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Les secrets du Club des Six

Publié le par Yv

Les secrets du Club des Six, Henri Girard, Éd. Rémanence, 2015.....

Lorsque Maryse Labasle vient s'installer dans ce village, c'est pour en devenir l'institutrice. Elle vient avec son fils, François âgé d'une dizaine d'années. Femme seule, elle fait sensation en ce début des années 60. François se lie très vite à Michel, fils d'un ouvrier agricole pauvre et alcoolique et d'une mère effacée. Ils vivent dans une maison sans électricité au sol en terre battue. Un jour, François tombe sur un livre de bibliothèque rose mettant en scène une équipe d'enfants et un chien, Le Club des Cinq. Il décide de créer son club des cinq, mais à six pour cause de gémellité : Michel sera son second, Marsel-Claude -fille ou garçon ?- sera le garçon manqué, et les deux jumelles, ses voisines, joueront ensemble le dernier rôle. Lechien, le chien de Michel sera Dagobert !

Ce délicieux roman se passe au fin fond de la campagne, dans ces années 60 qui verront exploser pas mal de codes, de coutumes, de mœurs, même si l'on est encore loin de tout cela dans ce village. Il commence comme un roman d'enfants qui ont envie de s'occuper ensemble, qui vont fréquenter la même école à la classe unique, qui vont s'unir pour la vie avec l'inévitable échange de serment. Contrairement à ce que pourraient laisser penser le titre et mon résumé, ce n'est pas un roman jeunesse. C'est un hommage appuyé et revendiqué à Enid Blyton, la romancière britannique et à sa série mondialement connue Le Club des Cinq, qui avait en son sein : François (même prénom ici), Mick (joué par Michel), Claude (interprété par Marsel-Claude), Annie (les sœurs Hanni qui s'y mettent à deux, normal pour des jumelles) et Dagobert dont le nom oscillera pour les Six entre Dago et... Lechien. Mais, contrairement à la série anglaise, on fait connaissance avec les parents des enfants qui deviendront des personnages importants, au même titre que leurs rejetons. Tous sont typiques, sympathiques, même lorsqu'ils ont des relations compliquées avec les autres, on sent une vraie souffrance, un mal-être qui les empêche de vivre sereinement. Et si c'était un secret ? Celui que tout le monde tente de cacher, sans y parvenir vraiment. Ou un autre, plus personnel ?

Une mention particulière pour Placide Hanni, le père des jumelles, représentant en spiritueux, qui ne peut s'empêcher de partir dans des envolées lyriques souvent émaillées de mots rares : "Va cuver ailleurs ! Madame Labasle peut prétendre à un autre... sigisbée*.", ou encore, un peu plus loin : "Oh, Dame Labasle ! Il me revient de vous gratifier, répondit Placide. Votre charme mérite plus que ma modeste sympathie. Ne vous turlupinez point, je pars de ce pas afin de le ramener dans sa... hum... thébaïde.**" (p.87) ; mais aussi souvent parasitées par des néologismes, des à-peu-près souvent drôles (comme ce "gratifier" ci-dessus). Je l'imagine bien faisant de grands gestes en même temps qu'il parle, je le visualise parfaitement.

Un roman fort agréable, écrit de très jolie manière, élégante, fine et délicate. Plus profond que le titre et le thème laissent à penser, grâce aux beaux personnages. J'ai beaucoup aimé cette chronique villageoise qui fait la part belle à l'humain, à la rencontre : chacun des protagonistes s'ouvrira à l'autre et se découvrira des talents, un hymne à la découverte de l'autre et à son enrichissement personnel grâce à la différence ici, plus sociale qu'ethnique, lieu et période obligent.

Pour les incultes (comme moi, puisque j'ai usé du dictionnaire -merci Larousse-, je connaissais les mots mais point leurs significations) :

*Sigisbée : chevalier servant d'une dame

**Thébaïde : lieu isolé propre à la méditation

Je lis, avec ce titre, mon troisième livre édité par les éditions de la Rémanence, tous très différents (Au-delà des 125 palmiers, Travers de routes) et je salue le travail de découverte et d'originalité. Je ne peux que vous inciter à vous pencher sur cette jeune et petite maison de Vénissieux.

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A
Je suis tentée ! Je note !
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Y
Bonne lecture alors
K
J'ai lu tous les Enid Blyton quand j'étais jeune, la littérature jeunesse n'était pas développée comme aujourd'hui, on ne pouvait échapper à cette auteure... Alors pourquoi pas cet hommage...
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Y
Moi, j'étais plutôt Les six compagnons, mais j'ai lu -et vu- quelques titres d'Enid Blyton
A
Lecture tentante pour qui a développé son goût de la lecture avec Enid Blyton !
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Y
c'est en tous cas un bel hommage
S
Je crois que rien que l'idée a tout pour appâter les vieux lecteurs que nous sommes. Maintenant, voir si on sera déçus... On a tant rêvé avec ces 5 là!
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Y
si on cherche les mêmes sensations, on sera déçu, mais si on s'attend juste à une référence en filigrane tout au long du roman, ça ira
L
Le club des cinq bibliotheque rose, les six compagnons bibliotheque verte. Que des bons souvenirs. Mais pas dans les versions réécrites ( allégées d'aujourd'hui.)
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Y
bons souvenirs effectivement, je ne connais pas les versions réécrites....
V
oui, le titre me fait penser aux "Six compagnons" de mon enfance ... :) C'est original en tous cas!
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Y
ça l'est indéniablement
Z
Et bien, je me pencherai. Au fait,n le club des cinq ne faisiait-il pas partie de la bibliothèque verte ??
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Y
Peut-être, il me semblait que c'était la rose... mais je peux me tromper
K
Ha, ce club des cinq! Revisité, ça a l'air sympa (oui, pour les grands, je sais)
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Y
ça peut peut-être plaire à des moins grands, mais plus grands quand même que le lectorat du Club des Cinq
A
Moi qui pensais à mes lectures de la bibliothèque rose....
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Y
tu peux, c'est un prolongement
E
Une bonne bouffé de nostalgie en perspective pour les lecteurs/trices de ma génération mais qui risque de moins parler aux plus jeunes d’entre nous. Je vais regarder cela de plus près. J'ai mis sur ma liste au père Noël (entre autres) le roman Damien Alcantara paru aussi aux Éditions de la Rémanence. Le gros barbu va-t-il faire preuve de son bon goût ? Suspense.... ;-)
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Y
Je pense qu'il y a le niveau de lecture nostalgique, pour les "vieux" comme nous et puis, celui qui plaira aux plus jeunes qui n'ont pas lu la série, car c'est un roman vraiment délicieux. Une maison d'éditions à suivre assurément et de bonnes idées cadeau
S
Ah, mais moi aussi j'ai voulu créer mon Club des 5 ! C'était dans les années 70, dans la banlieue parisienne, qui manquait malheureusement cruellement de mystères à résoudre...
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Y
La campagne ou les petites villes étaient peut-être plus propices aux mystères... ?