Le rouge et le brun
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Le rouge et le brun, Maurice Attia, Jigal polar, 2021
1978, Paco Martinez, ex-flic devenu chroniqueur judiciaire et critique de cinéma part en Italie où Aldo Moro vient de se faire enlever par les Brigades Rouges. Il va essayer de faire des articles sur l'événement, mais il en profite surtout pour échapper à la routine et au manque de son boulot de flic.
Simultanément, Irène, sa femme, découvre dans le grenier de sa mère un écrit de son père relatant un épisode de 1899 : des militants d'extrême droite dont le patron du journal L'Antijuif, se retranchent dans une maison rue Chabrol pour tenter d'échapper aux poursuites à leur encontre.
Plus un troisième fait : un cadavre dans une fontaine à Lauris, Vaucluse.
Retour de Paco Martinez après La blanche Caraïbe, deux ans plus tard. Le lien entre ces histoires est l'extrême qu'elle soit de droite ou de gauche, qui prône la violence et qui ne recule pas devant la mort d'opposants ou supposés opposants. Ces extrêmes qui sont parfois enfouies et resurgissent dans les moments difficiles, parce qu'il est plus facile de trouver un coupable à tout ce qui va mal.
Ce roman est un peu déroutant car on a davantage l'impression de trois nouvelles qui se suivent et peuvent se croiser à certains moments, mais somme toute c'est une bonne idée de l'avoir bâti ainsi, car l'autre construction aurait pu être une alternance des histoires dans des chapitres qui m'aurait sans doute perdu. Si je me souvenais un peu de l'enlèvement d'Aldo Moro -j'étais jeune mais c'était un événement important-, je ne connaissais rien du retranchement des Liguistes antisémites en 1899. Retranchement qui générera l'expression "un fort chabrol". On est en pleine affaire Dreyfus, la révision de son procès à Rennes, qui divise les Français.
Maurice Attia est fort bien documenté et rend les événements dont il parle très vivants par l'intermédiaire de ses deux personnages principaux, Paco et Irène, chacun travaillant séparément. Une fois encore la fiction permet de parler de la réalité et pas forcément la plus glorieuse, d'instruire les lecteurs, de leur rappeler que le pire n'est jamais loin et que même en se dédiabolisant -quel vilain terme-, en usant de techniques de communication éprouvées, les extrêmes restent les extrêmes qui prônent la haine, le repli sur soi, la peur d'autrui surtout s'il n'a pas la même culture ou la même couleur de peau. Mais tout cela est plus finement et plus joliment dit par Maurice Attia.