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Nietzsche au Paraguay

Publié le par Yv

Nietzsche au Paraguay, Christophe et Nathalie Prince, Flammarion, 2019....

Virginio Miramontes, aventurier est, en avril 1888, le seul survivant d'une expédition, laissé pour mort par les Indiens Arumgaranis dans sa pirogue. Bientôt, il est recueilli dans une communauté au fin fond du Paraguay, peuplée de quelques familles allemandes et dirigée par le Doktor Förtser, mari d'Elisabeth Nietzsche, la sœur du philosophe du même nom. Tous les deux, suivis par une poignée de compatriotes, sont venus au Paraguay pour y créer la nouvelle Allemagne, la nouvelle race aryenne pure. 

La Nueva Germania, ainsi s'appelle ce bout de terre, ne tient pas toutes ses promesses et malgré la forte personnalité des deux instigateurs, elle vivote, survit au gré des intempéries, des maladies, de la famine qui guette. C'est donc dans cet endroit que Virginio est soigné.

Court préambule avant de parler de cet étrange roman. Ecrit à quatre mains, par Christophe et Nathalie Prince et finalisé par la seule Nathalie Prince, puisque son mari est décédé fin 2017. Je le connaissais sous son pseudonyme de Boris Dokmak (Les Amazoniques et La femme qui valait 3 milliards) et dire qu'il m'avait impressionné est un euphémisme. Ces deux romans furent de véritables coups, ce genre de livres inoubliables (particulièrement Les Amazoniques, avec ses références et goût du Voyage au bout de la nuit de Céline ou d'Apocalypse Now de FF Coppola). Apprendre qu'il est décédé à cinquante ans m'a fait une sensation bizarre et je remercie son épouse pour l'envoi de ce roman si joliment dédicacé.

Nietzsche au Paraguay est moins flamboyant que les deux précédents, mais plus original, plus étrange, ce qui en fait un roman très attirant. Pour remettre les choses dans le contexte, il faut savoir que la Nueva Germania fut une réalité, menée par la sœur de Nietzsche et son mari (Elisabeth Niezsche, fut à la fin de sa vie, en accord avec les théories nazies). Se greffent sur cette réalité, des personnages de fiction, mais les notes de bas de pages, les envois vers des œuvres littéraires existantes ou fictives brouillent les pistes pour qui voudrait connaître précisément la frontière entre le réel et l'inventé. Ce n'est pas mon cas, embarqué que je fus dans cette histoire folle et menée de mains de maîtres. S'ajoutent à l'histoire racontée par Virginio, des extraits de son livre de bord, des lettres de Friedrich Nietzsche -dont la santé mentale faiblit en la fin 1888 -il finira interné, dans un état mental quasi végétatif-, des fiches de renseignements écrites par le Doktor Förster. 

Inclassable, original, ce roman montre la folie des hommes lorsqu'ils s'enfoncent dans des théories de supériorité des uns par rapport aux autres, cinquante ans avant l'arrivée de Hitler au pouvoir. Il parle de l'aveuglement des moins forts prêts à suivre n'importe qui  leur promettra une vie meilleure même si c'est au détriment d'autres, enfin, je ne vais pas vous la faire sur la théorie nazie, sur l'antisémitisme ces pensées et doctrines immondes qui ont tendance à resurgir, menées par des tarés frustrés, envieux et cons. Il montre bien également la montée de la folie chez un grand penseur de la fin du XIX°siècle.

C'est un roman foisonnant, un truc comme on en lit peu. Raison de plus, s'il en fallait une, pour s'y plonger.

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A
Un tout dernier roman, ça fait toujours quelque chose.
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Y
surtout lorsque les autres ont été de cet acabit
K
Je note Les amazoniques alors !
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Y
Oui et La femme qui valait trois milliards et Nietzsche...
S
Je me souviens aussi des Amazoniques qui m'avait impressionnée. Le grouillement de la forêt contribue à l'angoisse. Le thème de ce roman-ci semble en effet tout aussi intéressant par le thème et son traitement.
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Y
Traitement assez différent, moins tropical, suintant, mais tout aussi passionnant