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Droit devant toi

Publié le par Yv

Droit devant toi, Henri Girard, Ed. de la Rémanence, 2017.....

Lorsque le jeune adolescent narrateur arrive dans un petit village à la faveur d'une mutation de son père, il commence par s'y ennuyer ferme. Puis, il rencontre Gilles qui deviendra son seul ami. Gilles, qui contrairement à lui, vit assez librement dans une ferme des alentours entre un père, colosse au grand cœur et une belle-mère charmante qui fait de l'effet aux deux garçons. Le narrateur ne supporte pas sa famille : un père peu présent et dur, une mère sans affection. C'est chez Gilles qu'il trouvera ce qu'il n'a pas chez lui. Mais les mutations de son père continuent et bientôt, il doit quitter le village et Gilles.

Autant le premier roman de Henri Girard passé entre mes mains était gai et positif (Les secrets du club des six), autant celui-ci est sombre. C'est à nouveau une histoire d'adolescents qui grandissent et qui se retrouvent vite confrontés aux changements de leurs corps, de leurs activités, au désir sexuel et à l'amour. C'est Marie-Fleur, la belle-mère de Gilles qui sera la première, à son insu, à être l'objet de leur désir. Il faut dire qu'elle est belle Marie-Fleur, qu'elle est proche des garçons, très amoureuse de son mari et que Gilles est assez malin et bricoleur pour pouvoir l'observer -et partager ses observations avec son copain- en toute sécurité. Tout paraît beau et simple, bucolique voire coquin, mais le grain de sable bientôt viendra gripper cette belle mécanique.

Habilement, Henri Girard décrit les relations entre les deux garçons, cette amitié puissante et exclusive. Il parle bien également de la sérénité au sein de la famille de Gilles et des relations conflictuelles dans l'autre maison. Tout au long de son roman, il nous balade, on ne sait jamais lequel des deux garçons s'en sortira le mieux, lequel vivra au mieux sa vie d'adulte. Lequel manipule l'autre ? Et les filles là-dedans, comment s'en sortent-elles ? Sont-elles, elles aussi manipulatrices ? Marie-Fleur, mais aussi Martine la cousine du narrateur, sa première expérience amoureuse et sexuelle, une jeune femme libre. Car l'on sent bien que quelque chose se trame et que la belle entente risque de se fissurer. Au fil des pages, on ne sait plus trop quoi penser de tel ou tel, et c'est donc un peu contraint mais ravi que l'on cède à la superbe écriture de l'auteur, à sa manière de nous promener et de nous raconter ces vies. Car, Henri Girard fait montre d'un talent littéraire évident : une langue riche, châtiée, d'une élégance rare et plus qu'agréable. J'aime son style classique émaillé de mots parfois peu usités ; j'aime aussi sa manière de raconter en peu de mots, par exemple cet extrait de son prologue où l'un des ados devenu adulte s'exprime :

"Au dispensaire où je fus soigné d'un vilain tétanos dû à l'usage de lames de rasoir pas trop propres, l'infirmier qui me changeait mes pansements aux poignets me prit en sympathie." (p.11)

Élégance, concision, je vous avais prévenus. Auteur et éditrice à découvrir absolument. L'été est propice aux lectures...

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A
Il sera parfait pour cet été, alors.
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Y
pour une petite partie de l'été, je doute qu'il te fasse deux mois
H
Merci pour cette chronique. Bien cordialement.
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Y
Je vous en prie ce fut un vrai plaisir. <br /> ien à vous
Z
Comment résister ?
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Y
je ne sais pas
M
Comme toujours, une chronique bien menée qui me donne envie de découvrir toujours plus...Ma liste est terriblement longue !
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Y
je sais, je sais... mais tant pis, je continue
K
Le passage cité est u n bel exemple d'élégance et de concision, en effet
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Y
j'aime bien ça, c'est bien dit pas un mot de trop ni de manquant