir de base de réponses aux questions des plus jeunes.

C'est un album très instructif et très beau. Les dessins sont colorés, réalistes, magnifiques, ils attireront l’œil et illustrent un texte simple qui permet de raconter l'histoire du penseur aux plus jeunes. Les éditions HongFei publient là, un très joli livre.

Pour finir, je ne peux résister à placer une citation de Fucius qui avait oublié d'être con (dixit Pierre Desproges) : "Les seules richesses des gouvernants doivent être la justice et l'équité." A bon entendeur...

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The end

Publié le par Yv

The end, Zep, Rue de Sèvres, 2018.....

Théodore Atem intègre en Suède, l'équipe de recherche du professeur Frawley qui "tente de démontrer que les arbres détiennent les secrets de la terre à travers leur ADN, leur codex." (4ème de couverture)

Quelques jours auparavant, dans une forêt d'Espagne, des voyageurs sont morts mystérieusement. Théodore fait un lien entre ces morts, l’apparition de champignons toxiques et une usine pharmaceutique située pas loin de son lieu d'études. Le professeur Frawley n'y croit pas, Théodore insiste et continue ses recherches.

Très loin de Titeuf ou de l'excellent Captain Biceps, Zep dessine et scénarise des albums fort réussis sur des thèmes actuels et toujours liés à l'homme, sa vie son oeuvre. Cette fois-ci il est question de la relation homme nature et du mal que celui-ci cause à icelle. J'aime bien la théorie du professeur Frawley qui dit que les dinosaures ont disparu de la terre parce qu'ils ont "cessé de participer à l'équilibre général" en dévorant "les ressources terrestres et [n'apportant] rien en retour", alors que nous les Hommes sommes encore inexplicablement sur cette planète bien que nous fassions pire que les dinosaures puisque "nous, nous créons le déséquilibre." (p.36)

Cet album est tout de cases monochromes, mais alterne les couleurs : vert, bleu, sépia, gris, ocre. Je n'ai pas cherché à savoir s'il y avait une signification à chaque teinte, peu importe, je me suis laissé embraquer dans cette histoire militante qui prône le respect de la Terre et de la nature, qui met en images les valeurs écologiques, sans pour autant tout rejeter de ce qui fait nos vies actuelles. Zep ne fait pas dans le manichéisme de mauvais aloi, les bons écolos et les mauvais sur-consommateurs, il pousse à réfléchir à travers une fable, un conte pas drôle du tout, qui flirte avec le surnaturel, la science fiction mais qui pourrait bien être dans pas très longtemps réaliste si rien n'est fait pour réduire l'impact et le déséquilibre de l'homme sur la planète.

Et le titre, emprunté aux Doors que le Pr Frawley écoute en boucle.

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La plus jeune des frères Crimson

Publié le par Yv

La plus jeune des frères Crimson, Thierry Covolo, Quadrature, 2018.....

Dix nouvelles composent ce recueil au titre énigmatique. Dix histoires qui se déroulent aux Etats-Unis, au siècle dernier, à différentes époques et dans différents endroits du pays. 

- Billy Rank est un type super : Quand Sam traverse le pays du sud au nord pour retrouver son vieux copain Billy, les retrouvailles ne sont pas forcément à hauteur de ses espérances.

- Les bottes de Bob : lorsque sa voiture tombe en panne, Emerich est secouru par une menue jeune femme Anna-Lisa qui, étrangement, porte des bottes nettement trop grandes pour elles. Ce sont celles de Bob explique-t-elle.

- La dernière fois qu'on a vu Sam : gamins, le narrateur, sa sœur Millie et Sam sont inséparables. Ils sillonnent la forêt, les lacs de leur village. Puis, le jeune homme doit bientôt aller travailler avec son père et délaisse le trio, Sam et Millie se retrouvent souvent seuls.

- Une fille à marier : Lorsque Honk, fêtard, buveur et dragueur invétéré voit Lissia, jeune femme s'approcher de sa cabane, il ne s'attend pas à la proposition qu'elle va lui faire.

- Ma' Grossman, ça va être ta fête ! : Mo sort de prison aidé par ses deux frères aînés eux-mêmes incarcérés. Il doit s'acquitter d'une mission que les deux autres lui ont confiée, délicate et peut-être même dangereuse.

- Dernière illusion : Tom travaille dans un bar sur la route de Vegas. Amoureux éternel de Cassie qui, tous les matins vient prendre son café avec un cookie cuisiné spécialement pour elle, il ne supporte pas l'idée que Dark, son patron veuille vendre le lieu.

- Les cailloux du Petit Poucet : en panne de voiture en pleine nuit  Sally est secourue par Gus, un type étrange qui espère sans doute pas mal de cette rencontre fortuite. Il écoute les fréquences de la police qui vient de découvrir la septième victime d'un tueur en série surnommé le Petit Poucet. La tension monte dans la voiture, Sally se sent en danger.

- La plus jeune des frères Crimson : Nera et Alba sont sœurs et vivent ensemble. Mais cette nuit, encore une fois, Alba découche au grand dam de sa sœur qui subodore une relation sérieuse avec un garçon. 

- Hugo : un vieux gendarme est chargé de convoyer un déserteur jusqu'à un lieu de départ vers la guerre. Pour cela, ils doivent emprunter un itinéraire très dangereux.

- Train de vie : dans cette ville du sud, Sonny, jeune homme noir, après le travail aux champs, prend sa guitare et joue du blues pour tout son quartier peuplé exclusivement de noirs. Un jour, Donald Staunton, jeune homme blanc descend du train et demande une chambre en plein milieu du quartier de Sonny, puis il vient l'écouter jouer et chanter.

Très bonnes nouvelles étasuniennes écrites par un Lyonnais qui nous le ferait presque oublier au point d'aller chercher le nom du traducteur. Il décrit les ambiances, les paysages, les stéréotypes des classiques Américains : tueurs en série, filles perdues, taulards revanchards,  serveurs dans des cafés au bord des routes, ... On visualise parfaitement les lieux et presque les visages. Mais, parce qu'évidemment, il y en a un, Thierry Covolo en joue. Il pirouette, retourne les situations d'une simple phrase, d'un simple mot, et nos a priori explosent. J'ai beaucoup aimé l'écriture décontractée, oralisée, parfois tendue mais toujours avec un goût d'ironie, d'humour, un ton léger : "Mon Impala m'a lâché entre deux de ces bleds paumés qui jalonnaient mes tournées. A une bonne centaine de kilomètres de chez moi. La voiture a hoqueté, comme quand un truc vous reste en travers de la gorge, puis elle s'est arrêtée. Impossible de la faire repartir. J'ai soulevé le capot et ça m'a confirmé ce que je savais déjà : je n'ai jamais rien compris à la mécanique." (p.23)

Des gens simples chez Thierry Covolo, des paumés parfois, des personnes qui ne se rêvent pas un avenir radieux tant ils sont ancrés dans leurs vies paisibles, mais qui, à la faveur d'un événement changeront du tout au tout. Les nouvelles n'ont pas toujours de chute, ou alors très ouvertes, ce qui permet aux pessimistes et aux optimistes de ne pas envisager la même fin.

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Les étrangers

Publié le par Yv

Les étrangers, Eric Pessan, Olivier de Solminihac, L'école des loisirs, 2018.....

Basile, une quinzaine d'années sort de son dernier cours de collège, dépité de n'avoir pas réussi à parler à Lou la jeune fille qui est loin de lui être indifférente. Il traîne un peu avant de rentrer chez lui, se retrouve dans une gare désaffectée et bientôt il rencontre un copain qu'il n'a pas vu depuis longtemps. Ils commencent à discuter, puis se détachent de l'ombre d'un tunnel des silhouettes, celles de jeunes garçons, des migrants en fuite qui se cachent pour ne pas subir la loi du camp de réfugiés.

Roman sans doute plus destiné à la jeunesse, mais qui est lisible par les parents qui ne s'y ennuieront pas. Eric Pessan et Olivier de Solminihac abordent le thème des réfugiés en parlant d'enfants et ils ont raison puisque nombre d'entre eux sont des mineurs. Un peu plus de cent vingt pages assez dures qui ne cachent pas la difficulté de vivre das un camp, la violence qui y règne, mais tout est tellement bien raconté, par le point de vue de Basile que les pré-ados et ados s'y retrouveront aisément. C'est bien vu parce que les deux auteurs n'infantilisent pas les situations ni ne passent par un langage à la mode qui, à mon avis serait inadapté. Basile est un garçon plutôt mur, qui se pose pas mal de questions, confronté à une situation de famille pas facile et qui découvre vraiment que les migrants sont des garçons comme lui, pas simplement des gens dont on parle à la télé. 

"J'ai l'impression que l'on vit tous dans des mondes parallèles. On croit que les autres partagent notre réalité alors qu'ils sont à des années-lumières de nous. Des adolescents de mon âge traversent un quart de la planète pour échapper à la guerre, d'autres sont contraints d'êtres les pères de leurs pères. Et mon père, je pense, dans quel monde parallèle au nôtre a-t-il trouvé refuge maintenant qu'il fuit de plus en plus souvent ?" (p.61)

Un roman à lire et à faire lire aux ados, il permettra soit d'entamer une conversation sur les réfugiés, soit d'en continuer une déjà commencée, de se poser des questions, de chercher des réponses et voire même d'aller voir de plus près pourquoi et comment les réfugiés arrivent en masse et comment nous les accueillons. 

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