Petit Piment

Petit piment, Alain Mabanckou, Seuil, 2015..,
Tokumisa Nzambe po Mose yamoyindo abotami namboka ya Bakoko, ce qui signifie en lingala "Rendons grâce à Dieu, le Moïse noir est né sur la terre des ancêtres" est le nom du petit garçon narrateur de ce roman. Orphelin, c'est le père Moupelo, le prêtre de l'orphelinat qui l'a baptisé ainsi, mais tout le monde l'appelle Moïse, ce qui ne lui plaît guère. Moïse donc, 13 ans, est à l'orphelinat sous la coupe d'un directeur autoritaire qui tourne sa veste dès que le régime change. Et cette année-là, c'est la révolution marxiste en République Populaire du Congo. Moïse finit par s'enfuir de l'orphelinat en direction de Pointe-Noire.
J'aime bien Alain Mabanckou, il est même l'un des quelques écrivains pour qui je regarde La Grande Librairie lorsqu'il y est invité, autrement je fuis cette émission qui invite toujours les mêmes à part les numéros spéciaux avec lecture ou choix de livres pour lire pendant les vacances. J'écrivais avant de m'auto-interrompre que j'aimais bien Alain Mabanckou. Je l'ai lu plusieurs fois avec des bonheurs divers : les très bons Black bazar et Tais-toi et meurs et le moins captivant Demain j'aurai vingt ans (d'autres aussi mais non répertoriés dans le blog, car lus avant l'ouverture d'icelui). Petit Piment tombe plutôt dans la seconde catégorie, les moins captivants au moins pour sa première partie. Ainsi que j'ai pu le dire plusieurs fois, je ne suis pas très amateur de l'enfant-narrateur qui permet selon moi de passer quelques faiblesses voire quelques facilités. Malgré mes réticences, en général, Alain Mabanckou passe l'écueil haut la main. Là, je dois avouer que je m'ennuie un peu beaucoup. Je ne retrouve pas la langue truculente de l'auteur ; c'est bien écrit, certes, mais un peu fade. Cette première partie traîne en longueurs, la description de la vie à l'orphelinat aurait pu être plus vive, plus dynamique ; l'auteur tourne en rond, se répète et nous on n'avance pas. Il faut attendre la seconde partie du roman pour qu'enfin il prenne une autre dimension, c'est un peu tard, on est déjà à la page 170 sur 270, mais ne boudons pas notre plaisir : Moïse devenu Petit Piment se lie d'amitié avec Maman Fiat 500 une maquerelle de Pointe-Noire, puis à la suite d'une opération "Pointe-Noire sans putes zaïroises", le bordel est détruit et Petit Piment se retrouve seul et erre totalement désemparé pour ne pas dire carrément barge. Et là, enfin, le récit devient intéressant. Alain Mabanckou donne libre cour à son imagination, retrouve allant, rythme et vivacité. Et ce roman qui débute poussivement finit en beauté avec une centaine de pages réjouissantes. Mon conseil à l'auteur : "Alain, lâche-toi, c'est vachement bien quand tu le fais, ne réprime pas tes pulsions d'auteur à l'imagination fertile. Sois cool, laisse-toi aller !"*
*Qu'Alain Mabanckou veuille bien m'excuser cette familiarité tant dans le tutoiement que dans les conseils d'un simple lecteur à lui, l'écrivain talentueux couronné de prix...